Pour une forêt au coeur de la transition écologique


Thème : Forêt-bois


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La forêt, qui couvre un tiers du territoire national, est emblématique de la sociale-écologie dans le sens où elle s’inscrit dans le temps long, celui du rythme des arbres, à l’inverse des temps courts du néolibéralisme, et dans le sens de l’intérêt général, par sa multifonctionnalité, économique – 60 milliards de chiffre d’affaires et 450 000 emplois, notamment en zone rurale - sociale et environnementale - enjeux environnementaux planétaires (captation et stockage de CO2, production de matériau renouvelable, source d’énergie, refuge de biodiversité, protection des sols, eau, régulation des températures et des précipitations…), et espace ouvert au public. De par ses fonctions d’intérêt général, on parle ainsi de forêt « bien commun ». La forêt est devenue l’objet d’une très grande attention sociétale. Tout son rôle est essentiel pour les conditions de vies de l’humanité. Dans un contexte d’accélération du réchauffement climatique, l’accent doit être mis sur l’observation des phénomènes, de la recherche et développement d’une politique d’adaptation et de gestion des risques. Nous pensons que la forêt est aujourd’hui au cœur de la transition écologique. Elle contribue au bien-être de notre population, elle participe à l’économie de nos territoires, elle est tournée vers l’avenir grâce à de nouveaux débouchés comme la chimie verte, les cosmétiques.


Le Bilan

Le bilan des socialistes au gouvernement n’est pas léger. A l’inverse le bilan de ces dernières années est plutôt faible : la forêt n’apparait même plus dans l’intitulé d’un Ministère, les Assises et autres grands messes se succèdent mais les politiques publiques ne sont que le fruit d’une réponse aux urgences (achat de canadairs, fonds d’aide au reboisement) alors que les enjeux sont énormes (incendies à répétition, dépérissement des forêts françaises dû principalement au effets du changement climatique, commerce extérieur toujours déficitaire (plus de 6 milliards d’Euros, 2e poste après le pétrole), des bois de qualité comme le chêne (25% de notre production) sont préemptés par la Chine mettant à mal nos siceries, le prix du bois énergie, en particulier les pellets, explose, fragilisant de nombreux ménages modestes alors que la France a la troisième forêt d’Europe), pire ! l’ONF, véritable service public de la forêt voit ses effectifs fondre (encore 475 postes doivent être supprimés d’ici 2025) et sa privatisation rempante (contrats de droit privé) angoisse ses agents.

Les recommandations de notre contribution thématique lors du dernier congrès n’ont pas été mises en oeuvre. "Ainsi, dès le congrès de Poitiers, nous proposions un certain nombre d'actions : instaurer un pilotage interministériel de la filière, rémunérer les aménités forestières, promouvoir une politique européenne forestière à l'image de la Politique Agricole Commune, mobiliser la recherche dans la chimie verte, instaurer une comptabilité carbone dans les marchés publics, alimenter le fonds stratégique de manière à approvisionner en matière ligneuse un aval diversifié, inciter aux plans de gestion collectif et créer des incitations au regroupement, réorientation de la politique fiscale forestière, repenser le modèle global de l'ONF autour du financement pérenne de ses missions d'intérêt général,... Force est de constater que l'essentiel reste à faire."

L’indicateur principal, la mobilisation de l’accru forestier ne s’est pas améliorée : la France ne prélève que la moitié de la production naturelle annuelle de ses forêts. Les derniers chiffres officiels montrent que la récolte totale de bois a même décru et ceci particulièrement dans le bois d’industrie résineux ou encore de trituration. Une compensation partielle est relevée dans la forte augmentation des volumes commercialisés destinés à la production d'énergie .


Les enjeux et les engagements

Au niveau des territoires, la forêt apporte activité économique (plus de 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires) et emplois (plus de 450 000 dans toute la filière) mais souffre toujours d’un déficit commercial dont le comblement permettrait de faire mieux encore. La gouvernance efficace de filière passera par la simplification de l’interprofession pour créer un effet filière, dans une démarche stratégique partagée avec tous les citoyens, au sein des différentes planifications en cours (développement économique, aménagement du territoire…) ; dans les territoires, la forêt permet aussi la préservation des sols, particulièrement en montagne et sur le littoral, ainsi que la qualité de l’eau qu’elle filtre. Autant de services qu’elle rend sur un territoire donné mais qui bénéficie à tous, les zones urbaines y trouvant des espaces de loisirs, des réserves d’eau potable…). Les 3,5 millions de propriétaires particuliers qui possèdent plus de 11 millions d’hectares de forêts ont également une responsabilité qui va au-delà de la simple exploitation durable. L’objectif est un développement harmonieux et équilibré des territoires en particulier ruraux où se réalise la transformation du bois et où s’établit le service public de l’Office National des Forêts qu’il convient de conforter. A l’inverse, la forêt rend de nombreux services aux métropoles, qu’il conviendra de contractualiser. De nombreuses forêt domaniales de création récente l’ont été dans un souci de missions d’intérêt général. Dans les forêts d’outre-mer, seules forêts tropicales de l’Union Européenne, la diversité (tropicales, boréales, mangroves, forêts sèches) nous oblige à l’exemplarité qui passe par une meilleure connaissance et préservation. Par ailleurs, notre forêt souffre : Sécheresses à répétition, canicules et augmentation du nombre de violents incendies de l’été… En 2022, les épisodes climatiques extrêmes ont meurtri plus de 70 000 hectares de forêts françaises. Dans son état des lieux annuel, l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) révèle un accroissement de 54 % de la mortalité des arbres sur la dernière décennie.

Les socialistes s’engagent à :

  • Inscrire la forêt, dans sa multifonctionnalité, au cœur des projets des territoires et renforcer le lien société – forêt pour permettre une meilleure prise en compte et acceptabilité de ses différentes fonctions
  • Valoriser les expérimentations forestières des territoires où ils sont en responsabilité

  • Engager des contractualisations urbain/rural autour des services rendus par la forêt et concilier les sphères publiques et privées autour des usages forestiers

  • l’accroissement des forêts françaises est bien souvent dû à la déprise agricole et cette forêt privée nouvelle s’ajoute la plupart du temps aux nombreuses forêts privées mal gérées : nous proposons de faciliter l’acquisition de forêts privées pour les inclure dans la forêt publique dont la gestion est exemplaire.

  • créer au sein du Gouvernement un poste dédié à la forêt et la filière bois dans toutes ses dimensions et le doter de moyens d’action en appui sur les administrations et établissements aujourd’hui chargés de manière disparate de la forêt

  • Pérenniser le service public rendu par l’ONF, qui gère 25% de la surface forestière nationale pour l’Etat et 11 500 communes forestières et fournit 40% de la matière première de la filière, grâce un financement assuré, notamment autour des services rendus par celle-ci, ses missions d’intérêt général, et grâce à la valorisation des missions de ses agents. Valoriser sa fonction d’expérimentation dans un moment clé où la gestion forestière doit être régulièrement questionnée face au défi climatique.

  • améliorer les conditions de travail des forestiers par une augmentation des effectifs, la lutte contre les accidents du travail et la valorisation salariale de ces métiers

  • Valoriser la recherche pour une meilleure connaissance, notamment des forêts d’outre-mer, en particulier pour la préservation de leur biodiversité et leur adaptation aux changements climatiques

  • Encourager les groupements de propriétaires forestiers qui utilisent des outils nouveaux de financement participatif pour gérer durablement, ensemble, des forêts ; encourager les groupements de petits producteurs sous forme coopérative notamment ; encourager les gestions les plus écologiques, en particulier privilégier chaque fois que possible la sylviculture sans coupe rase.

  • rétablir l’équilibre forêt-gibier partout où cela s’avère nécessaire pour permettre de régénérer les forêts

  • Avoir une attention particulière aux forêts des territoires ultramarins. (Préservation de la biodiversité, travail avec les populations locales,…)

Au niveau des différents enjeux forestiers, il est primordial de poser que le matériau bois, sous forme de fibre, peut se substituer à la plupart des matériaux carbonés issus de la pétro-chimie et c’est donc un enjeu de société que de permettre à la fois l’innovation sous toutes ses formes et la mobilisation de l’accroissement forestier. Le bois est source de matériaux de construction, papier, carton, gaz, hydrogène. Aujourd’hui, la recherche et l’innovation sont capable de créer du carburant à partir de la fibre de bois, de souder ce matériau, de le rendre translucide, de l’utiliser comme matière première dans les imprimantes 3D, dans les développements de la chimie verte, ou encore de l’industrie pharmaceutique, … Plus que la part des immeubles en bois, c’est la part du matériau bois, voire de la fibre de bois, dans nos usages de tous les jours qui devient crucial. Le changement de modèle économique et environnemental devenu nécessaire aujourd’hui, passe sans doute par cette substitution de matière biosourcée.

Les socialistes s’engagent à :

  • Renforcer le pilotage national de la filière bois grâce à une gouvernance simplifiée (vers un cluster national de l’économie forestière) et un contrat de filière fort
  • Valoriser la formation forestière en lui redonnant une place d’excellence

  • Renforcer l'Enseignement-Formation, la Recherche et le Développement Forestiers ; en matière de formation, il s’agit également de développer les métiers et savoir-faire forestiers dont certains peinent aujourd’hui à trouver des candidats. Ces propositions rejoignent celles de la contribution thématique sur l’enseignement agricole et forestier.

  • Favoriser et financer la recherche et l’innovation pour permettre le passage au stade commercial des innovations en termes de substitution de la fibre bois aux autres matériaux non renouvelables

  • Favoriser dans les territoires où ils sont en responsabilité l’accroissement de l’utilisation du bois dans les usages du quotidien, favoriser l’agro-foresterie et également les usages touristiques de la forêt pour ouvrir le milieu forestier à la connaissance du public

  • Faire bénéficier la filière bois de la taxe carbone

  • Réformer la fiscalité forestière dans un sens plus orienté vers l’innovation et l’activité économique plutôt que la rente, dans le respect des critères de développement durable et de gestion planifiée et collective, comme la coopération.

En termes d’enjeux climatiques, la forêt stocke une partie de nos gaz à effet de serre et le bois énergie, peut constituer une part non négligeable de notre mix énergétique, s’il est prélevé dans le respect du développement durable. La politique européenne a d’ailleurs fixé des objectifs ambitieux pour le bois énergie dans sa trajectoire de transition énergétique et il est nécessaire de les atteindre dans le respect du renouvellement des forêts et de la préservation de la biodiversité. Au-delà de sa responsabilité européenne, la France doit veiller à promouvoir au niveau mondial le rôle de la forêt dans le dérèglement climatique, en faisant de la lutte contre la déforestation une cause essentielle et sur notre territoire rendre encore plus ambitieuse la politique européenne tout juste amorcée de lutte contre la déforestation importée en augmentant la liste des produits cibles qui portent atteinte à la forêt dans d’autres parties du monde.

Les socialistes s’engagent à :

  • Faire émerger une force européenne de lutte contre les incendies de forêts tant en termes de prévention – notamment par la valorisation de la forêt méditerranéenne – qu’en termes de moyens mis en commun au niveau de l’Union ; favoriser une politique commune de gestion des risques de la forêt (incendies,dépérissement, etc).
  • Lutter au niveau mondial contre la déforestation, l’exploitation illégale des bois et pour les droits des populations vivant dans et par la forêt.

  • Faire émerger au niveau européen des moyens pour la recherche, en particulier sur l’adaptation des forêts au réchauffement climatique ; Permettre à l’ONF et l’INRAE d’être un élément moteur de cette politique européenne et d’expérimenter et d’orienter les gestions adaptées au changement climatique. Nécessité de travailler à moyen et long terme avec possibilité de révision.

  • Promouvoir une politique européenne de développement du bois énergie respectueuse du renouvellement forestier


La forêt est un bien commun qui, pour les socialistes, doit donc être gérée dans l’intérêt commun et nécessite, en conséquence, une action publique forte. Elle est également source d’opportunités pour la France, en particulier dans ses espaces ruraux. Ces propositions sont compatibles avec le programme de la NUPES présenté lors des dernières élections législatives. Aujourd’hui, il est nécessaire de refonder la politique forestière française au service du climat, de la biodiversité et du bien-être de nos concitoyens.


Premiers signataires :

Dominique POTIER (Député de Meurthe et Moselle), Eric ANDRIEU (Député Européen), Joël AVIRAGNET (Député de la Haute-Garonne), Christophe CLERGEAU (Conseiller Régional des Pays de la Loire, secrétaire national du Parti Socialiste), Frédéric COURLEUX, Arthur DELAPORTE (député du Calvados), Stéphane DELAUTRETTE (Député de la Haute-Vienne), Chantal JOURDAN (Députée de l’Orne), Sylvain MATHIEU (1er secrétaire fédéral de la Nièvre, Conseiller Régional de Bourgogne Franche Comté chargé de la forêt, président du Parc Régional Naturel du Morvan), Dominique Michenot (Fédération de Loire-Atlantique), Georges-André MORIN (membre de la CNAR), Germinal Peiro (président du Conseil Départemental de Dordogne), Etienne POURCHER (animateur du groupe forêt de la CNAR, secrétaire de section Nantes Est), Jean REPARET (membre de la CNAR), Thierry SIEFFER (Maire de Ranrupt, président du SIVU des forêts communales de la Bruche), Stessy SPEISSMANN (Maire de Gérardmer), Michaël WEBER (Conseiller Régional Grand Est, 1er Secrétaire Fédéral de la Moselle).


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