Priorité à l’école : la parole ministérielle discréditée

– Mercredi 1er février 2023

Yannick Trigance, secrétaire national à l'École, l'Éducation et l'Accès aux savoirs

Depuis son arrivée rue de Grenelle, le Ministre de l’Éducation nationale, Pap N’Diaye, ne cesse de réaffirmer à l’envi sa volonté de combattre les inégalités scolaires, d’aider les élèves en difficultés, d’améliorer les conditions de travail des enseignants, de restaurer l’attractivité du métier…
Cette parole ministérielle d’apparence généreuse et volontariste vient malheureusement se fracasser sur une terrible réalité pour l’École de la République : la réduction drastique des moyens annoncés dans le budget 2023.

Pire encore : au moment où partout en France les parents d’élèves se mobilisent contre les fermetures de classes et le manque de remplaçants, où les conseils d’administration des collèges et lycées subissent des coupes sombres de leur dotation globale horaire - la fameuse DHG - la communauté éducative découvre que près de 144 millions du budget 2022 « soutien de la politique de l’éducation nationale », soit l’équivalent de 3 000 postes d’enseignants, n’ont pas été dépensés par le Ministre !

Quel crédit accorder à la parole politique ministérielle quand elle est contredite par des mesures qui portent durablement atteinte à la qualité de notre système d’enseignement public ?

Comment accepter le prétexte invoqué d’une « baisse démographique » - véritable provocation - pour justifier ces économies qui, si elles avaient été utilisées, auraient permis une baisse des effectifs ou la création de postes de remplaçants qui font tant défaut partout sur le territoire ?

Et que dire du budget 2023 ? Là encore, avec la suppression annoncée de 667 postes dans le premier degré et de 481 postes dans le second degré, les promesses ministérielles se transforment en mesures régressives pour notre École.

Fermeture de classes, manque de remplaçants et de candidat.e.s aux concours de recrutements, augmentation des effectifs, lente érosion de la scolarisation des enfants de moins de trois ans en école maternelle, formation continue réduite à rien faute de moyens humains pour remplacer les départs en formation, manque de psychologues scolaires et d’enseignants spécialisés (RASED) : l’enseignement du premier degré – maternelle et élémentaire – subit de plein fouet l’orientation ultra-libérale impulsée par le tandem Macron/N’Diaye.

Dans le second degré, la baisse des dotations horaires globales se traduit par un recentrage sur les horaires « règlementaires » au détriment de dispositifs pédagogiques de remédiation, de classes bilingues, de travail en demi-groupes ou encore d’enseignements porteurs d’ouvertures culturelles et artistiques essentielles pour les élèves en difficultés qui souvent n’en bénéficient pas à l’extérieur, aggravant ainsi les inégalités.

Au total, ce sont 9 322 « Équivalents Temps Plein » (ETP) qui ont été supprimés depuis le premier quinquennat Macron : est-ce-là cette fameuse « École du futur » tant vantée par le locataire de l’Élysée ?

Une « École du futur » qui, vitrine gouvernementale oblige, génère cependant sur le terrain des fermetures de classes à tour de bras afin de pouvoir mettre deux enseignants dans les classes de Grande Section maternelle et de CP en éducation prioritaire et 24 élèves dans les CE1, sans aucune plus-value constatée à ce jour en terme de réussite scolaire pour les élèves.
Notre système éducatif mérite mieux que de grands discours et de belles promesses ministérielles contredites par des décisions porteuses de régressions et de remise en cause de l’égalité républicaine.

Lieu d’émancipation, d’excellence pour tous, d’acquisition d’une citoyenneté éclairée et fraternelle, notre École publique doit, au plus haut niveau de l’État, être respectée, soutenue et portée comme le talisman d’une société juste pour tous, exigeante pour chacun et qui ne laisse personne au bord du chemin.

Nous en sommes loin.

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