Le Parti socialiste soutient la mobilisation générale du monde de la justice : un an après « l'appel des 3 000 », rien n'a changé

– Mardi 22 novembre 2022

Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste

Gulsen Yildirim, secrétaire nationale en charge de la Justice

Il y a tout juste un an, le monde de la Justice connaissait un mouvement sans précédent qui témoigne de la profondeur du malaise qui y règne. « L’appel des 3 000 », signé par près de 6 000 magistrats sur les 9 000 que compte la France et plus de 1 200 greffiers dénonçait une justice « qui raisonne uniquement en chiffres, qui chronomètre et comptabilise tout ». Ce mouvement avait été soutenu par l’ensemble des organisations professionnelles et syndicales des magistrats, greffiers, avocats et même des juges administratifs.

Le rapport du comité des États généraux de la Justice présidé par Jean-Marc Sauvé, remis au président de la République en juin dernier, dresse le même constat d’une crise profonde de la justice qui « ne parvient plus à exercer ses missions dans des conditions satisfaisantes ». Il relève un « sentiment de désespoir » face au manque de moyens humains et matériels et des délais de jugement qui « n’ont cessé de s’allonger ».

Un an après, rien n’a changé. La souffrance des magistrats et greffiers et le désarroi du monde judiciaire demeurent face à des audiences surchargées, des arrêts maladie qui se multiplient, l’obligation de traiter des affaires « en quinze minutes » sans pouvoir donner la parole aux parties ou encore des décisions exécutées plusieurs mois, voire plusieurs années, après leur jugement.

Le dernier rapport de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ), publié au mois d’octobre 2022, confirme à nouveau le manque criant de moyens, notamment humains, de la Justice en France. Notre pays compte toujours 11,16 juges professionnels et 3,19 procureurs pour 100 000 habitants alors que la médiane européenne est respectivement de 17,60 juges et 11,10 pour le ministère public.

Pourtant, du côté du Gouvernement, les annonces et les coups de communication se succèdent. Le ministre de la Justice s’auto-satisfait en clamant qu’il a enfin « donné à la justice les moyens de travailler ». Dans le même temps, la presse révèle l’existence d’une dépêche interministérielle demandant aux procureurs de la République de veiller à « la réduction du nombre d’affaires en cours dans les services d’enquête », afin de « poursuivre la résorption des stocks de procédures ». Autrement dit, il est demandé aux procureurs d’accélérer le classement sans suite de nombreuses plaintes pour désengorger les commissariats et services d’enquêtes. C’est donc une réponse expéditive qui est apportée au détriment des victimes en attente de réponse pénale.

Le ministère oppose même une fin de non-recevoir à la demande de l’ensemble des organisations syndicales d’une expertise sur le risque grave auquel sont exposés les personnels.

Si des recrutements de magistrats et de fonctionnaires de greffe sont prévus pour 2023, ils sont largement insuffisants et aucun plan d’action clair n’a été défini comme l’exigerait l’urgence de la situation. De plus, l'effort budgétaire annoncé par le Garde des sceaux doit être relativisé. Avec une inflation qui dépasse aujourd’hui les 6 %, l’augmentation du budget de la justice pour 2023 ne sera pas de 7,8 % mais de 2 %...

Pour le Parti socialiste, la situation exige l’adoption d’une grande loi de programmation comportant des recrutements massifs de magistrats et fonctionnaires de greffe pour se rapprocher des chiffres de nos voisins européens. Le rapport Sauvé préconisait d’ailleurs le recrutement d’« au moins 1 500 magistrats supplémentaires au cours des cinq prochaines années »

Si la hausse des moyens est indispensable, elle devra s’accompagner de mesures fortes pour rendre la justice pleinement indépendante, d’une réflexion approfondie sur le fonctionnement des juridictions et surtout d’une revalorisation de la justice civile, jugée aujourd’hui trop lente.

Devant l’absence de réponse concrète du gouvernement aux demandes des professionnels de la justice et face à l’urgence de la situation, le Parti socialiste soutient la mobilisation intersyndicale et interprofessionnelle du 22 novembre pour la défense d’une justice rendue dans des conditions dignes.

 

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