Jean-Michel Blanquer, la laïcité et les enseignants : une nouvelle provocation.

- Mercredi 26 octobre 2021

Yannick Trigance
Conseiller régional Île-de-France
Secrétaire national à l’École, à l'Éducation et à l'Accès aux savoirs

 

Si le caractère autoritariste et injonctif de la gouvernance du ministre BLANQUER prêtait encore à quelques doutes, ils ont bel et bien été levés à l’occasion de la première journée de formation à la laïcité organisée par le ministre le 19 octobre dernier.

Au cours de cette journée, une conception de la laïcité particulièrement excluante, à l’opposé de la culture professionnelle des enseignants, a été présentée par le ministre BLANQUER sous forme d’une alternative très explicite : « adhérer aux valeurs de la République et les transmettre » ou bien alors « sortir de ce métier ».

Le ministre jette ainsi la suspicion sur les enseignants, contribuant une nouvelle fois à remettre en cause leur loyauté, leur légitimité et leur professionnalisme dans une période où, plus que jamais, ils ont besoin d’être soutenus, accompagnés et reconnus au plus haut niveau de leur hiérarchie mais également dans l’opinion publique.

Le ministre BLANQUER impose une conception de la laïcité du soupçon, à rebours de la conception traditionnelle de la laïcité qui s'est installée dans l’École – fondée sur le développement du sens critique, sur l’éducation à la liberté de conscience et à la liberté d’expression.

Il va de soi que cette conception de la laïcité vient percuter la culture professionnelle des enseignants qui, au quotidien, s’attachent à mettre en œuvre une pédagogie des valeurs de la République reposant en grande partie sur l’idée que ces valeurs sont d’autant plus partagées et respectées qu’elles sont d’abord et avant tout vécues et non assénées.

Et si une laïcité bien comprise est une laïcité bien transmise, on rappellera que le ministre BLANQUER a supprimé en 2018 la formation des enseignants sur la laïcité mise en place en 2015 par la ministre de l’Éducation nationale de l’époque Najat VALLAUD-BELKACEM.

Contrairement aux insinuations du ministre, les enseignants n’ont aucun problème avec les valeurs de la République qu’ils transmettent conformément aux programmes. En revanche, en ce qui le concerne, Jean-Michel BLANQUER porte une conception pour le moins ambigüe, voire partiale, de la laïcité.

Financement d’établissements privés sur des fonds publics dédiés à l’éducation prioritaire – alors que les établissements privés ne sont pas soumis à l’obligation d’accueil –, prise en charge par les communes des frais de fonctionnement des écoles maternelles privées au même titre que celles du public avec la loi rendant obligatoire la scolarisation en maternelle, augmentation du budget 2022 de l’enseignement privé bien supérieure à celle de l’enseignement public, campagne de communication sur la laïcité au moyen d’affiches particulièrement stigmatisantes et contre-productives : autant d’actes politiques qui placent définitivement le ministre dans le camp d’une laïcité instrumentalisée, partisane et contraire à notre pacte républicain.

Afin de garantir la liberté et l’égalité, la laïcité implique deux moyens : la séparation et la neutralité. Le ministre BLANQUER s’est affranchi des deux.


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