Pour un droit à la protection sociale universel et automatique

Thème : Droits sociaux


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Pour un droit à la protection sociale universel et automatique

1.L’urgence d’un enjeu méconnu : le non-recours aux droits sociaux

Le non-recours aux droits sociaux est un scandale silencieux. Alors que des millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, plus de 5 milliards d’euros d’aides sociales ne sont pas réclamés chaque année. Le RSA, les APL, la Complémentaire santé solidaire ou encore les allocations familiales ne bénéficient pas à tous ceux qui y ont droit. Ce déficit d’accès alimente l’exclusion, l’isolement, la précarité, et mine la confiance dans nos institutions.

Le non-recours, c’est le contraire de l’État social. C’est le symptôme d’un système administratif trop complexe, culpabilisant, parfois stigmatisant, et souvent inaccessible pour celles et ceux qui en ont le plus besoin.

2. Constat politique : une question revenue dans l’agenda, mais mal posée

La question du non-recours est récemment réapparue dans le débat public, parfois sous des dehors techniques, parfois avec des arrière-pensées politiques. L’enjeu n’est pas seulement de simplifier ou de mieux « informer les ayants droit ». Il s’agit de changer de paradigme : passer d’un modèle où il faut prouver qu’on a besoin d’aide à un modèle où la solidarité est automatique, universelle, juste, et digne.

Face à l’obsession du "contrôle des fraudeurs", il est temps de poser la question du non-recours comme un enjeu de justice sociale, de démocratie administrative, et de modernisation de l’action publique.

3. Notre proposition : un droit à la protection sociale automatique et universel

Le Parti socialiste doit être le porteur d’un projet clair : généraliser l’automaticité des droits sociaux. Cela passe par :

  • -  La solidarité à la source : sur le modèle du prélèvement à la source, créer un versement à la source des prestations sociales, calculées automatiquement à partir des données déjà détenues par les administrations (revenus, charges, composition familiale)

  • -  - Le guichet unique numérique et physique : chaque citoyen doit pouvoir connaître et faire valoir ses droits en un seul endroit, avec accompagnement humain garanti pour les plus vulnérables.
    - Un service public des droits sociaux renforcé, avec des agents formés pour aller vers les publics éloignés des services.

    - L’expérimentation locale de territoires “zéro non-recours”.
    - Une protection sociale “par défaut” pour les jeunes de moins de 25 ans, aujourd’hui exclus de nombreuses aides.

     

4. Réponses aux objections et cadre politique

Certains verront dans l’automatisation une "incitation à l’assistanat". Nous affirmons au contraire qu’un droit non utilisé est un droit nié. Le consentement à l’impôt passe aussi par la certitude que chacun a accès à ce que la République garantit. Lutter contre le non-recours, c’est redonner du sens à l’État social, fondement de notre pacte républicain.

L’automaticité, ce n’est pas l’opacité. C’est la lisibilité des droits, la dignité des démarches, l’égalité d’accès. Il faut accompagner cette évolution d’un débat démocratique, et s’opposer frontalement aux discours de stigmatisation des pauvres.

5. Feuille de route pour une mise en œuvre progressive

| Expérimentations locales sur RSA et APL automatiques dans 10 territoires pilotes
| Lancement du portail "Mes droits sociaux" avec interconnexion des administrations | Extension du RSA jeunes en droit commun, sous forme automatique
| Généralisation de l’automaticité sur au moins 5 prestations de base
| Objectif 2032 "Zéro non-recours structurel" dans tout le pays

6. Conclusion : pour un socialisme de la dignité et de l’universalité

Nous ne devons plus accepter que les plus pauvres, les plus fragiles, soient aussi ceux qui accèdent le moins à leurs droits. Le non-recours n’est pas une fatalité. Il est le résultat d’un système qui oblige à quémander ce qui devrait être garanti.

Nous, socialistes, devons faire du droit social automatique une pierre angulaire d’un nouveau pacte républicain : pour que les droits ne soient pas une chance, mais une évidence.


Contributeur : Stéphane Gemmani


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