Pour une politique migratoire humaine et solidaire encrée dans le réel


Thème : Immigration


Chaque jour, dans le monde, des personnes prennent la décision la plus difficile de leur existence :  partir de chez elles dans l’espoir de trouver une vie meilleure et plus sûre. 

Nous vivons presque tous l’expérience de quitter l’endroit où nous avons grandi, sans nécessairement  aller plus loin que le village voisin ou la ville d’à côté. Certaines personnes, en revanche, doivent quitter  leur pays – pour une courte période ou pour toujours. 

Il existe de nombreuses raisons qui poussent des habitants des quatre coins de la planète à  reconstruire leur vie dans un autre pays. Certaines personnes partent chercher un emploi ou faire des  études. D’autres fuient des persécutions ou des violations des droits humains comme la torture. Des  millions tentent d’échapper à des conflits armés ou à d’autres crises ou situations violentes. D’autres  encore ne se sentent plus en sécurité et ont pu être la cible de violences uniquement à cause de ce  qu’elles sont, de ce qu’elles font ou de ce en quoi elles croient, par exemple en raison de leur origine  ethnique, leur religion, leur orientation sexuelle ou leurs opinions politiques. 

Leurs périples, qui débutent toujours avec l’espoir d’un avenir meilleur, peuvent se dérouler sous le  signe du danger et de la peur. Des personnes risquent d’être victimes de la traite ou d’autres formes  d’exploitation. Certaines sont placées en détention par les autorités dès leur arrivée dans un nouveau  pays. Lorsqu’elles s’installent enfin et commencent une nouvelle vie, de nombreuses personnes sont  confrontées quotidiennement au racisme, à la xénophobie et aux discriminations. 

Tous les étrangers ne sont pas des barbares, et tous nos compatriotes ne sont pas  civilisés. Jean de La Bruyère 

METTRE EN ŒUVRE UNE POLITIQUE D’ACCUEIL DES MIGRANTS CONFORME AUX  VALEURS DES DROITS DE L’HOMME PROCLAMÉES PAR LA FRANCE

La France, volontiers donneuse de leçons, pratique une politique confuse en matière d’accueil. Des  initiatives visant à augmenter les places d’hébergement et à raccourcir les délais de demande d’asile  coexistent avec une répression féroce vis-à-vis des migrants et des associations qui les soutiennent. 

Les demandes d’asile accordées, 54 094 sur 104 577 demandes en 2021 – soit 0,1 % de notre  population – continuent de se heurter à des pratiques différenciées, aux dispositifs policiers de  répression et aux procédures de renvoi dans d’autres pays de l’Union européenne des personnes dites  « dublinées » dont les empreintes ont été prises dans un autre État membre. 

Ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants  et des membres de leur famille, texte de l’ONU de 1990 qui, à ce jour, ne l’a été par aucun État de  l’Union européenne 

Respecter le droit d’asile, l’accueil dû aux réfugiés et l’examen individuel des dossiers dans un délai  raisonnable en simplifiant les procédures d’examen du droit d’asile 

Respecter l’engagement pris par Bernard Cazeneuve lors du démantèlement de la « jungle » de  Calais, de ne pas leur appliquer la procédure de Dublin et refuser la politique actuelle qui consiste  à les assigner à résidence en vue de les renvoyer dans le pays européen par lequel ils sont arrivés

Renforcer les moyens de l’OFPRA, harmoniser le traitement par les préfectures et sanctionner les  préfets qui ne respectent pas le droit et dont les pratiques de contournement sont condamnées  par les tribunaux 

Régionaliser le dispositif en renforçant les moyens des préfectures pour éviter que près de la  moitié des dossiers soient déposés en Île-de-France afin de mieux respecter les délais  d’enregistrement imposés par la loi ; la solidarité entre les territoires implique une répartition  équitable des réfugiés 

Promouvoir une véritable politique d’accueil des réfugiés basée sur une logique de droits et devoirs  avec des obligations d’apprentissage du français, de formation… 

Mettre à disposition les dizaines de milliers de logements et de places d’hébergement disponibles  pour l’accueil des demandeurs d’asile. Une fois leur demande d’asile acceptée, favoriser  l’obtention d’un logement dans le cadre de la politique de construction de logements sociaux  accessibles. Intégrer aux politiques indispensables d’urgence sociale celle de d’accueil des réfugiés  en imposant le droit au logement pour tous sans opposer les souffrances des uns à celles des autres  

Une personne à la rue, quels que soit son parcours et sa nationalité, doit obtenir une réponse adaptée  à sa situation. 

Respecter l’obligation légale de scolarisation des enfants de 6 à 16 ans et développer les structures  d’accueil des enfants non francophones 

Régulariser les personnes (notamment les familles) qui ne peuvent être expulsées en raison de la  durée de leur séjour, des enfants scolarisés, de problèmes de santé, ou tout simplement parce  qu’on ne peut les renvoyer dans leur pays, soit que celui-ci ne soit pas considéré comme sûr, soit  qu’il refuse de les "reprendre" et qui encombrent les hôtels sociaux 

Examiner toutes les possibilités, comme la réinstallation, les programmes d’admission à titre  humanitaire, ceux basés sur le parrainage privé et le recours à d’autres programmes juridiques tels  les visas étudiant ou les permis de travail 

Faciliter la délivrance d’un titre de séjour vie privée et familiale, avec autorisation de travailler,  pour les familles qui ont des enfants scolarisés ; offrir aux jeunes scolarisés et apprentis, devenus  majeurs, des titres de séjour pour poursuivre leurs études et leur formation. Régulariser aussi les  personnes qui ont fait la preuve de leur volonté de rester, de s’intégrer, de travailler... et paient  souvent des impôts et cotisations sociales 

Promouvoir les parrainages républicains : cérémonies publiques et médiatisées ou les marraines  et parrains, élus de la république, issus de la société civile, s’engagent à accompagner les jeunes  et leurs familles dans leur parcours en France 

Accompagner les réfugiés dans leur insertion professionnelle en mettant en œuvre un plan  ambitieux d’apprentissage de la langue, de formation professionnelle, de contrats aidés, de tutorat  avant même l’octroi de leur statut pour les personnes originaires de certains pays 

Certaines grandes entreprises pratiquent le « coaching » de réfugiés, au triple bénéfice de la personne  qui peut travailler plutôt que de dépendre des aides sociales, de l’entreprise qui répond à ses besoins  de long terme dans des secteurs porteurs tel le numérique ou en pénurie de main d’œuvre, et enfin de la société dans son ensemble. 

Combattre fermement les a priori en favorisant les compétences professionnelles des réfugiés  dans le cadre d’une véritable politique de lutte contre le chômage par le partage du temps de  travail 

Régulariser un certain nombre de travailleurs « au noir » qui constituent une concurrence déloyale  pour le plus grand bénéfice des employeurs, au détriment des ouvriers et employés des services

Prendre en compte le temps d’adaptation nécessaire à une intégration réussie permettant un juste  équilibre entre la préservation de son identité culturelle et une véritable insertion citoyenne  comme ce fut le cas pour les Italiens, Portugais et Polonais en valorisant les apports culturels de  l’immigration 

Pour les populations en transit qui ne souhaitent pas demander l’asile en France, installer des  « camps humanitaires » comme à Grande-Synthe ou à Paris, membre du réseau des « villes  refuges », pour les accueillir dans des conditions dignes dès leur arrivée, ou des « maisons des  migrants ». Respecter la promesse de Bernard Cazeneuve d’un dispositif pérenne humanitaire à  Calais et mettre fin aux entraves et répressions des associations travaillant dans le secteur  

Une « maison des migrants » est une structure leur permettant de se reposer, de réfléchir à la suite  de leur parcours, d’envisager de déposer une demande d’asile en France et de les orienter vers la  structure qui sera la mieux adaptée à leurs besoins. 

Prendre en charge immédiatement et inconditionnellement les mineurs demandeurs d’asile isolés,  et installer des camps spécifiques à leur intention, encadrés par des responsables éducatifs et  sociaux à Calais et à Paris 

Rendre effectif l’accès aux soins, y compris psychologiques, des personnes présentes en France en  levant les restrictions imposées à l’Aide médicale d’État (AME), en particulier en supprimant le  délai de trois mois de résidence pour les individus majeurs en situation irrégulière – sur ce point la  situation pose de gros problèmes, aussi bien aux personnes en situation irrégulière qu’aux  demandeurs d’asile avant que leur demande ne soit enregistrée, mais aussi en termes sanitaires  pour l’ensemble de la population comme ne cessent de le souligner les ONG, notamment Médecins du monde 

Traduire tous les documents fournis par l’administration aux demandeurs d’asile dans les langues  officielles de l’ONU (anglais, espagnol, arabe, chinois, russe) 

Faciliter l’insertion des demandeurs d’asile par l’accès aux dispositifs d’insertion type SIAE  (structures d’insertion par l’activité économique), par la délivrance d’équivalence des diplômes,  par la mise en place de passerelles vers l’emploi et la formation dédiées facilitant leur accès au  marché du travail, par un accès aux postes municipaux requérant un savoir-faire artisanal 

Régulariser automatiquement la situation des parents d’enfants ayant obtenu le statut de réfugié  ou de protection subsidiaire 

Accorder une attention particulière aux femmes de migrants : 

o Leur octroyer, en accord avec la convention du Conseil de l’Europe d’Istanbul sur la lutte  contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, un permis de résidence  individuel, non susceptible d’être remis en cause en cas de rupture conjugale 

o Accorder le droit d’asile aux femmes persécutées et discriminées en tant que femmes, aux  femmes persécutées en raison de leur orientation sexuelle, aux femmes victimes de  violences spécifiques, y compris les viols, les mariages forcés, les atteintes à l’intégrité de  leur corps, la traite d’êtres humains, ce qui revient à la stricte application de l’article L711- 2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) introduit par  la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile, en adéquation  avec la Convention d’Istanbul 

o Accorder le droit d’asile aux femmes persécutées en raison de leurs actions ou de leurs  idées en faveur des droits et de la liberté des femmes, c’est-à-dire au nom des « opinions  politiques » au sens de la Convention de Genève de 1951

INCITER À LA SOLIDARITÉ AVEC LES MIGRANTS SUR LES TERRITOIRES

C’est sur l’ensemble des territoires que doivent être accueillis et insérés les migrants grâce à la  coordination des services de l’État, des collectivités locales à l’image des villes refuges, des associations  et des citoyens. 

Inciter la population à tisser des liens avec les migrants, la sensibiliser à l’accueil, lutter contre la  peur du réfugié par des actions concrètes (rencontres, discussions, échanges culturels, accueil en  week-end dans des familles volontaires... 

Répertorier les ressources locales (logements, enseignement du français, aide linguistique et  administrative, aide aux déplacements...) 

Reconnaître le rôle des associations dans la prise en charge des migrants dans la durée par des  financements adéquats et la reconnaissance de leur capacité d’initiative à travers des partenariats  entre l’État, les collectivités locales et la société civile 

Mieux former les travailleurs sociaux et renforcer l’enseignement du droit des étrangers et du droit  d’asile 

Faire pression sur les municipalités pour qu’elles déclarent leur ville « ville refuge » comme  Barcelone, Valence, Milan, Grande-Synthe, Grenoble et Paris 

Améliorer le partage des informations pour que les citoyens puissent s’engager auprès des réfugiés  en s’appuyant sur des réseaux d’associations 

ASSOUPLIR LA POLITIQUE D’IMMIGRATION 

Réviser la politique française de visas et réduire les obstacles au regroupement familial, dans le respect  des droits humains (articles 2, 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme). 

Régulariser les travailleurs sans papiers qui, via un nom d’emprunt, paient néanmoins des cotisations  sociales et des impôts, ainsi que les travailleurs clandestins installés qui n’ont d’autre choix que le  travail « au noir », représentant une concurrence déloyale aux travailleurs réguliers, et ce au bénéfice d’employeurs véreux.


Premier signataire :

Mathieu GITTON secrétaire de section de Belgique 


 

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