Économie Quaternaire: une nouvelle ambition pour le Parti Socialiste, un nouveau projet pour la France !


Thème : Protection de l'enfance


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Cette contribution s’appuie sur les travaux de Jérémy Lamri, entrepreneur et auteur du livre “2040”.

La France vit aujourd’hui une crise structurelle profonde, née de l’épuisement des modèles économiques et sociaux hérités du XXᵉ siècle. Les crises sanitaire, climatique, énergétique, démocratique et économique récentes n’ont fait que révéler plus fortement ces fragilités déjà profondes : précarité croissante des emplois, inégalités sociales et territoriales exacerbées, dégradation des services publics, désaffection démocratique et crise existentielle d’une société en quête de sens.

Le modèle néolibéral, caractérisé par l’individualisme exacerbé, la compétition à outrance et la financiarisation des échanges économiques, atteint clairement ses limites. En témoignent des chiffres édifiants : 9 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, un taux de chômage structurel élevé, particulièrement chez les jeunes et les séniors, et des inégalités de patrimoine atteignant des niveaux historiques.

Face à ce constat lucide, notre responsabilité collective est désormais claire : réinventer un modèle économique, social et politique à la hauteur des défis du siècle qui vient. L’économie quaternaire n’est pas une utopie ni un mirage : c’est une réponse pragmatique, réaliste et visionnaire aux défis que nous traversons. Cette nouvelle économie repose sur quatre piliers essentiels : la connaissance, les compétences humaines, la solidarité active et le développement durable. Elle tire les leçons des transitions passées : agricole vers industrielle, industrielle vers tertiaire, et désormais tertiaire vers quaternaire. Ces transitions sont à chaque fois marquées par des bouleversements sociaux profonds, mais aussi par des opportunités inédites.

Les socialistes ont la responsabilité historique d’accompagner ces transitions en leur donnant un sens humain, juste et durable.

Pourquoi l’économie quaternaire est-elle une nécessité ?

L’économie quaternaire n’est pas un choix idéaliste, elle est un impératif de notre époque. Nous sommes face à une triple rupture historique qui exige une réponse systémique :

● Rupture écologique et climatique : les modèles productifs actuels, basés sur une consommation effrénée de ressources non-renouvelables, sont écologiquement insoutenables. L’économie quaternaire intègre profondément la sobriété énergétique, l’économie circulaire et la préservation active des écosystèmes.

● Rupture sociale et démocratique : le modèle néolibéral a fragmenté les solidarités traditionnelles et accentué les fractures territoriales et générationnelles. Une économie fondée sur les compétences et les savoirs, qui donne à chaque citoyen un rôle actif et reconnu dans la société, permet de restaurer les solidarités, tout en revitalisant la démocratie participative et délibérative.

● Rupture technologique et culturelle : l’essor fulgurant des intelligences artificielles, de l’automatisation et de la numérisation pose des défis considérables à l’emploi et au travail. Le risque est réel d’un chômage massif et structurel si nous ne réinventons pas en profondeur le sens même du travail et sa place dans nos vies. L’économie quaternaire propose de considérer le travail non plus uniquement sous l’angle de l’emploi salarié productif, mais comme une contribution utile et socialement reconnue à la société.

Quatre piliers essentiels de l’économie quaternaire

Nous considérons que quatre grandes dimensions doivent structurer concrètement l’économie quaternaire :

1. Le capital Connaissance : un investissement massif et transformateur
La connaissance constitue le capital essentiel de cette économie nouvelle. Nous devons engager une transformation profonde de notre système éducatif, afin que chaque citoyen soit capable d’apprendre, désapprendre et réapprendre tout au long de la vie. Concrètement, il s’agit de généraliser des expérimentations comme les écoles ouvertes, le numérique éducatif inclusif et les partenariats universités-entreprises-territoires. La mise en place d’un Compte personnel d’apprentissage tout au long de la vie, crédité dès la naissance, permettra à chaque citoyen d’accéder à des ressources éducatives et culturelles tout au long de son existence. La France doit investir dans son capital humain avec la même détermination qu’elle investissait jadis dans ses infrastructures physiques.

2. La compétence au cœur de la société contributive
Dans une économie dominée par les technologies, l’humain retrouve paradoxalement toute sa valeur. Les compétences relationnelles, sociales et émotionnelles deviennent cruciales : adaptabilité, résilience, esprit critique, créativité, collaboration. Ces compétences, souvent appelées « soft skills », doivent être reconnues comme essentielles au fonctionnement d’une société contributive et inclusive. Nous proposons une grande Stratégie Nationale des Compétences Quaternaires, avec un financement massif des dispositifs de formation professionnelle et d’accompagnement des entreprises et des administrations pour valoriser ces compétences au quotidien. Les entreprises ayant expérimenté ces approches (Michelin, Patagonia, Danone période Emmanuel Faber) en démontrent déjà les bénéfices économiques et sociaux.

3. La solidarité active et le revenu contributif
La gauche a longtemps débattu autour du revenu universel, idée généreuse mais économiquement complexe à mettre en œuvre. Le revenu universel garantit un revenu minimum à tous sans conditions. Nous pensons aujourd’hui qu’il existe une voie plus réaliste et plus juste : celle du revenu contributif. Le revenu contributif est un revenu garanti à celles et ceux qui participent activement à des missions d’intérêt général (écologie, solidarité, éducation, aide à la personne, animation territoriale, culture) ou à ceux dont l’incapacité à contribuer est médicalement ou socialement reconnue. Cette distinction est essentielle : le revenu universel donne sans distinction ; le revenu contributif valorise explicitement la participation active et citoyenne, tout en assurant une protection juste pour ceux qui ne peuvent pas contribuer. Nous proposons de lancer dès 2027 des expérimentations à grande échelle de ce revenu contributif, ciblées sur certains territoires pilotes afin d’en mesurer précisément l’impact économique, social et démocratique.

4. Le développement durable comme principe économique central
L’économie quaternaire positionne le développement durable au cœur de son modèle économique. Il ne s’agit plus de répondre seulement à des contraintes écologiques, mais bien d’en faire un avantage stratégique. Notre proposition est claire : un « Pacte Quaternaire » pour les entreprises, conditionnant les soutiens publics aux engagements concrets, vérifiés et transparents sur des objectifs sociaux et environnementaux précis (neutralité carbone, économie circulaire, égalité sociale, sobriété énergétique). Ce pacte sera accompagné d’investissements publics massifs dans les filières d’avenir : rénovation thermique, énergies renouvelables, agriculture régénératrice, mobilités propres, économie circulaire.

5. Un ancrage territorial au coeur des enjeux de réussite
Le modèle quaternaire ne se limite pas aux grandes métropoles : il s’appuie pleinement sur les territoires périurbains et ruraux, en valorisant leur potentiel humain et environnemental. Le revenu contributif sera particulièrement bénéfique aux territoires ruraux : il permettra d’encourager la revitalisation locale, de maintenir ou recréer des services publics et d’intérêt général, et de favoriser la solidarité territoriale avec l’émergence soutenue des tiers lieux. La transition énergétique territorialisée, l’économie circulaire locale et le développement des circuits courts agricoles deviendront alors des leviers économiques puissants pour ces territoires aujourd’hui fragilisés.

Un programme politique pragmatique et ambitieux pour 2027

Pour que l’économie quaternaire devienne une réalité politique concrète, nous devons dès aujourd’hui structurer un agenda précis et réaliste, échelonné de 2025 à l’échéance présidentielle de 2027. Il ne suffit plus de discours inspirants : le temps est venu de poser les fondations d’une véritable stratégie de mise en œuvre politique, législative et territoriale.

● États Généraux du Quaternaire (2025-2026)
Dès l’année 2025, nous proposons d’organiser des États Généraux citoyens, en partenariat avec des collectivités locales volontaires sur l'ensemble du territoire français. Ces États Généraux auront pour vocation de définir collectivement les grands principes d’application concrets du modèle économique quaternaire au sein de chaque territoire. Sur le modèle éprouvé de la Convention Citoyenne pour le Climat, ils permettront aux citoyens de s’emparer pleinement du sujet par le biais de débats citoyens et d’ateliers territoriaux. Ainsi, chacun pourra exprimer ses attentes, identifier les priorités spécifiques à son territoire et participer activement à une démarche authentique de co-construction politique et citoyenne. Par ailleurs, ces rencontres intégreront la mobilisation active des acteurs économiques et sociaux locaux, tels que les entreprises, les associations, les coopératives, les acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), ainsi que les universités et écoles locales. Ces acteurs apporteront à la fois leur expertise et leur légitimité aux échanges, enrichissant ainsi les propositions issues de ces rencontres. Enfin, à l’issue de ces États Généraux, une cartographie précise sera établie afin d’identifier clairement les territoires prêts à expérimenter concrètement le revenu contributif et les dispositifs éducatifs associés. Cette cartographie offrira une base solide et opérationnelle pour la mise en œuvre progressive et pragmatique du modèle économique quaternaire.

● Une proposition de loi-cadre sur l’Économie Quaternaire (2026-2027),
Une action forte permettrait d’occuper le terrain, de démocratiser le sujet auprès du grand public, et de préparer un argumentaire politique soutenu par des actions menées avant même les élections présidentielles de 2027. Cette loi-cadre inclurait des mesures concrètes telles que la définition précise et opérationnelle du revenu contributif, sa gouvernance locale et nationale, ses modalités de financement et les critères précis de son attribution. D’autres mesures pourraient être envisagées, telles que la mise en place d’un Pacte Quaternaire national pour les entreprises, conditionnant toute aide publique à des engagements stricts sur les dimensions environnementale, sociale et contributive. Le projet de loi pourrait également poser la base des modalités de financement public du revenu contributif, des investissements massifs dans l’éducation, la formation et l’accompagnement des entreprises vers le modèle quaternaire.

● Des Expérimentations territoriales pilotes (2027-2029)
À l’issue des élections présidentielles de 2027, le gouvernement issu de cette nouvelle majorité socialiste pourra immédiatement lancer une série d’expérimentations territoriales pilotes grâce à la loi-cadre. Ces expérimentations auront pour objectif de tester et d’ajuster le dispositif de revenu contributif au sein de territoires volontaires variés, qu'ils soient ruraux, périurbains ou urbains fragiles, en évaluant précisément leurs impacts économiques, sociaux, environnementaux et démocratiques. Elles permettront également de mesurer concrètement les effets du Compte personnel d’apprentissage sur les trajectoires individuelles des citoyens, en particulier des jeunes, ainsi que sur leur capacité à prendre pleinement part à une société fondée sur la contribution. À travers ces projets pilotes, il sera possible d’identifier rapidement les bonnes pratiques à généraliser, ainsi que les éventuelles difficultés à surmonter avant un déploiement à l’échelle nationale prévu à partir de 2030. Cette démarche progressive et pragmatique garantira la crédibilité opérationnelle du modèle économique quaternaire tout en renforçant la confiance des citoyens dans notre capacité collective à engager une réelle transformation de la société.

Une nouvelle ambition collective, une vision politique renouvelée

L’économie quaternaire dépasse largement un simple enjeu technique ou économique : elle constitue la clé d’une refondation complète du projet politique porté par la gauche française. Elle est avant tout une vision collective capable de rassembler au-delà des clivages habituels et des divisions stériles qui affaiblissent depuis trop longtemps notre famille politique.

Les socialistes ont aujourd’hui besoin d’un nouveau récit mobilisateur, capable de nous redonner une ambition collective et de susciter à nouveau l’enthousiasme citoyen. L’économie quaternaire porte précisément en elle cette ambition, car elle réconcilie pragmatisme économique, justice sociale et responsabilité écologique. Ce nouveau récit doit nous permettre de renouer avec les classes populaires, les jeunes générations, mais aussi les territoires oubliés ou marginalisés par la mondialisation. Il offre une alternative concrète, crédible et désirable au modèle néolibéral, qui peine aujourd’hui à convaincre en profondeur les Français.

L’économie quaternaire repose sur une conviction centrale : l’humain est la première ressource de notre société, et son épanouissement doit être la première finalité de toute politique économique. Le revenu contributif, l’investissement massif dans l’éducation, la valorisation des compétences humaines et l’ambition écologique constituent autant de leviers pour construire une société plus juste, plus inclusive, plus durable, mais aussi plus heureuse.

Le défi est immense, mais il est à la hauteur de notre responsabilité politique. Si nous voulons que l’année 2027 marque un tournant politique majeur, nous devons oser dès aujourd’hui poser les bases d’une stratégie crédible, ambitieuse et audacieuse. Notre proposition, par cette contribution, est précisément celle-ci : construire dès maintenant les fondations solides d’un programme présidentiel clair, audacieux et cohérent, dans lequel l’économie quaternaire occupera une place centrale.

Cette contribution constitue un acte fondateur, que nous invitons tous les militants, sympathisants, élus et dirigeants du Parti Socialiste à rejoindre et à amplifier. L’heure n’est plus aux hésitations ou aux compromis tièdes: elle est à l’ambition collective, au courage politique, et à la détermination stratégique. Ensemble, nous pouvons porter et réaliser cette vision nouvelle. Ensemble, nous pouvons faire de l’économie quaternaire notre grande promesse pour la France. Ensemble, nous pouvons écrire le renouveau politique français de 2027, avec audace, responsabilité et enthousiasme.

La France attend de nous ce courage. Notre responsabilité est désormais claire : être à la hauteur des attentes et de l’espoir citoyen. C’est ce projet, que nous défendrons avec force dès aujourd’hui, pour 2027 et les années à suivre.


Contributeurs : Océane Godard, députée PS de Côte d’Or et Conseillère Régionale de Bourgogne-Franche-Comté.


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