Thème : Culture
La notion de droits culturels, réaffirmée dans les lois de la République, était déjà présente dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. C’est dire son importance, ainsi que la nécessité d’un élan pour remettre l’équité territoriale et sociale au cœur des politiques culturelles. Celles-ci doivent davantage impliquer les citoyens, être construites à partir des besoins et non plus seulement sur le principe de l’offre culturelle.
Notre projet promeut la culture dans toutes ses diversités. Au sens le plus large, elle désigne toute production des sociétés humaines, et une politique culturelle doit tenir compte, au-delà des arts, d’autres pans de la culture comme les langues régionales, la culture scientifique et technique, les artisanats…
Enfin, la culture est un outil d’émancipation de l’individu aussi bien qu’un instrument du vivre-ensemble. L’impact de la culture devra être considéré en termes de qualité de vie et de lien social, au moins autant qu’au regard de l’économie, de l’attractivité et de l’emploi.
« La politique culturelle doit être une politique de réappropriation des techniques et des capacités de partage, d’écoute, de regard. » Bernard Stiegler
ÉDUQUER AUX ARTS ET À LA CULTURE TOUT AU LONG DE LA VIE
Systématiser les dispositifs de résidence artistique dans les établissements de l’Éducation nationale, en favorisant les acteurs de proximité car, si l’histoire de l’art et l’éducation artistique sont inclus dans les programmes scolaires, rien ne remplace le contact direct avec des œuvres et des artistes.
Créer une association culturelle et artistique (ACA) dans chaque établissement scolaire, regroupant élèves, parents, enseignants et acteurs du monde culturel, afin d’organiser et coordonner les actions culturelles et artistiques dans le cadre du parcours d’éducation artistique et culturelle.
Développer des contenus dans tous les champs de la culture, dans une perspective d’éducation populaire (culture artistique mais aussi scientifique, économique…).
Déritualiser les pratiques culturelles, pour favoriser l’accès aux pratiques culturelles jugées élitistes, les faire sortir de leurs lieux habituels, et organiser des manifestations conviviales associées à des lieux de débats transdisciplinaires.
Dans le même but, promouvoir les résidences d’artistes et de compagnies, qui favorisent un contact entre artistes et citoyens sur le temps long.
Favoriser le sous-titrage des fictions au lieu de leur doublage systématique, afin de favoriser la familiarisation avec les langues étrangères et ainsi l’approche des trésors culturels qu’elles recèlent.
« 93 % des Français ne vont jamais au concert classique, 96 % ne vont jamais à l’opéra, 84 % ne vont jamais au concert rock et 81 % ne vont jamais au théâtre. » Pratiques culturelles, 1973-2008. Dynamiques générationnelles et pesanteurs sociales, Olivier Donnat, Culture études, ministère de la Culture, 2011
ASSURER UNE ÉQUITÉ TERRITORIALE ET SOCIALE EN MATIÈRE DE CULTURES
Maillage territorial - Pour que la culture devienne accessible aux populations aujourd’hui exclues de toute pratique artistique et culturelle et pour que tous les territoires disposent d’équipements adaptés :
• En commençant par les quartiers et territoires défavorisés, relancer les maisons de quartiers, maisons de la culture urbaine, lieux d’accueil et d’éducation populaire ou créer des fabriques culturelles de proximité, outils de création ouverts aux professionnels comme aux pratiques amateurs, aux débats, aux actions d’éducation populaire, et gérés de façon participative
• Créer des Conseils de promotion des cultures locales, qui œuvreront à la fois à promouvoir et soutenir les pratiques culturelles locales, à organiser des échanges culturels, à coordonner des programmes culturels et éducatifs et à dispenser des formations. L’objectif sera de définir une stratégie culturelle de territoire fédérant les différentes pratiques et les différents acteurs
« La promotion des régions s’accorde fort bien avec la construction d’une Europe soucieuse de faire craquer le corset des États-Nations, qui en empêche l’épanouissement. Mais, à valoriser à l’excès ces subdivisions et leurs singularités, ne risque-t-on pas de les amputer de ce qui fonde historiquement leur originalité : leur constante intrication et complémentarité avec la culture nationale qui les subsume ? » Christian Bromberger et Mireille Meyer, Ethnologie française, 2003 https://www.cairn.info/revue- ethnologie-francaise-2003-3-page-357.htm
• Donner les moyens de mettre en valeur le patrimoine industriel ou artisanal ainsi que l’histoire sociale locale, et de développer l’enseignement des langues régionales
• Encourager fiscalement le mécénat culturel local
• Développer l’accès aux fonds européens régionaux pour les projets artistiques et culturels. Favoriser l’accès à ces fonds pour les très petites organisations du champ artistique et culturel
• Implanter de grands équipements culturels de rayonnement intercommunal, régional et national dans les banlieues. Il est symbolique de remettre la culture au cœur de ces quartiers
• Poursuivre la décentralisation culturelle en implantant des équipements d’envergure nationale dans des villes de taille moyenne, sur tout le territoire
En 2008, deux Parisiens sur trois ont visité au moins une fois un musée, tandis que dans les communes de moins de 100 000 habitants, ce sont trois Français sur quatre qui n’ont jamais visité un musée. Données officielles du ministère de la Culture : https://data.culturecommunication.gouv.fr/explore/dataset/pcf-evolution/table/
• Développer un réseau interconnecté de médiathèques en zones rurales et donner à ces structures les moyens d’étendre leurs horaires d’ouverture, partout sur le territoire
• Intégrer les propositions artistiques dans les lieux de vie et de sociabilité, dans l’espace public, les lieux de patrimoine, etc. Diversité et décloisonnement des formes d’expression culturelle. Rêvée rassembleuse, la culture est aujourd’hui fragmentée en catégories dont les artistes et les publics se rencontrent peu. Comment faire culture commune ?
• Réaffirmer la liberté de création, inscrite dans la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, car les subventions ne doivent pas dépendre d’un listing de critères à remplir, mais doivent oser accompagner l’émergence, l’innovation, ainsi que la diversité. En compléter le principe par des garanties de diversité pour la diffusion des œuvres dans les établissements financés par la puissance publique
• Encourager les transversalités et transdisciplinarités entre les arts de la scène : musique, théâtre, danse, arts visuels, cinéma, cirque…
• Créer des rencontres et développer des compagnonnages entre artistes professionnels et amateurs, développer rencontres et master class…
• Soutenir l’émergence de projets innovants, en particulier issus des acteurs culturels de terrain : aides à la création, résidences, bourses, commandes et appels à candidature de premières œuvres ou projets
• Décloisonner les formes d’expression artistique, notamment en créant des ponts entre cultures contemporaines et cultures urbaines, cultures patrimoniales et cultures populaires
• Consacrer une plus grande place aux scènes ouvertes et aux pratiques amateurs
• Lutter contre toutes les censures politiques ou communautaristes visant à imposer une orientation segmentante de la programmation ou l’interdiction d’un spectacle perçu comme présentant un caractère sensible
• Ouvrir les cursus de l’enseignement musical et artistique aux enseignements des instruments traditionnels européens et du monde, aux traditions de l’oralité
• Associer à la création artistique des moments de débat et de réflexion sur les enjeux sociétaux
CONSTRUIRE LA POLITIQUE CULTURELLE AVEC LES CITOYENS
Encourager les initiatives culturelles portées par les citoyens.
Conditionner l’obtention de certaines aides à un travail avec les citoyens.
Faire participer les citoyens au fonctionnement des équipements culturels. Au niveau administratif, des citoyens tirés au sort seront associés à la programmation des lieux publics ou subventionnés, ainsi qu’à leurs orientations stratégiques. Une partie des budgets pourra être participative, comme l’allocation de certaines subventions.
Maintenir et développer les partenariats croisés entre l’État, les collectivités et la société civile afin de distribuer des moyens adaptés à des initiatives non publiques, à des acteurs territorialisés, développant une culture de proximité, proche des lieux de vie et des espaces de sociabilité.
Garantir des relations partenariales co-construites avec les collectivités publiques aux milliers de structures artistiques et culturelles, d’initiative citoyenne et non lucratives, contribuant dans les territoires au bien commun.
Faire la promotion d’une jeunesse inventive en lui offrant des espaces publics de réalisation et de diffusion. Friches industrielles, équipement ou bâti à rénover, immeubles voués à la démolition dans le Plan de renouvellement urbain (PRU), patrimoine de l’État doivent notamment pouvoir être des lieux privilégiés des cultures alternatives et minoritaires, et de leurs expériences.
NOURRIR UNE DIVERSITÉ D’ACTEURS ET D’INSTITUTIONS CULTURELS
Un management culturel plus éthique et transparent
• Interdire le cumul des mandats à tous les postes de direction des établissements publics et instaurer une limite de deux mandats de trois ans dans les structures publiques au cours d’une vie (de façon continue ou discontinue), dans un souci de parité dans tous les domaines : genre, générationnel, domaines artistiques... Ce brassage sera créateur de richesse et d’équilibre
• Plafonner la rémunération de ces postes de direction, instaurer la transparence sur les rémunérations et sur les budgets de fonctionnement des structures publiques
• Mettre fin à l’intrusion de la finance dans les conseils d’administration des grands établissements culturels. Lui substituer une nouvelle gouvernance qui renforcera le rôle des représentants des employés et associera des représentants des publics
• Décarboner la culture en rendant les établissements culturels progressivement moins dépendants d’industriels des énergies fossiles ou de groupes dont les agissements nuisent à l’environnement
• Favoriser l’égalité femmes-hommes dans la culture : résorber les inégalités d’accès aux résidences et aux financements, promouvoir la parité des directions nommées par l’État, viser la parité aussi en termes d’acquisitions d’œuvres et de programmation
Un statut de l’artiste simplifié
• Reconnaître le statut d’artiste lors des interventions d’éducation artistique et d’action culturelle, et considérer ces activités comme un acte artistique, consubstantiel et corollaire de la création. Exiger la reconnaissance juridique par les organismes sociaux de l’activité protéiforme de l’artiste et prendre en compte les heures d’intermittence sans distinction de nature de l’intervention
• Étendre ce régime aux professions artistiques précaires, dont les artistes visuels
• Défendre les revenus des créateurs, les droits des auteurs et des interprètes : incitations fiscales, contribution des fournisseurs d’accès à Internet, arbitrages, régulations…
Une diversité d’organisations
• Mieux prendre en compte la diversité des initiatives et reconnaître la pluralité des modèles organisationnels et économiques
• Promouvoir de nouvelles organisations économiques des activités culturelles (groupements d’employeurs, entrepreneuriat social et coopératif…) et les réseaux interprofessionnels
FAVORISER L’INDÉPENDANCE ET LE PLURALISME DES MÉDIAS
Limiter la concentration des médias : aucun groupe ne pourra être actionnaire majoritaire d’un média (presse écrite, radio, TV ou pure player) ; un même groupe actionnaire de plus de deux médias ne pourra pas non plus dépasser le seuil de 20 % des parts de chacun d’entre eux.
Obliger les médias à mettre en évidence sur leurs contenus le nom de leurs propriétaires, afin que les citoyens puissent s’informer en connaissance de cause.
Organiser l’élection par les usagers des membres de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), chargé de réguler et de contrôler les médias.
Réformer les aides à la presse afin que les subventions dépendent majoritairement de la proportion du budget qui provient des usagers : abonnements individuels et vente au numéro.
OUVRIR LA CULTURE SUR LE MONDE
Investir dans la coopération et la diplomatie culturelle, en enrayant la baisse des moyens alloués au réseau des instituts français, en faisant la promotion des créations françaises, et en animant les réseaux de la francophonie.
Restituer aux États qui en font la demande les pièces de patrimoine culturel qui leur ont été subtilisées, notamment lors de la colonisation. Ce processus sera l’occasion de mettre en place ou de renforcer des actions de coopération culturelle.
Encourager la mise en réseau des acteurs culturels à l’échelle européenne et internationale et favoriser le multilinguisme : aide à la circulation, à la traduction des œuvres…
GARANTIR UN FINANCEMENT PLUS JUSTE DE LA CULTURE
Considérer et évaluer la culture au vu de ses impacts sur la qualité de vie, l’émancipation des individus et le lien social, et pas seulement de ceux sur l’économie, l’attractivité et l’emploi.
Instaurer des montants planchers et plafonds pour les subventions afin d’éviter d’un côté l’effet saupoudrage, et de l’autre une trop grande disparité entre structures ou projets.
Réformer le 1 % artistique, c’est-à-dire l’obligation de décoration des constructions publiques, qui conduit parfois à des aberrations. Ce 1 % servira à financer des initiatives culturelles locales.
Négocier à Bruxelles pour la mise en place d’une fiscalité européenne visant à mettre à contribution les « géants du numérique » (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, Twitter, LinkedIn… mais aussi Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi, etc.) pour cofinancer l’accès à la culture.
Instaurer une contribution des fournisseurs d’accès à internet (FAI) et des fabricants d’appareils connectés au développement de la culture.
Premier signataire Mathieu GITTON secrétaire de section de Belgique