Thème : International
La chute du mur de Berlin en 1989 a été un moment historique pour l’ensemble des peuples d’Afrique, marquant le début d’un cycle d’autodétermination et de quête de souveraineté. Dans le sillage du discours de La Baule prononcé par François Mitterrand en 1990, liant l’aide publique au développement à l’adoption de réformes démocratiques, des espoirs ont été suscités. Mais plus de trois décennies plus tard, le constat est amer : les promesses ont laissé place à la défiance. La parole a trop souvent remplacé l’action, et les relations entre la France et l’Afrique restent prisonnières d’un déséquilibre hérité de l’histoire coloniale.
Les socialistes doivent porter une nouvelle ambition, en s’appuyant sur l’héritage mais en rompant avec les logiques tutélaires. Nous devons bâtir une relation d’égal à égal, fondée sur des engagements clairs, assumés et partagés, traduits dans des pactes concrets. Il ne s’agit plus seulement de « tourner la page », mais d’écrire ensemble un avenir juste, solidaire et coopératif. Cela exige de regarder en face notre histoire, d’assumer nos responsabilités, mais aussi de proposer une alternative crédible au cynisme géopolitique.
1. Pacte institutionnel : Pour un nouveau cadre des relations bilatérales et multilatérales
Nous proposons la révision des accords institutionnels hérités de la décolonisation, notamment la loi Defferre de 1956 et les accords de Matignon de 1958, devenus obsolètes. Il est temps de bâtir une architecture contractuelle transparente, démocratique et réciproque entre la France et les États africains, fondée sur le respect des souverainetés, des institutions et des parlements.
2. Pacte démocratique : Soutenir les transitions démocratiques et les libertés
Fidèles à l’esprit du discours de La Baule, nous réaffirmons que la démocratie, les libertés publiques, l’alternance politique et la justice indépendante ne sont pas des options, mais des principes non négociables. Le Parti socialiste soutient :
L’application effective de la Déclaration de Bamako (2000), avec la possibilité de sanctionner les États membres de la Francophonie en cas de rupture de l’ordre constitutionnel.
Un appui technique, diplomatique et logistique aux processus électoraux en Afrique.
La création d’un Observatoire francophone pour la démocratie et les droits humains, rattaché à l’OIF, en partenariat avec les sociétés civiles.
3. Pacte économique : Pour une intégration gagnant-gagnant
Nous voulons rompre avec les logiques d’aide descendante pour bâtir de véritables partenariats d’intégration économique. Cela suppose :
Des investissements publics et privés conditionnés à la création d’emplois locaux et à des transferts de compétences.
Le soutien aux circuits économiques endogènes, aux PME africaines et à l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes.
L’intégration des diasporas dans les politiques de développement, en reconnaissant leur rôle stratégique.
4. Pacte monétaire : Refonder le lien CFA-Euro
Nous défendons la transformation du cadre monétaire liant l’Afrique francophone à la zone euro. Le Parti socialiste propose :
Un mécanisme de « bonus-malus » budgétaire et monétaire visant une répartition de la gouvernance à 75% en faveur des pays africains et 25% pour l’Union européenne.
Une transition vers des banques centrales africaines pleinement souveraines, avec un accompagnement technique européen.
La transparence sur la gestion des réserves de change et une implication des parlements nationaux.
5. Pacte de défense : Pour une sécurité partagée et régionale
La sécurité en Afrique ne peut être assurée par la seule France. Nous appelons :
À une évaluation du dispositif militaire français (présence, budget, finalité) dans les zones CEDEAO et CEMAC.
Au renforcement des capacités de défense régionales, avec un soutien logistique et diplomatique à l’intégration sécuritaire africaine.
À la sortie progressive des logiques néo-interventionnistes au profit de partenariats transparents et codécidés.
6. Pacte socio-culturel : Refonder la Francophonie
La Francophonie doit redevenir un projet politique populaire et partagé. Nous proposons :
Un recentrage de l’OIF sur la langue française, la diversité culturelle et les droits fondamentaux.
La conditionnalité de l’adhésion aux engagements linguistiques, éducatifs et démocratiques.
La démocratisation des Alliances françaises, le soutien aux enseignants, et la création de filières bilingues publiques avec les États et collectivités locales.
7. Pacte socio-professionnel : Une autre politique migratoire et sociale
Nous voulons une politique migratoire juste et humaine, avec :
Un droit à la retraite pour les anciens travailleurs immigrés, accompagné de la création d’une caisse spécifique dotée de succursales consulaires dans les pays d’origine.
La sécurisation des parcours administratifs (titres de séjour, naturalisation, reconnaissance des diplômes).
Des accords bilatéraux de mobilité et de réciprocité entre les services publics.
8. Pacte mémoriel : Reconnaître, réparer, transmettre
La mémoire coloniale reste un angle mort du récit national. Le Parti socialiste demande :
La création d’un Institut public de la mémoire France-Afrique.
Une politique de restitution du patrimoine culturel africain.
L’intégration des mémoires africaines et afrodescendantes dans les programmes scolaires et dans les musées publics.
Conclusion : Pour une France partenaire des peuples africains
C’est par l’écoute, la réciprocité et l’engagement politique que nous pourrons reconstruire une relation entre la France et l’Afrique. Cette relation ne peut plus être fondée sur des schémas anciens ou des intérêts unilatéraux. Elle doit incarner l’égalité, la justice, la paix, et la solidarité active.
Contributeurs :
- Fatima OGBI, adjointe au maire de Grigny, conseillère régionale
- Saïd Laatiriss, Secrétaire de la section PS de Grigny
- avec la section PS de Grigny (Essonne - 91)