Contribution du Pas-de-Calais : Fidélité à nos valeurs et pratiques - le socialisme, une idée d’avenir

Socialistes du Pas-de-Calais, nous tenons à témoigner : nos concitoyens nous demandent de porter nos valeurs et d’actualiser notre exercice de la politique. Ils réclament que nous affichions plus clairement des orientations globales qui découlent de notre identité socialiste, dessinent un projet de société et traduisent une vision commune.


C’est l’objet de cette contribution.

Faut-il le rappeler ? Notre objectif est d’exercer le pouvoir, et non de n’être qu’une force d’opposition, afin de mettre en œuvre un projet de société plus ambitieux que de simples programmes de gouvernance : transformer la société, dans un mouvement d’émancipation et de progrès social.
Pour cela, nous devons être audibles, c’est-à-dire parler d’abord et avant tout de ce qui nous ressemble, de ce qui nous caractérise, de ce qui nous définit.
Face à un centre et une droite qui justifient les inégalités sociales par « l’ordre naturel des choses », face à une extrême-droite qui exacerbe les inégalités sociales en opposant les groupes sociaux, « nous » contre « eux », nous devons réaffirmer notre identité : celle d’un socialisme au plus proche des personnes démunies, en phase avec la réalité pour mieux la transformer.
Nos concitoyens nous assignent, à nous socialistes, une responsabilité : incarner le pôle de stabilité, au sein de la gauche, qui répondra à la fois au désenchantement démocratique que l’on constate depuis des années et aux politiques néolibérales qui asphyxient notre modèle social.
Ce pôle de stabilité, seul le Parti Socialiste est à même de le constituer ; mais à la condition expresse qu’il sache remettre ses valeurs en avant et se réactualiser.
Invoquer une appartenance au camp de la gauche ne suffit pas à susciter l’adhésion des électeurs de gauche. 
Nous devons inlassablement rappeler ce qu’est la gauche et ce qui, au sein de la gauche, nous différencie de nos partenaires, au-delà des solutions techniques ou bureaucratiques, au-delà des choix tactiques et des stratégies électorales.
Sur le plan « idéologique », la volonté de faire sens « ensemble », de favoriser les mobilités sociales, dans un monde contraint par les bouleversements climatiques et géopolitiques, marqué par les inégalités économiques et sociales.  D’allier la liberté d’initiative, d’innovation, de promotion sociale, et l’égalité par la redistristribution, et donc l’impôt, pour exercer la solidarité, expression de la fraternité.
Sur le plan tactique, revenir à nos fondamentaux et sur notre pratique politique.

Nos « fondamentaux » – travail, services publics, solidarité
Nos propositions sont particulièrement attendues dans trois domaines, qui fondent en quelque sorte nos valeurs : le rapport au travail, les services publics et la solidarité.


1. Le travail

Le travail, ou le rapport au travail, constituent encore aujourd’hui l’essentiel de la vie des Françaises et des Français, qu’ils ou elles soient en âge de travailler, pas encore en âge de travailler ou, paradoxalement, bientôt plus en âge de travailler ; au travail ou sans emploi.
Nous gagnerions à remettre au premier plan notre conception de ce que doit être le travail, à travers la notion, par exemple, de travail digne :
o Un travail digne, c’est un travail qui donne à celui ou celle qui l’exerce les moyens de vivre, c’est-à-dire non seulement de « reproduire sa force de travail », mais aussi de se cultiver, avoir une vie sociale, et éduquer ses enfants. 

Au nom de ce principe, nous ne pouvons accepter ni le retour du « travail à la tâche », ni l’ubérisation, ni le développement des modes de travail morcelé, ou fragmenté, qui ne permettent pas de vivre dignement de son travail, si ce n’est à condition de cumuler plusieurs emplois. Nulle rémunération ne doit être inférieure au SMIC.

Nous devons également réexaminer la question de l’échelle des salaires, dans les entreprises, ainsi que dans la société toute entière, entre les différents métiers.

o Un travail digne, c’est un travail auquel on accède dignement : par son expérience, par sa formation, et non par une succession de contrats à statuts précaires, stagiaire, puis alternant, puis intérimaire, puis en CDD … 

Ne devrions-nous pas prendre position face au développement des stages dans les cursus scolaires, dès la fin du collège, alors qu’ils ont souvent pour effet d’assigner les adolescents à une catégorie sociale corrélée à la position occupée par leurs proches dans la société, davantage que de leur faire découvrir de nouveaux horizons ? 

Devons-nous accepter que des enseignes, notamment dans la grande distribution, semblent fonctionner par combinaison de différents statuts précaires : stagiaires, alternants, intérimaires, employés en CDD, plus que par des salariés en CDI ? 

De voir des collectivités locales proposer des offres de stage ou d’alternants qui se substituent manifestement à de vraies offres de postes ?

o Un travail digne, c’est aussi un travail qu’on peut exercer sans risque pour sa santé, physique ou psychologique. 

La défense et l’amélioration des conditions de travail sont affaires de progrès social, et les inégalités d’expositions aux accidents et maladies professionnels des inégalités que nous devons combattre.

Le développement des « bullshit jobs » doit être combattu, ne serait-ce qu’en raison de ses conséquences sanitaires. Il en est de même des activités novices à l’environnement.

o Un travail digne, c’est enfin un travail qui permet de profiter d’une retraite ; nous ne pouvons accepter que l’âge de départ à la retraite soit postérieur à l’espérance de vie en bonne santé pour nombre de carrières. 

C’est également un travail qui permet de se constituer un revenu pour sa retraite : attachés au système par répartition, nous ne pouvons accepter que les montants des pensions, en particulier des femmes qui ont subi des périodes de travail partiel, soient si faibles. 


2. Services publics et réduction des inégalités

Les services publics protègent et réparent. Ils représentent à la fois un bouclier contre la misère et le bras armé des politiques de réduction des inégalités et de mise en œuvre du progrès social. Notre responsabilité est de veiller sur eux, car ils sont les garants de la cohésion nationale.
Nous ne pouvons accepter qu’ils soient sacrifiés sur l’autel d’une prétendue rigueur budgétaire pour dégager les 150 milliards d’euros de cadeaux aux entreprises consentis chaque année par l’Etat.
Réhabiliter l’Etat-Providence est aujourd’hui un combat culturel. Nous devons rappeler qu’il a été mis en place en réaction aux conflits mondiaux, pour réduire les inégalités sociales. Qu’il a été développé dans un mouvement de décentralisation bienvenu.
Nous devons le remobiliser, pour lutter contre le dérèglement climatique, et renforcer le tissu social, en particulier par la santé, l’éducation, et les politiques de solidarité nationale.
La lutte contre le bouleversement climatique ne doit plus faire débat aujourd’hui, : il s’agit tout simplement de mettre en œuvre les principes de la charte de l’environnement, inscrite au Préambule de la Constitution, et la nécessité de « ne pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins ».
Elle ne peut être laissée à l’initiative, ni du seul secteur privé, ni des « petits pas du quotidien » assignés à chaque Française et chaque Français. 
La santé est redevenue un terrain de conquêtes sociales : des services d’urgence ferment faute de bras, 6 millions de Français seraient sans médecin référent, la problématique des déserts médicaux imprègne tous les territoires, le traumatisme des conséquences de l’épidémie de COVID est présent dans tous les esprits, et les risques sanitaires environnementaux sont partout, de l’air que nous respirons à l’alimentation dont nous disposons, en passant par les matériaux de fabrication de nos habitations, nos modes de transport ou nos biens de consommation.
Quant à l’éducation nationale, c’est hélas devenu un poncif que de dire qu’elle est en crise. La progression de l’enseignement privé par rapport à l’enseignement public est un symptôme du manque de confiance des Français envers leur école. 
Qu’il est difficile de pouvoir en croire en l’école comme lieu de lutte contre les déterminismes sociaux !
Les Lycées professionnels souffrent, et sont concurrencés par les organismes de formation privés ; la formation professionnelle doit-elle être déléguée aux corporations ? 
Nous devons rappeler, inlassablement, que le rôle de l’Education nationale n’est pas de former simplement des personnes employables ou de futurs (auto)entrepreneurs, mais bel et bien de futurs citoyens dans toutes les dimensions de leur vie future : professionnelle, sociale et familiale.
En matière de solidarité, nous devons de nouveau associer défense du service public et légitimité des dépenses sociales, alors que d’autres moquent et stigmatisent les prétendus « assistés » et « profiteurs ».
Nous ne pouvons pas accepter que 25 à 42 % des salariés éligibles ne sollicitent pas le recours aux assurances-chômages ; que 42 000 enfants soient sans logement fixe ; que 9,2 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté ; que 30 % des Français qui pourraient avoir recours aux prestations sociales ne les sollicitent pas.
La solidarité nationale ne doit être, ni un slogan, ni une réalité du passé.
Nous devons réinvestir les questions sociales, éliminer la question du non-recours ; re-légitimer le bien-fondé de l’existence de l’Etat Providence, non par fétichisme pour la fonction publique, mais parce qu’elle est le bras armé de tout mouvement d’émancipation sociale.
Nous devrions également mener à son terme une vraie réflexion sur les biens communs, et définir une politique de propriété/réappropriation sur ces derniers : eau, déchets, réseaux de communication, infrastructures de transport …
Ces batailles culturelles à mener nécessitent que nous redevenions des militants. Pour re)conquérir le pouvoir, nous ne pouvons faire l’économie d’une réflexion sur l’exercice du militantisme et la mise en œuvre du politique.

Un parti militant – militantisme et exercice du pouvoir


1. Militer aujourd’hui : communiquer, informer, former

Les « nouveaux » outils de communication ont bouleversé notre vie militante, et force est de constater que notre parti, comme d’autres, a eu bien du mal à faire face à leur développement.
Avant-gardiste parfois, avec la Coopol en 2010 par exemple, il n’a jamais réussi à déployer de réelle stratégie d’utilisation des nouveaux outils pour faire le lien avec ses adhérents dans ce qui fait pourtant la base de la vie militante : rassembler, former, informer, convaincre.
Nous sommes confrontés à un contexte d’embolie informationnelle d’une part, et d’autre part, surtout depuis l’apparition de la Covid, à de profonds bouleversements des modalités d’organisation des différentes sphères, professionnelle, associative ou privée.
De ce fait, il est parfois difficile de suivre et surtout hiérarchiser les prises de positions des uns et des autres, sur les différents canaux ouverts ; un effort particulier doit donc être entrepris, ce qui est valable pour l’ensemble de la population comme pour nos militants, sur la hiérarchie des positions prises, et sur leur contextualisation, afin de rendre plus accessible et évident ce qui relève de nos « fondamentaux ».
Il nous faut par ailleurs mieux articuler les différentes échelles. Le long terme doit guider le court terme. Le court terme servir le long terme. Le local nourrir le national, et vice-versa.
Choisir les bons mots, et contester les mots de l’adversaire, sont des exercices que nous avons trop négligés. L’accaparement de la « valeur travail » par la droite en est un exemple, celui de la laïcité par l’extrême-droite un autre.
Une réflexion est nécessaire sur l’adaptation en temps réel aux nouveaux supports ; à titre d’exemple, le développement rapide de comptes d’extrême-droite sur Tik Tok, sans contre-feu, est préoccupant en ce qu’il fait de cette plateforme un outil de bataille culturelle à destination des plus jeunes.
Enfin, la dépendance aux algorithmes sur les réseaux sociaux est devenu un frein à la bonne circulation des messages ; une nouvelle stratégie est nécessaire, d’une part pour outiller les fédérations et les sections dans leurs missions de mise en réseau des militants, d’autre part pour élargir le cercle du public au-delà des « convaincus ».
Le secteur de la formation doit être parallèlement renforcé, s’ouvrir à nouveau à nos partenaires, et au-delà. Des modèles peuvent nous inspirer : les modèles de vidéos courtes à visée didactique à destination des Lycéens ou des étudiants par exemple, sur les grands dossiers d’actualité.  

2. Ethique du pouvoir

Notre crédibilité dépend de ce que nous disons ; elle dépend également de ce que nous montrons.
La désaffection ou le désamour envers le politique, nos défaillances parfois, nous contraignent à la plus grande humilité dans notre manière d’être.
Cela impose bien évidemment de rester vigilants face aux cas éventuels de violences réelle et symbolique au sein du parti et une plus grande attention aux questions de diversité et de renouvellement.
Cela nous impose aussi de revenir et nous plier à une certaine éthique de la parole et de retrouver une morale interne simple : ne débattre des affaires du parti qu’au sein du parti, observer un certain devoir de réserve dans les médias sur ce qui ne mérite pas d’être exposé sur la place publique, et ne pas prendre le risque, par des paroles inopportunes à l’encontre de camarades, de déconsidérer notre action collective.
La culture du « clash » et du « bashing » abime à la fois celles et ceux qui y succombent et dégrade la politique ; la nécessité de restaurer notre crédibilité nous impose de ne pas y succomber. 
A nous de faire valoir notre droit au silence : face aux polémiques stériles, si nous avons le droit de nous exprimer, nous avons aussi le droit de nous taire.
Pour terminer sur l’éthique, faut-il préciser que ces quelques principes, à compléter, doivent se décliner à tous les échelons politiques ?


Au final donc, la volonté de nous inscrire dans une logique de (re)conquête du pouvoir et la demande de nos concitoyens nous conduisent, nous, socialistes du Pas-de-Calais, à exprimer cet appel à revenir à nos fondamentaux pour justifier des choix que nous opérerons, tant dans les thématiques que nous portons – travail et pouvoir d’achat, services publics, justice sociale et environnementale – que dans la manière de les porter – éthique politique et travail militant.
Nous invitons nos camarades à saisir les préoccupations affirmées des Français en matière de pouvoir d’achat, d’accès aux services publics, de climat, pour nous réinscrire dans les grands récits, du Front Populaire, de 1981, de 1997, ainsi que les grandes utopies. 
Et, surtout, pour les incarner dans un projet de société susceptibles de toucher le cœur de la gauche, qui bat encore, et celui des Français.

 
Signataires : Thierry COULOMBEL, SF à la communication et aux argumentaires - Saint-Omer

Laurent DUPORGE, 1er Secrétaire Fédéral du Pas-de-Calais, Maire de Liévin, VP CD 62
Aymerik LEMAIRE, Animateur Fédéral des Jeunes Socialistes du Pas-de-Calais
Samira LAAL, Secrétaire nationale, Hénin-Beaumont
Serge MARCELLAK, Maire, Noeux-les-Mines
Blandine DRAIN, Conseillère départementale, Conseil National, Hucqueliers
François EMMERLINCK, Montreuil et environs
Ahmed MIRAOUI, Saint-Omer
Samia SADOUNE, Liévin
Francis CLERDAN, Helfaut
Jérôme DARRAS, Liévin
Nicolas DUSAUTOIS, Ardres

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