Thème : Santé
Notre système de santé en France est malade.
Notre pays souffre depuis plusieurs décennies de l’absence d’une politique de santé publique globale fixant les priorités et objectifs sur le moyen-long terme.
C’est la question de la prise en charge du soins et le sujet de la prévention.
La médecine de ville est victime de la démographie médicale et toutes les régions sont aujourd’hui concernées, en milieu rural comme dans nos villes et en particulier nos villes « moyennes » : manque de médecins généralistes, avec une diminution moyenne de 10 % dans la moitié des départements français au cours de ces dernières années, mais aussi de médecins spécialistes, de chirurgiens dentistes, etc.
Il faut confier aux infirmier(e)s et kinésithérapeutes des délégations de soins, et la possibilité de prise en charge et renouvellement de prescriptions « ciblées ».
Il faut aussi, enfin, contraindre à l’installation dans des secteurs déficitaires, dans nos villes et dans les communes de centralité en milieu rural. Cela doit s’accompagner d’une revalorisation de l’acte de consultation des professionnels médicaux.
Enfin, des installations en milieu non déficitaires ne doivent pas permettre un conventionnement par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM).
La médecine de prévention manque d’ambition nationale et de moyens depuis 30 ans et impose un engagement fort de l’État en terme de créations de postes médicaux et paramédicaux.
C’est vrai pour la médecine scolaire de la maternelle à l’université, la médecine du travail et de grandes campagnes nationales de prévention-information.
Enfin, la médecine hospitalière doit appeler toute notre attention dans un pays où cohabitent secteur public et secteur privé, où les coopérations existent parfois mais où elles doivent devenir plus fréquentes. Il faut aussi que les règles du jeu aujourd’hui au détriment de l’hôpital public, soient revues.
L’hôpital public doit garder sa place première dans notre système de santé, l’hôpital public étant le pivot de l’offre et de la prise en charge. La crise Covid l’a confirmé.
L’hôpital, qui avec l’organisation en Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT), doit avoir les moyens financiers de son action.
Il doit continuer à pouvoir satisfaire tous les secteurs de la santé : médecine, chirurgie, psychiatrie, maternité, gériatrie.
C’est donc la question des moyens financiers indispensables.
En terme d’investissement pour garantir la sécurité et les meilleures conditions d’accueil des soignants et résidents du médico-social. Le Ségur a apporté une réponse, mais insuffisante si l’on veut garantir la présence de nos hôpitaux dans chaque ville préfecture et sous-préfecture. Ce travail doit être mené à partir de l’hôpital support de GHT dans chaque département.
C’est aussi au sein de chaque GHT qu’il faut définir les spécialités maintenues, confortées ou abandonnées dans tel ou tel hôpital, car on ne peut assurer toutes les spécialités partout, notamment dans le domaine de la chirurgie, mais le garantir dans chacun de nos départements. Cela doit s’accompagner de l’amplification des consultations avancées, notamment à partir de l’hôpital support de GHT, ce qui se développe dans beaucoup de départements, et assurer les suites opératoires, prise en charge chimiothérapique, soins de suite et rééducation dans l’hôpital le plus proche du lieu de vie.
La permanence des soins ambulatoires, qui combine l'offre libérale et hospitalière afin de maintenir la continuité et l'égalité d'accès aux soins, est une mission consubstantielle de l’hôpital public mais ne saurait reposer sur lui-seul. En effet, depuis 2002 et la fin de l'obligation d'y participer pour les médecins libéraux, le Conseil national de l'ordre des médecins estime que moins de 40 % d'entre eux y participent. Ce phénomène qui amplifie encore davantage le rôle et la surcharge des praticiens hospitaliers est aujourd’hui devenu un repoussoir et devient le premier motif de départ dans le secteur hospitalier.
L’année 2022 est celle de tous les records de déficits de nos hôpitaux publics et structures médico-sociales.
Après des décennies d’économies comptables demandées aux établissement publics, avec la conséquence d’un sous-investissement dans l’innovation, la recherche, le numérique, le renouvellement des équipements et les ressources humaines, il est urgent de changer de logiciel et de refonder une grande politique de santé publique. A titre d'exemple, en 2018, plus de 80 % des établissements publics consacraient moins de 3 % de leur chiffre d'affaires à l'investissement, tout en connaissant des niveaux de vétusté inédits. Il est urgent d'investir sur le long terme dans l’hôpital public.
Se pose alors en urgence la question des modalités de financement.
Pour l’hôpital, abandonner pour certains secteurs, en dehors de la chirurgie, le financement à l’acte pour garantir les capacités de prise en charge, la nécessaire revalorisation salariale des professionnels, de l’agent hospitalier au médecin, de garantir les capacités de recrutement nécessaires à la qualité du travail et la sécurité de prise en charge. Ces tensions sur le recrutement sont devenues endémiques et viennent limiter l'offre de soins dans bon nombre de territoires et le résultat est sans équivoque, 30 % des postes de praticiens hospitaliers vacants, 5 % des postes d'infirmiers et 2,5 % des postes d'aides-soignants.
Dans le secteur médico-social, où l’on attend désespérément une refonte du financement du « grand âge » et de la dépendance, c’est revoir les modalités de financement de ce secteur, à domicile comme en établissement où l’on doit être attentif au reste à charge des résidents et des familles dans un contexte de stagnation-réduction du niveau des retraites et pensions. C’est évidemment agir pour garantir le plus longtemps possible l’autonomie, un gain d’une année d’autonomie, c’est 2 milliards d’euros d’économie de dépenses d’assurance maladie. Il est urgent d'agir pour nos aînés et d'anticiper le vieillissement de la population (42 %, c'est l'augmentation du nombre de personnes de plus de 75 ans entre 2015 et 2030).
Pour résumer les mesures urgentes à prendre :
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une loi de programmation de la santé et du Grand âge ;
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refonder l’accès aux soins à l’échelle des régions et des départements en s’appuyant sur les GHT. C’est vrai pour toutes les spécialités sans oublier la santé mentale et la psychiatrie ;
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revoir les modalités de financement, redonner la priorité à la recherche, l’innovation et le numérique ;
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accélérer la transition écologique des établissements, leur rénovation-reconstruction ;
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investir pour les professionnels de santé, renforcer et repenser les filières de formation, en partenariat avec les Conseils régionaux et revoir le statut ainsi que la rémunération des professionnels ;
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réinterroger la question de la gouvernance des tutelles, à savoir les Agences régionales de santé (ARS). Il faut sortir d’une déconcentration de l’État pour engager une vraie décentralisation, avec une évolution démocratique de la gouvernance où les élu(e)s doivent occuper une place première. On pourrait imaginer la présidence par le(la) président(e) de Région et/ou chaque élu(e) président(e) du conseil de surveillance de l’hôpital support de GHT de chaque département (ou leur représentant).
Notre service public de Santé est tourné vers la promesse républicaine d’égal accès aux soins dans une nécessaire approche d’excellence, d’efficacité, de sécurité sanitaire, d’humanité, dans le respect des droits et de la prise en charge des usagers qui doivent avoir toute leur place dans toutes les instances. Il est temps de lui redonner les moyens financiers et humains nécessaires à l'affirmation et au renouvellement de cette promesse, au cœur du pacte social de notre pays.
Signataires :
Marc Gricourt, maire de Blois, 1er Vice-Président Conseil régional Centre-Val de Loire, président FHF Centre Val de Loire, Secrétaire national du PS aux services publics et à la fonction publique