Militantes et militants de l’Europe


Thème : Europe


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« La France est notre patrie, l’Europe est notre avenir. » (François MITTERRAND)

« Nous, socialistes, sommes européens de cœur et de raison » (texte d’orientation pour les élections européennes de 2019)

 Et pourtant…

Et pourtant, militantes et militants du Parti socialiste, rebutés par la complexité du fonctionnement communautaire, et par la faible visibilité locale de ses réalisations, se sentent peu concernés par ce qu’ils considèrent être une affaire de spécialistes,

Et pourtant, militantes et militants ont peu entendu parler du PSE (Parti socialiste européen) et sont rarement impliqués dans ses travaux ou dans les manifestations qu’il organise,

Et pourtant, militantes et militants ne sont qu’exceptionnellement appelés, par leurs sections, à se mobiliser sur des enjeux européens à l’exception, une fois tous les 5 ans, des élections au Parlement européen,

Et si nos militantes et nos militants se sentent peu concernés, comment notre parti pourra-t-il, convaincre et ramener aux urnes les abstentionnistes sur les enjeux européens ?

Rapprocher l’Europe du cœur des militantes et des militants, telle est l’ambition de cette contribution qui propose un ensemble d’initiatives concrètes à différents niveaux.

*

Faire vivre une réelle entité politique socialiste et sociale-démocrate au niveau européen

 Au congrès de Berlin des 14 et 15 octobre 2022, Stefan Löfven a remplacé Sergueï Stanishev comme Président du Parti Socialiste Européen (PSE). Une nouvelle équipe paritaire de Vice-Présidents a aussi été élue. Grâce notamment à des amendements du PS, la contribution adoptée ouvre la porte à des réformes ambitieuses (taxation des super profits, abandon de l’unanimité dans certains domaines, révision possible des traités à l’issue d’une Convention d’analyse des propositions citoyennes faites lors de la Conférence sur le Futur de l’Europe, rôle accru du Parlement européen, …).

Par ailleurs, autour du PSE existent un réseau d’activistes, un réseau de jeunes (YES – Young European Socialists), une organisation dédiée au droit des femmes et à l’égalité femme – homme (PES Women), une organisation pour les seniors (ESO European Senior Organisation) ainsi qu’une fondation politique (FEPS, Foundation for European Progressive Studies). Pour être pleinement efficaces, ces structures doivent interagir beaucoup plus fortement avec les partis socialistes et sociaux-démocrates nationaux.

Sans nier les différences d’approche nationales, ni méconnaitre les difficultés de mise en place d’une structure politique supranationale, nous devons faire en sorte que le PSE :

  • Adopte un fonctionnement plus transparent,

  • Reflète la transformation de la famille politique sociale-démocrate européenne, ses nouveaux combats et se renouvelle comme l’ont fait au plan national de nombreux partis adhérents,

  • S’organise pour permettre aux partis membres, qui le désirent, de consulter leurs militants sur les textes fondamentaux qu’il adopte et consulte plus régulièrement l'ensemble des élus locaux et régionaux qui sont ses relais dans les territoires de l'Union.

  • S’empare de quelques sujets clés sur lesquels il devienne un interlocuteur politique reconnu, au niveau européen, des forces syndicales, associatives, culturelles, des ONG et des entités de la société civile.

  • Engage au niveau européen des consultations avec les autres forces politiques de gauche et écologistes.

  • Lance sans délais le projet politique, le « manifesto » pour les élections européennes de 2024

Pour aider le PSE à se réformer, le Parti socialiste français doit poursuivre le travail d’influence engagé au sein du PSE et s’organiser en interne pour dégager des moyens suffisants pour impulser et suivre ce chantier. La présence active au sein de YES et de PES women sont des atouts à conforter.

Pour les élections européennes de juin 2024 nous avons défendu l’idée de listes transnationales. Si cela n’était pas institué pour 2024 alors nous souhaiterions des échanges de candidat.e.s entre les listes nationales et l’accueil sur la liste française de camarades issus d’autres Etats-membres.

 

Rendre le PSE et les partis membres, visibles et attractifs pour les militants

Nous recommandons que soient désignés à tous les niveaux du parti des référentes et référents PSE. Ce ou ces camarades constitueront, de façon permanente, l’interface avec le PSE. Ils pourront être saisis ou consultés par les fédérations et les sections.

Le parti socialiste doit inciter ses militants à devenir militants du PSE, mettre en valeur les événements qu’il organise, par exemple ceux des Citygroups, les colloques de la FEPS, et travailler à en susciter de nouveaux. Le PSE et les groupes socialistes des institutions européennes encouragent, financent et valorisent fortement ces initiatives, il nous appartient donc de nous en saisir pour animer nos fédérations et nos territoires. 

Vivre l’Europe, c’est aussi connaître des militants de partis frères et pouvoir dialoguer avec eux. Plusieurs fédérations ont des jumelages avec leurs pairs d’autres pays européens. Nous recommandons aux sections situées dans des villes possédant des jumelages officiels actifs, d’entrer en contact avec les sections des partis socialistes des villes jumelles. Les départements et régions gouvernés par la gauche pourraient proposer des regroupements de jumelages afin de leur donner une taille critique qui leur permette de dépasser le simple voyage annuel de rencontre.

De même que nous disposons d’une fédération française de l’étranger et de sections PS dans diverses villes du monde, les partis affiliés au PSE, et notamment le PSOE, le SPD, le Parti démocrate italien et le Parti socialiste portugais ont des sections dans plusieurs villes de France. Non seulement, leurs militants peuvent agir à nos côtés dans des activités et des combats locaux, mais des réflexions communes sur des sujets européens enrichiront notre vision et contribueront à une approche commune des partis représentés. Maintenir, renforcer ou créer des liens avec les entités françaises du Labour ne doit pas non plus être négligé. 

Certains articles ou newsletters du PSE pourraient aussi être traduits en français et diffusés par le parti. Nous proposons également de monter une plateforme de traduction pour mettre à disposition des militantes et des militants les débats politiques qui traversent l’Europe et les publications de la famille socialiste et sociale-démocrate.

 

Pour le parti socialiste, rendre visible L’Europe socialiste et sociale-démocrate

 Aujourd’hui, ceux qui veulent s’informer ou agir sur les problématiques européennes le peuvent. La lettre publiée chaque semaine par la délégation française au Parlement européen est excellente. Il existe des kits de formation, certaines fédérations ont des jumelages ou participent à des actions transfrontières.

Nous devons commencer par valoriser et amplifier ce qui existe :

  • La ou le secrétaire fédéral Europe au niveau de chaque fédération,

  • L’existence d’une Commission Europe dans chaque fédération ouverte à l’ensemble des militantes et des militants et focalisée sur les problématiques européennes,

  • Un « réseau Europe », constitué autour du secrétaire national à l’Europe, ouvert aux militant.e.s, qui fait circuler l’information, facilite l’échange de bonnes pratiques entre les différentes fédérations, propose des outils ou des actions nationales et participe à la définition des orientations européennes du parti,

  • La grande disponibilité des membres de la délégation française au Parlement européen et des membres du Comité européen des régions pour intervenir dans les sections ou les fédérations.

Mais se limiter à des structures et des canaux de communication dédiés Europe, contribue à laisser penser que les questions européennes sont affaire de spécialistes et donc à les exclure des préoccupations fondamentales des militantes et des militants.

Or, nous devons insuffler l’angle européen dans tous les travaux menés par le PS. La prise en compte des politiques européennes, de leurs perspectives, des combats menés à Bruxelles, s’imbriquent totalement avec nos actions nationales. Par exemple, nous avons dénoncé la renationalisation de la PAC qui revient à créer une concurrence néfaste entre les Etats-membres. Les politiques mises en œuvre par nos partis frères peuvent être source d’inspiration (par exemple la loi espagnole accordant la présomption de salariat aux travailleurs des plateformes).

Pour que le militantisme européen vive au sein du PS, il faut beaucoup plus intimement arrimer l’Europe au fonctionnement interne du parti. C’est une des conditions indispensables pour le succès dans les élections européennes de 2024.

Nous souhaitons tout d’abord mettre en réseau les élu·e·s Europe des régions et des villes avec les membres français du Comité européen des régions et mieux relayer les événements qu’il organise.

Nous demandons à ce que les moyens de communication du parti (newsletter, réseaux sociaux, interviews, …) accordent une place plus importante aux sujets européens. Ceci doit passer par plusieurs types d’actions :

  • Sensibiliser sur la situation dans d’autres pays européens :

    • Relayer –fortement- certaines campagnes nationales de partis frères (par exemple sur l’avortement ou les droits LGBT en Pologne)

    • Informer sur les élections qui se déroulent dans les pays européens. Tout n’a évidemment pas la même importance mais il est impossible de se désintéresser de scrutins aussi clefs pour la gauche européenne que les récentes –et inquiétantes- élections législatives en Suède et en Italie.

  • Aménager, dans nos outils numériques, une section européenne ouverte aux militants des autres partis du PSE.

  • Replacer, lorsque c’est possible et pertinent, les luttes en France dans le contexte européen (taxation des superprofits, statut des travailleurs des plateformes où l’avancée proposée par la directive européenne est bloquée par l’actuel gouvernement français, …),

  • Mettre en valeur les initiatives « européennes » des sections et des fédérations et leurs retours d’expérience,

  • Éditer et mettre en ligne un guide de ressources pour l’organisation d’évènements européens dans les fédérations afin de faciliter et d’encourager des moments de débats militants autour des grands enjeux européens.

Enfin, le parti aurait avantage à accueillir au sein de l'équipe permanente nationale, pour des durées significatives, des membres ou des permanents de partis frères. C’est un moyen efficace de créer des liens de long terme. Un effort particulier pour les partis des anciens pays du bloc soviétique serait souhaitable.

 

Faire mener par les militantes et les militants des combats européens en utilisant l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE)

Nous sommes convaincus que certains combats ne peuvent se mener efficacement qu’au niveau européen et pourtant, ces combats-là, soit nous les menons sans force militante, soit nous nous concentrons sur leur partie purement nationale. 

Nous avons insisté, dans la contribution du PSE, pour que soient prolongés et utilisés les outils de démocratie participative mis en place pour la Conférence sur le Futur de l’Europe (panels, grande assemblée délibérative, ...). Nous disposons déjà de l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) créée par le traité de Lisbonne. Un million de citoyens provenant de 7 pays européens peuvent demander l’examen d’un sujet précis. L’ICE a ainsi obligé la Commission à prendre position sur le glyphosate ou sur la survie des abeilles. Cet instrument de démocratie directe reste cependant peu connu et de mise en œuvre difficile. Seules une poignée d’initiatives ont abouti depuis 2012.

Avec l’appui de ses partenaires européens et des acteurs associatifs nationaux, le Parti socialiste peut porter, grâce à une ICE, des thèmes majeurs écologiques ou sociaux, comme par exemple la protection européenne des consommateurs ou l’indemnisation des victimes de fraude.

Parallèlement nos élus au Parlement européen peuvent demander une simplification du processus et une extension du champ de l’Initiative Citoyenne Européenne.

*

L’idée européenne est sortie de l’abstraction. Renforcée par la guerre en Ukraine et l’urgence climatique, une conscience civique européenne est en train d’apparaître en particulier chez les jeunes. Certains d’entre eux sont déjà dans un réseau international, mais ce sentiment ne doit pas être uniquement le fait des élites. Nous devons faire en sorte qu’il soit partagé et accessible à tous. Les moyens du parti doivent être utilisés pour que chaque militante, chaque militant, puisse faire sienne ou sien la construction européenne avec ses combats, ses échecs et ses avancées. Pour donner envie à chacun.e de s’engager personnellement, à son niveau, afin de bâtir une Europe qui renforce sa sécurité, promeuve les droits démocratiques et humains, développe une économie sociale et lutte pour la préservation de la planète.


Signataires :

Christophe Clergeau, secrétaire national chargé de l’Europe,

Sylvie Guillaume, députée européenne

Éric Andrieu, député européen

Nora Mebarek, députée européenne

Arthur Delaporte, député

François Comet, secrétaire national adjoint Europe

Céline Geissmann, secrétaire nationale adjointe Europe

Karine Gloanec Maurin, Comité européen des régions

Nathalie Sarrabezolles, Comité européen des régions

Jean-Christophe Bejannin (75), Hugues Bernard (31), Catherine Bertho-Lavenir (75), Jean-Marie Biliato (84), Dylan Boutiflat (45), Silvia Camara-Tombini (49), Noël Cavaliere (75), Luc Charpentier (12), Florence Chiavassa (75), Marie Colson (91), Xavier Crépin (75), Dieynaba Diop (78), Yasmine El Jaï (75), Frédéric Engelmann (44), Christophe Fouillère (35), , Tristan Foveau (29), Sylvia Fuster (75), Clément Galland (75), Violaine Gillet (71), Marius Girard-Barbot (75), Liliane Gisselbrecht (75), Aleksander Glogowski (75), Franck Guillory (75), Nadia Huberson (FFE), Sarah Kerrich (59), Aphing Serge Kouame (93), Philippe Lagarrigue (12), Sévillane Lambret (75), Gaston Laval (75), Dominique Lesaffre (75), Nicolas Lété (Benelux), Antonin Mahé (22), Brigitte Marciniak (56), Arthur Moinet (44), Estelle Naud (75), Alma Ogouyon (75), Frédéric Orin (41), Joao Martins Pereira (94 – YES Coordinator), Estelle Picard (79),  Gabriel Richard-Molard (FFE), Nicolas Robin (42), Isabelle Rocca (75), Margaux Rouchet (59), Omri Schwartz (92), Fabienne Stochement (75), Louis Tasset (75), Sylvain Thialon (78), Anne-Juliette Tillay (93), Monique Tuffelli (75), Erol Yolal (75), Eric Zuccarelli (75)


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