– Mercredi 12 octobre 2022
Yannick Trigance, secrétaire national à l'École, l'Éducation et l'Accès aux savoirs
Il y a les beaux discours et il y a les actes : une fois de plus le ministre Pap Ndiaye vient de le démontrer.
Lors de sa conférence de presse de rentrée, le Ministre de l’Éducation Nationale avait déclaré avec un certain lyrisme : « l’École est injuste avec les pauvres ».
On pouvait donc s’attendre à une inflexion politique forte en matière de budget pour lutter contre les inégalités qui frappent en premier lieu les plus modestes : la préparation du budget 2023 nous révèle qu’il n’en est rien, bien au contraire.
Les documents préparatoires au budget de l’Éducation nationale 2023 sont explicites et particulièrement cruels pour les élèves issus des milieux les plus pauvres : les fonds sociaux n’augmentent pas et les bourses pour le collège diminuent.
Les fonds sociaux jouent pourtant un rôle majeur dans l’accompagnement et le soutien aux élèves issus des milieux très défavorisés : ces crédits sont délégués aux établissements et permettent de satisfaire les besoins fondamentaux des collégiennes et collégiens qui en bénéficient : restauration scolaire, sorties, habillement, soins dentaires, …
Ces fonds sociaux permettent de garantir à tous les élèves le droit d’effectuer leur scolarité dans les meilleures conditions possibles, répondant ainsi aux objectifs de fraternité et de solidarité qui devraient caractériser notre système d’enseignement public.
Dans un contexte de crise économique, sanitaire et sociale marquée par une augmentation de la pauvreté et des inégalités, et alors que le budget des fonds sociaux avait diminué de 16.6% sous le quinquennat Macron/Blanquer, le gel de ce budget pour l’année 2023 constitue une faute politique majeure face à l’urgence de la situation pour toute une partie de notre jeunesse.
Quant aux bourses pour les collégiens les plus démunis, le projet de budget 2023 fait état d’une diminution de plus de 5 millions d’euros, passant de 758 725 791 euros à 753 496 017 euros. De manière parfaitement cynique, cette baisse est justifiée par la baisse démographique dans les collèges.
Pourquoi ne pas profiter de cette baisse démographique pour permettre à davantage d’élèves de bénéficier de cette bourse dans une période de fragilisation sociale et économique des familles les plus modestes ?
Alors que le collège reste le chaînon le plus délicat de notre système éducatif notamment pour les élèves les plus fragiles socialement et scolairement, la diminution du budget des bourses pour les collégiens porte un nouveau coup à l’égalité des chances tant vantée par l’actuel ministre de l’éducation.
Pour les socialistes, les fonds sociaux et les bourses ne sont pas des aumônes concédées aux plus pauvres : il y a dans notre pays 1.2 millions d’enfants et d’adolescents qui vivent dans des familles en grande pauvreté avec dans certains quartiers 30% à 40 % d’enfants qui connaissent des conditions de vie très difficiles.
Ces aides correspondent à de véritables besoins : en les faisant passer sous les fourches caudines des ajustements budgétaires, c’est l’avenir de milliers d’élèves qui est sciemment fragilisé.
Notre Ecole de la République a des obligations : alors que la corrélation entre milieu socio-économique et performance des élèves est bien plus marquée dans notre pays que dans la plupart des pays de l’OCDE, le budget 2023 pour les fonds sociaux et les bourses du collège détériore plus encore la situation des élèves et des familles les plus démunis.
Monsieur le Ministre Pap Ndiaye, passez aux actes : faites que l’École ne soit plus injuste avec les plus pauvres !