Parce que nous sommes les Socialistes, expérimentons dans notre fonctionnement interne des formes démocratiques innovantes


Thème : Démocratie


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Parce que nous sommes les Socialistes, expérimentons dans notre fonctionnement interne des formes démocratiques innovantes

Le Parti Socialiste gagnerait beaucoup à faire évoluer son organisation et son fonctionnement dans le sens d’une démocratie plus délibérative et plus participative. Il y serait gagnant sur deux plans au moins :

  • D’une part, il rendrait l’expérience militante que chacun.e de ses membres peut y vivre plus riche et plus intéressante. Il se rendrait ainsi plus attractif. Il pourrait aussi plus clairement revendiquer d’être l’endroit où s’inventent collectivement les projets de la gauche d’aujourd’hui et de demain.
  • D’autre part, il expérimenterait en son sein les pratiques et les méthodes qui seraient utiles pour mener à bien, lorsqu’il est au pouvoir, des réformes ambitieuses et durables. Au-delà, il dessinerait ce que pourrait être le fonctionnement de la démocratie dans la société d’égalité, de coopération et de liberté qu’il promeut.

C’est en fait à bien des titres que le Parti Socialiste devrait être celui de l’expérimentation démocratique, dans l’esprit d’esquisser et de consolider les formes qui répondront à la crise profonde que traverse le modèle de la démocratie représentative :

  • Parce qu’il s’est toujours, à raison, revendiqué comme un outil au service du fonctionnement démocratique de notre société ;
  • Parce que sa méthode d’action, le réformisme, ne peut plus se penser comme la simple succession de lois glorieuses, mais doit se comprendre comme un processus qui ne prend sons sens qu’en intégrant tout ce qui vient avant et après la loi et lui donne sa pleine légitimité et sa pleine efficacité sociales : la place faite à la qualité de la délibération, à la participation citoyenne, à l’engagement citoyen ;
  • Parce que la société d’égalité et de liberté que nous voulons construire ne pourra tenir durablement que par la coopération et l’engagement citoyen.

S’il est un domaine où l’expérimentation de nouvelles procédures aurait un intérêt particulier, c’est celui de l’élaboration de nos orientations politiques. Relevant aujourd’hui, d’une part de nos congrès et de leurs textes d’orientation, d’autre part des conventions thématiques, la définition de ces orientations s’appuie bien sûr d’ores et déjà sur des formes démocratiques. Mais ces formes pourraient être largement améliorées, dans une double direction :

  • Celle d’une démocratie plus délibérative, c’est-à-dire plus attentive à la qualité du débat, s’agissant tant de son fond (notamment par la diversité et la richesse des éléments sur lesquels il se fonde) que de sa forme (notamment par la transparence du processus qui amène aux formulations que nous retenons et en limitant autant que possible les interférences entre ce processus et des enjeux de pouvoir qui lui sont extérieurs.)
  • ⁃Celle d’une démocratie plus participative, c’est-à-dire plus attentive aux opportunités offertes à chaque militant.e de prendre une part effective tant à l’avancée du débat qu’aux temps d’arbitrages entre les options qui en émergent.

L’ambition que l’on se fixe ici est donc d’essayer d’aller au-delà de ce qui a déjà été expérimenté, et qui fonctionne, sous le format notamment des conférences citoyennes. Le défi serait de réussir à construire des procédures délibératives à grande échelle, l’échelle du Parti dans un premier temps, esquissant la forme qu’elles pourraient prendre un jour à l’échelle du pays tout entier. Réussir à impliquer l’ensemble des militant.e.s (celles et ceux qui le souhaiteraient, tout au moins) dans l’entièreté d’une procédure d’élaboration de l’une des orientations stratégiques du Parti.

Cela impliquerait bien sûr de penser en amont le sens et la forme du texte ou des textes pouvant être produits dans un tel cadre. Il ne s’agirait vraisemblablement pas, comme nous pouvons le faire dans le cadre d’une convention thématique, d’aboutir à un programme d’action complet sur le sujet traité. Il s’agirait plutôt d’aller vers un texte synthétique dans la forme, stratégique sur le fond, s’articulant autour de quelques principes d’action, balisant la manière dont les socialistes se saisissent de la question, marquant l’ordre des priorités et peut-être cadrant la manière dont le détail des mesures serait ensuite défini.

La forme précise que pourrait prendre une démarche délibérative et participative permettant d’aboutir à un tel texte ne peut que découler d’un travail de réflexion collectif et suffisamment partagé au sein du Parti. Ce travail devrait en particulier permettre de trouver la meilleure articulation avec le fonctionnement statutaire du Parti et le rôle dévolu aux différentes instances internes. Ce travail pourrait être confié à une commission ad hoc puis soumis à la validation du Conseil national. Sans donc rentrer trop avant dans la description d’une forme particulière, on peut tracer une première esquisse et quelques premiers éléments constitutifs :

  • La démarche devrait être lancée sur la base d’une question précise, ayant un caractère stratégique et nécessitant une clarification de la position portée par le Parti Socialiste.
  • Elle devrait être conduite en une succession d’étapes clairement identifiées et par lesquelles la réponse à la question sera progressivement élaborée.
  • Chacune de ces étapes devrait s’appuyer sur les apports et les points de vue d’une grande diversité d’intervenants – universitaires, élus, responsables associatifs et syndicaux…
  • Pour chacune de ces étapes, devraient être précisées les modalités selon lesquelles chaque militant.e le souhaitant devrait pouvoir formuler son point de vue et le voir effectivement pris en compte dans l’élaboration de positions collectives.
  • A l’issue de chacune de ces étapes, chaque militant.e le souhaitant devrait pouvoir participer par un vote à l’arbitrage entre des formulations concurrentes.

Deux conditions à la réussite d’un tel projet devraient par ailleurs être d’emblée prises en compte :

  • D’une part, il conviendrait, pour mener à bien une telle procédure, d’accepter de lui donner le temps nécessaire à son déploiement serein et complet. Au sortir du congrès, l’urgence sera bien sûr de bâtir un programme des socialistes pour s’avancer vers la prochaine élection présidentielle. La méthode esquissée ici n s’est sans doute pas celle qui permettra de poser les bases d’un tel programme. Il faudra pour cela recourir à des méthodes plus traditionnelles et plus rapides. Mais on pourrait aussi, dans le même temps, engager dans l’esprit de ce qui est proposé ici un ou des chantiers s’inscrivant dans un temps plus long, s’appuyant sur des modalités d’élaboration innovantes et dont les premiers résultats n’arriveraient que dans le cours du prochain mandat présidentiel.
  • D’autre part, il apparait souhaitable, dans le respect notamment des principes d’un fonctionnement réellement délibératif, que l’organisation et la conduite de la démarche ne soient trop lourdement impactés par les jeux de pouvoir qui sont naturellement présents au sein de notre Parti. Il pourrait ainsi être utile que soit mise en place, pour la conduire, une instance présentant autant que possible des garanties d’indépendance vis-à-vis des responsables et animateurs des différents textes d’orientation.

Enfin, on peut raisonnablement penser que, considérant l’importance du travail

d’organisation et d’ingénierie que la bonne conduite d’une telle démarche nécessiterait, il serait précieux qu’elle puisse s’appuyer sur un réseau de militant.e.s volontaires, prêts à donner un peu de leur temps et de leurs compétences au service de ce projet exigeant. Le présent texte est aussi, d’une certaine manière, un appel à ce que ce réseau commence d’ores et déjà à se constituer.


Contributeurs : Luc Trias, Militant, Section de Bordeaux Centre 


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