Léon Blum en BD 5

En 1938, après le décès de sa seconde épouse, Blum se rapproche de Jeanne Levily, qu’il connaît depuis de nombreuses années. Une véritable relation passionnelle se noue et Jeanne l’accompagnera jusqu’au bout dans les moments difficiles qui s’annoncent.

En septembre 1938, alors que l’Europe connaît une montée des périls après qu’Hitler ait mis la main sur l’Autriche et manifesté l’intention d’en faire autant avec la Tchécoslovaquie, les Accords de Munich, signés entre l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l'Italie laissent croire que l’objectif est d’éviter la guerre. Blum, qui préside alors le groupe SFIO à la Chambre des députés, et qui continue à s’exprimer dans les colonnes du Populaire, exprime, une fois de plus une pensée visionnaire : « La guerre est probablement écartée. [...] Je n'en puis éprouver de joie et que je me sens partagé entre un lâche soulagement et la honte ».

Un an plus tard, c’est la guerre.

Lucide, y compris à cause de la nature viscéralement antisémite du nazisme – Blum a lui-même été agressé par des nervis d’extrême droite, insulté par des députés de droite à l’Assemblée et fait l’objet d’appels au meurtre dans la presse monarchiste -, il considère que la France doit se préparer militairement à se défendre. Il s’oppose alors à la tendance majoritaire pacifiste de la SFIO, craignant de voir la France envahie. Les faits lui donnent raison : les tergiversations de l’Etat-major de ce qui est alors considéré comme la première armée d’Europe, facilitent le Biltzkrieg et la débâcle, en mai-juin 1940.

Léon Blum apprend avec stupeur la capitulation du Maréchal Pétain. Le vainqueur de Verdun est devenu une figure de l’extrême droite avant de conduire la Collaboration.

Blum fera partie des 80 députés qui refusent les pleins pouvoirs à Pétain, malgré les menaces de Laval.

Le régime de Vichy, voulant juger ceux qui sont, à ses yeux les responsables politiques de la guerre, en clair les acteurs au pouvoir depuis le Front populaire, afin de dédouaner l’armée. Blum se réfugie chez son ami Eugène Montel, une figure de la SFIO audoise qui a aidé les Républicains espagnols, et se voit offrir l’asile aux Etats-Unis par Roosevelt, ce qu’il refuse pour résister au gouvernement de Vichy auprès de nombreux autres socialistes, dont Jules Moch, Vincent Auriol et Daniel Mayer. Le 15 septembre 1940, il est arrêté, en dépit de son immunité parlementaire, et emprisonné dans le Puy-de-Dôme, dans l’attente du procès de Riom, du 19 février au 15 avril 1942.

Blum et Dalladier seront jugés en même temps, accusés de ne pas avoir préparé la France à l’arrivée d’une guerre, lorsqu’ils étaient au gouvernement. Leur défense, pleine de courage, et particulièrement efficace, restera dans les mémoires : ils parviendront à démontrer non seulement que les charges portées contre eux ne sont pas valables, que le procès n’était pas en règle, mais aussi que la déroute militaire est due aux carences du Haut commandement militaire, alors sous la direction de Pétain en tant que ministre de la Guerre, après le 6 février 34, de triste mémoire. En revanche, ils démontreront que le Front Populaire a fourni le plus gros effort de guerre depuis 1918, tandis que les gouvernements qui l’ont suivi n’ont eu de cesse de le diminuer. Le procès, très suivi, retournera l’opinion publique, malgré la censure et il marquera un tel échec qu’Hitler lui-même demandera à Pétain de tout cesser.

Blum est finalement déporté comme « otage d’Etat » en 1943, près du camp de concentration de Buchenwald. Si ses conditions de détention, n’ont rien à voir avec celles des prisonniers du camp – il peut épouser Jeanne Levylier –, il est prisonnier des nazis qui assassinent son frère à Auschwitz après l’avoir torturé.

Libéré fin avril 1945, Blum témoigne alors au procès du Maréchal Pétain où il dénonce notamment les menaces qui ont précédé son arrestation, lors du vote de l’Assemblée pour les pleins-pouvoirs à Pétain : « J'ai vu là pendant deux jours des hommes s'altérer, se corrompre comme à vue d’œil, comme si on les avait plongés dans un bain toxique. Ce qui agissait, c'était la peur [...] Et le bruit qu'on faisait courir, [...] c'est : « Ceux qui ne voteront pas ne coucheront pas dans leur lit ce soir... »

Le général de Gaulle lui propose un poste au gouvernement, ce que Blum refuse par cohérence politique, préférant reprendre son poste d’éditorialiste au Populaire. Il prend alors une part active à la constitution de l’Unesco.

Il accepte, à la demande de Vincent Auriol, en décembre 1946, de diriger le gouvernement provisoire dit « de la Saint-Sylvestre » premier gouvernement uniquement composé de socialistes et dans lequel Andrée Vienot succédant indirectement à Léo Lagrange, assure les fonctions de sous secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports. Ce gouvernement scelle le Traité d’alliance franco-britannique de Dunkerque, qui ouvre la voie à une des premières stratégies communes européennes.

La même année se tient un important congrès du Parti, à Paris. Daniel Mayer qui a reconstruit le parti dans la clandestinité durant la guerre est mis en minorité par Guy Mollet qui reproche à la majorité sortante, à laquelle appartient Blum, de vouloir abandonner le marxisme pour un socialisme plus humaniste. Blum prononce dans son discours une formule qui résume bien l’enjeu qui demeurera encore longtemps chez beaucoup de socialistes : « Je crois que, dans son ensemble, le Parti a peur. Il a peur des communistes. Il a peur du qu'en-dira-t-on communiste. C'est avec anxiété que vous vous demandez à tout instant : “Mais que feront les communistes ? Et si les communistes ne votaient pas comme nous ?...” La polémique communiste, le dénigrement communiste, agissent sur vous, vous gagnent à votre insu et vous désagrègent.

Vous avez peur des électeurs, peur des camarades qui vous désigneront ou ne vous désigneront pas comme candidats, peur de l'opinion, peur de l'échec. Et s'il y a eu altération de la doctrine, déviation, affaissement, ils sont là, ils sont dans la façon timorée, hésitante dont notre doctrine a été présentée dans les programmes électoraux, dans la propagande électorale. »

Après une longue et riche carrière, Léon Blum décide de se retirer dans sa maison de Jouy-en-Josas, dans les Yvelines. En 1950, il s’éteint dans cette même maison, victime d’un infarctus, alors âgé de 77 ans.

Lors de ses obsèques, son éloge funèbre est prononcé par le Président Auriol, Daniel Mayer, Guy Mollet, alors secrétaire général du PS-SFIO, et le socialiste belge, Louis de Brouckère.

Un kibboutz, en Israël, porte le nom de Blum et il fut soutenu dans ses années de lutte par le couple Roosevelt.

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