Pour un meilleur aménagement de tous les territoires urbains et ruraux


Thème : Aménagement du territoire


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Il est nécessaire et urgent de démocratiser l’élaboration et la décision des projets d’aménagement des territoires, en développant sans attendre la dimension écologique et en s’affranchissant du dogme de la compétitivité, de favoriser de nouveaux modes de déplacement et de privilégier l’interpénétration des espaces urbains et des zones vertes.

« L’aménagement du territoire est l’instrument d’une démocratie moderne. [...] L’aménagement du territoire lui offre le champ d’action et la possibilité de son épanouissement. Ce n’est pas la politique d’un groupe, d’un gouvernement ou d’un régime. C’est l’œuvre de la nation, une œuvre permanente qui déborde les soucis immédiats. C’est la croisade de tous les Français pour la conquête et la construction de leur avenir. C’est l’expression nouvelle de l’esprit civique. » Philippe Lamour, 60 millions de Français (1967)



LANCER UN PLAN DE DÉVELOPPEMENT URBAIN DURABLE DANS LES COMMUNAUTÉS URBAINES ET LES COMMUNAUTÉS D’AGGLOMÉRATION

Mettre en place une politique d’urbanisme et d’aménagement des territoires qui prenne en compte le long terme en ne l’envisageant pas seulement comme une prolongation tendancielle du passé. Les opportunités, les défis mais aussi les limites du XXIe siècle doivent obligatoirement être intégrés sans plus attendre.


ÉLABORER LES PROJETS D’AMÉNAGEMENT AVEC LES HABITANTS

Remettre les habitants au cœur de leur vie dans leur quartier, leur redonner un droit à l’expression et à la participation dans la définition des projets, et repenser dans ce sens les outils de la concertation.


INAUGURER UN GRAND PROGRAMME DE RÉINVENTION DES AGGLOMÉRATIONS

  • Favoriser l’émergence d’aménagements, de services et de nouveaux plans de déplacements (comme à Lille par exemple) pour éloigner les voitures individuelles des centres-villes : développement des transports doux, réseaux de systèmes vélo autonomes, mise à disposition de deux roues, développement des bus à haut niveau de service, tram-trains, espaces de parking aux entrées des villes, création de hubs intermodaux en périphérie...

  • Développer l’agriculture urbaine et périurbaine : jardins ouvriers, jardins partagés, parcs publics productifs, plantation d’arbres, valorisation des espaces verts, afin — au-delà de l’intérêt en matière de production alimentaire — de sensibiliser les citadins et leur inculquer des savoirs et savoir-faire utiles. Les quartiers défavorisés et les cités constitueront la cible prioritaire.

  • Créer des « biorégions urbaines », des « zones vertes », des « territoires agroécologiques » et des corridors écologiques autour des agglomérations ; favoriser l’interpénétration des espaces urbains et des zones vertes.

  • Réorganiser les flux de personnes et le fret pour rationaliser l’usage des carburants liquides. Soutenir notamment les entreprises offrant à leurs employés des possibilités de transports collectifs propres, de télétravail et/ou de coworking hors-sites : la crise de COVID nous a déjà montré que c’était possible.

« Une ville à taille humaine et cohérente à long terme implique deux tensions. D’abord, sa taille humaine suppose un équilibre entre la convivialité de ses quartiers et l’intimité de ses habitats. Ensuite, pour être cohérente sur le long terme, cette cité devra être conçue à échelle durable, c’est-à-dire respecter un juste milieu entre la rentabilité économique – celle des facteurs de production – et l’efficience énergétique. » Kristoffer Berger, pour www.entraide.be


DONNER DES MOYENS AU MINISTÈRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE ET DE LA COHESION DES TERRITOIRES

Donner de l’ambition et de la latitude d’action à ce ministère, et assurer un travail rapproché avec le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.


RESTREINDRE LA PRÉSENCE DES VOITURES DANS LES CENTRES-VILLES

Construire des péages urbains et des aires de stationnement en périphérie des villes, et développer des plateformes multimodales de transports en commun à ces endroits-là pour faciliter l’interconnexion entre différents modes de transport écologiques. Réinventer la ville en incluant les citadins, favoriser les projets d’initiative citoyenne.


ENCOURAGER LE DÉVELOPPEMENT EN VILLE DE ZONES STRICTEMENT PIÉTONNES OUVERTES AUX TRANSPORTS DOUX ET DE « SYSTÈMES VÉLO »

Pour que le vélo devienne le mode de déplacement majoritaire pour les trajets courts et moyens (jusqu’à 15 km), mettre en place une politique cyclable globale inspirée du système néerlandais: des infrastructures et des équipements intégrés au schéma de cohérence territoriale, permettant d’utiliser le vélo aussi aisément qu’on utilise aujourd’hui la voiture. Cela inclut :

  • Des infrastructures et réglementations spécifiques : aménagement massif et systématique (pistes de vitesses et largeurs variées, signalisation, parcs à vélos sécurisés, jalonnement, gestion de priorité aux intersections...)

  • Des services dédiés (commerces spécialisés, services de réparation, cartes spécifiques...)

  • Une communication adaptée (sécurité, vol, santé...)

Pour les communes avec dénivelée, favoriser le développement des vélos à assistance électrique.


DÉVELOPPER LES TRAMS-TRAINS DANS LES VILLES DE TAILLE INTERMÉDIAIRE

Ce moyen de transport économe en énergie et peu dépendant du pétrole permet de quadriller efficacement toute une région autour d’une agglomération, en offrant aux voyageurs une souplesse de transport attractive.


DÉVELOPPER LE RÉSEAU DE BUS ÉLECTRIQUES À HAUT NIVEAU DE SERVICE

Un réseau de bus électriques ou de trolleybus à haut niveau de service (BHNS et TBHNS) est un système de transport circulant en zone urbaine ou périurbaine selon un itinéraire en site propre partiel ou intégral, avec une fréquence de passage élevée (5 minutes en heure de pointe) et disposant d’une priorité aux feux et aux ronds-points garantie par des aménagements spécifiques

Les bus électriques sont équipés de systèmes à recharge ponctuelle rapide en exploitation (en station ou en dépôt). L’aménagement de voies dédiées aux BHNS et TBHNS, additionnée à l’ouverture de pistes cyclables, restreint naturellement l’espace de circulation des véhicules particuliers.

Priorité sera donnée au développement du réseau dans les zones périurbaines.


IMPULSER UN GRAND DÉVELOPPEMENT DU RÉSEAU FERROVIAIRE

Développer le ferroutage et un maillage plus serré du réseau ferré pour les voyageurs et le fret via la construction de nouvelles voies ferrées et la mise en service de matériel roulant neuf, tout en assurant le maintien en condition opérationnelle du réseau classique, trop souvent négligé au profit des lignes à grande vitesse.

Développer les trains intercités et revenir au projet initial de rénovation du réseau ferré secondaire, mis à mal par l’abandon de l’écotaxe poids lourds. Cela permettra d’augmenter le nombre de dessertes possibles en train, de retrouver une offre compétitive en matière de tarifs et de temps pour les interconnexions avec les villes moyennes, ainsi que de redynamiser l’offre pour le fret entre les très grandes villes et les axes d’interconnexion frontalière.

Le chemin de fer subit un abandon continu de la part des autorités publiques : en 1930, le réseau ferroviaire atteignait en France 62 000 km. Il n’en compte plus que 29 000 aujourd’hui.


LANCER UN GRAND PROGRAMME DE « BOUCLAGE DES CYCLES »

Notre système économique organisé de manière linéaire vide la nature de ses ressources d’un côté et pollue gravement les écosystèmes de l’autre. Il est temps de « boucler les cycles » par l’économie circulaire et une réinvention de la manière dont on traite nos déchets : eaux usées, extrants agricoles, déchets BTP, déchets d’équipements électriques et électroniques...

Par exemple, les déjections humaines et animales ne doivent plus être déversées dans l’eau : il est impératif de les traiter, avec les déchets cellulosiques, pour en faire de l’humus pour les sols agraires après un compostage adéquat (bouclage des cycles en direction des terres agricoles). Cela permet de pérenniser les processus de formation des sols, d’améliorer durablement les capacités de production et de régénération des terres, ainsi que de limiter les pollutions des eaux et de l’air.

D’une façon générale, gérer de manière séparée les eaux grises (ménages et lessives) et les eaux vannes (fèces et urines) :

  • Les eaux grises retournent aux cours d’eau ou aux nappes phréatiques, ou sont utilisées pour l’arrosage agricole après un traitement adapté (dégrillage, déshuilage, transition en zone humide) : c’est là un traitement plus léger et moins coûteux que celui en vigueur actuellement dans des stations d’épuration toujours plus technologiques et sophistiquées.

  • Les eaux-vannes, mélangées aux matières végétales en centres d’imprégnation, se transforment en compost et en humus (conformément au cycle naturel) et restaurent les sols agraires appauvris et détruits par des décennies de chimie de synthèse phytosanitaire.

    La mise en œuvre de ce programme demandera des investissements publics dont nous estimons qu’ils seront rentables dans une perspective socio-économique de création d’emploi pour la mise en place (construction d’équipements, installation des réseaux) et l’exploitation (collecte, traitement, valorisation).


FAVORISER L’INTERMODALITÉ TRAIN/VÉLO

Multiplier les espaces d’interconnexion train/vélo est indispensable pour augmenter le maillage d’un réseau de déplacements peu dépendant des combustibles fossiles.


ÉTUDIER L’OPPORTUNITÉ DE CRÉER DE NOUVEAUX CANAUX DANS L’OPTIQUE DU DÉVELOPPEMENT DU FRET FLUVIAL

Développer sans attendre nos capacités en matière de fret peu consommateur de combustibles fossiles et donc à impact climatique faible.


FREINER L’ÉTALEMENT URBAIN ET DYNAMISER LES BANLIEUES

Geler l’étalement urbain au profit de la densification dans les Schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT), les Schémas de cohérence territoriale (SCoT), les Plans Locaux d’Urbanisme, (PLU), les Plans d’occupation des sols (POS).

Organiser la mixité d’usage du sol et des constructions, en particulier en dépassant le modèle des banlieues pavillonnaires et des cités-dortoirs, afin de redensifier les zones périurbaines peu denses.

Mobiliser l’outil fiscal pour limiter l’étalement.

Prendre en compte les objectifs de mixité sociale dans les attributions de logement social.

Rendre plus visible et amplifier la mise à disposition des locaux d’activité à des coûts abordables, notamment dans le cadre du traitement des pieds d’immeuble, qui peuvent être le support d’initiatives relevant de l’économie sociale et solidaire.

Organiser la ville pour qu’il soit possible de se rendre à pied ou à vélo aux services et commerces quotidiens.

« Pourquoi créer une nouvelle zone d’activités alors que le centre-ville meurt ? Pourquoi accorder des permis de construire de lotissements alors que les logements en centre-ville ou centre-bourg existent ? Pourquoi étendre des surfaces commerciales alors que le taux de vacance commerciale augmente ? Autant de questions qui placent les acteurs publics, souvent locaux, devant des responsabilités lourdes de conséquences. » Jérôme Libeskind


LUTTER CONTRE LA DÉGRADATION DES INFRASTRUCTURES

Procéder à un bilan de santé approfondi des infrastructures: routes, ponts, ports, voies ferrées, barrages, égouts...

Former une nouvelle génération d’ingénieurs civils spécialisés dans la « médecine des structures » afin de lutter contre la dégradation des infrastructures (en commençant par les plus critiques). De nouveaux outils existent pour inspecter, réparer et maintenir les structures, mais ils sont encore embryonnaires. Une forte mobilisation scientifique et politique sur le sujet permettrait de développer ces outils et de former les techniciens et ingénieurs afin qu’ils deviennent les solutions commerciales de demain.


RENFORCER ET DYNAMISER LA MISE EN ŒUVRE DE LA TRAME VERTE ET BLEUE (TVB)

Préserver la faune sauvage, déjà fortement sous pression, requiert de consentir des travaux d’aménagement spécifiques, sous forme de corridors écologiques et d’habitats préservés.


Signataires :

Mathieu Gitton, secrétaire de section de Belgique


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