Projet politique de transformation de la société pour répondre aux défis environnementaux


Thème : Environnement


Contribution de la section PS 13e Est, Paris 

Le réchauffement du climat et son dérèglement, la biodiversité qui s'effondre et la raréfaction des matières premières  à l'échelle mondiale vont entrainer inexorablement des transformations en profondeur des sociétés européennes et  mondiales, quelle que soit la couleur politique des gouvernements. Les contraintes induites par le bouleversement  environnemental vont s'imposer à nos sociétés qui n'auront pas d'autres choix que de s'adapter en anticipant de  nouvelles façons de vivre. 

Tous les secteurs de l'économie sont concernés : énergie, industrie, agriculture, transports, logement, emplois privés  et publics, territoires, santé, culture, finance, éducation… 

Le parti socialiste, tout en réaffirmant ses valeurs d'égalité, de lutte contre les injustices, de solidarité, se doit  d'anticiper les transformations à venir et de proposer un projet politique pour une nouvelle société afin d'atteindre les  objectifs de baisse drastique des émissions de gaz à effet de serre, de rétablissement de la biodiversité et de sobriété dans l'usage des matières premières. 

Nous socialistes devons proposer une voie pour sortir du faux débat entre croissance et décroissance : il faut d’une  part cesser de considérer l’évolution du PIB comme l’indicateur structurant de nos politiques et, d’autre part, inventer  un nouvel horizon de progrès, rendre la transition écologique non seulement nécessaire, mais aussi désirable. Au  cours de cette transition, certains secteurs économiques croîtront (agriculture, culture…) et d’autres (énergies  fossiles, industrie automobile…) décroîtront : il nous faudra dès lors inventer des politiques d’accompagnement et  de redistribution adaptées pour les individus et les territoires concernés. Ce sont ces objectifs qui doivent guider la  définition de notre projet politique. 

Cette démarche doit s'accompagner d'une refondation sociale en protégeant celles et ceux qui ont basculé dans la  précarité et en aidant les personnes les plus vulnérables.  

Plusieurs axes peuvent ainsi être définis :  

  • Fixer un horizon avec de nouvelles façons de produire et de consommer, en visant à la fois la sobriété et la  réponse aux aspirations de mobilité, de loisir, de confort dans la vie quotidienne. Cela passera par des  dispositions législatives et réglementaires pour lesquelles le parti socialiste doit être force de propositions. 
  • Encourager les nouvelles technologies, la recherche fondamentale. S'appuyer sur les initiatives de toutes nature  allant dans le sens de l'environnement. Mener des expérimentations dans les territoires sur la base du volontariat,  qui pourront être généralisées en cas de succès. 
  • Sanctuariser les dépenses de protection sociale nécessaires pour venir en aide aux français qui en auront le  plus besoin, en leur permettant de s'adapter aux transformations de la société. 

Il s'agit d'éviter plusieurs écueils :  

  • Faire des propositions trop radicales qui ne tiendraient pas compte de la réalité de vie des français et qui  n'entraineraient pas leur adhésion. Elles seraient vouées à l'échec. 
  • Tenir un discours populiste ou simpliste, niant soit la gravité de la situation soit la complexité des réalités  économiques et sociales. 
  • Se satisfaire du rythme des progrès actuels qui ne sont pas à la hauteur des enjeux (par exemple, pendant le  dernier quinquennat l'objectif était de rénover énergétiquement 700 000 logements par an, alors qu'en réalité il  n'y a eu que 70 000 rénovations complètes par an, soit dix fois moins). 
  • Rester dans un discours vague sur les objectifs futurs ou les impératifs moraux sans aborder la stratégie  opérationnelle et les efforts de conviction qui doivent être au cœur de toute politique de transformation de la  société. 

Les propositions de la présente contribution s'inspirent en grande partie du PTEF (plan de transformation de  l'économie française pour décarboner nos activités), établi par le Shift Project, un groupe de réflexion ("think tank") qui a réalisé un travail remarquable en lien avec les professionnels de tous les secteurs concernés.  

Il s'agit plus généralement d'amorcer une réflexion qui doit s'appuyer sur les contributions d'un maximum d'acteurs  de la société en s'efforçant de penser aux conséquences sur la vie concrète des gens. C'est ainsi que le parti  socialiste deviendra pleinement crédible, son rôle consistant à inscrire dans un récit cohérent et mettre en œuvre  politiquement les mesures les plus efficaces proposées par les associations, groupes de réflexion et corps  intermédiaires.

Le but de cette contribution n'est pas d'être exhaustif. Ci-après, sont abordées des mesures concrètes dans 3 thèmes  du quotidien : les transports, le logement, les territoires, complétées par des mesures générales transversales. 

Les transports 

Le secteur des transports est la première source d’émissions de gaz à effet de serre (GES) en France, avec près de  30 % des émissions totales. Les mesures à prendre pour réduire ces émissions doivent utiliser les incitations fiscales  pour les transports peu polluants et les taxes pour les transports polluants, en utilisant également la législation et  l'évolution des normes dès qu'une solution apparaît viable et pertinente. En amont, l’État doit amplifier la prise de  conscience qu'un changement radical est indispensable pour la sauvegarde de nos modes de vie. Parmi ces  mesures :  

▪ Augmenter le transport des marchandises par train et par transport fluvial en les rendant fiables et en finançant  les infrastructures par une écotaxe sur le transport par route. Créer les infrastructures permettant d'assurer la  livraison des derniers kilomètres par des vélos cargo électriques, ce qui suppose de créer les infrastructures  nécessaires (cyclo-logistique).  

▪ Intensifier le passage aux véhicules électriques en parvenant au plus tôt à l'objectif européen d'une station de  recharge tous les 60 km le long des principaux axes routiers.  

▪ Réduire le parc de véhicules et les distances parcourues :  

Réduire drastiquement l’étalement urbain et limiter les distances domicile-travail, en revoyant les règles  foncières pour lutter contre l’artificialisation des sols et en développant des politiques ambitieuses en faveur  du logement social. 

Encourager toutes les formes de mutualisation des voitures, notamment dans les copropriétés et les villages  ruraux, encourager l'autopartage et les locations de voitures électriques bon marché autour des gares et  aéroports 

Encourager le covoiturage de courte distance (en particulier pour joindre les lieux de travail et les  commerces) en créant des files réservées sur les voies rapides, des parkings gratuits pour les covoitureurs. 

Encourager la gratuité des transports en commun ville après ville (35 villes en France ont déjà des transports  en commun totalement gratuits) et le télétravail, en prêtant attention aux risques liés à l’étalement urbain.

▪ Etablir une forte écotaxe sur les lignes aériennes intérieures lorsqu'une solution ferroviaire alternative existe en  moins de 4 h et affecter les montants récoltés au développement des transports en commun  

▪ Augmenter l'efficacité énergétique : réduire le poids des voitures et leur puissance en taxant lourdement les  véhicules les plus lourds et les plus consommateurs de carburant pour leur catégorie (type SUV), affecter ces  taxes pour subventionner l'achat des véhicules électriques d'autant plus qu'ils sont légers, encourager la mise  au point de véhicules plus légers.  

Le logement 

Il y a 37 millions de logements en France : 

  • En ce qui concerne les logements neufs : une réglementation thermique efficace rend le bilan carbone de leur  consommation pour le chauffage sur 50 ans bien inférieur au bilan carbone de leur construction. Les solutions  pour décarboner la construction existent (ciment et béton bas carbone, utilisation du bois). Il est nécessaire de réglementer leur utilisation. 
  • La grande majorité des logements de 2050 sont déjà existants. Il est nécessaire de massifier la rénovation  énergétique globale et performante. A cet égard, la récente réglementation rendant impossible les nouvelles  locations des passoires thermiques (DPE G en 2025, F en 2028 et E en 2034) est judicieuse en ce qu'elle incite  les propriétaires à réaliser des travaux d'isolation dans leur logement à l'occasion d'un changement de locataire  et même s'ils ne souhaitent pas les louer : la capacité à louer devient un critère de valorisation du logement. 
  • Pour les copropriétés, il faut aller plus loin en rendant obligatoire la rénovation thermique complète à l'occasion  de tout projet de ravalement. Le système des aides actuelles doit être développé pour les ménages modestes. 
  • Pour les logements individuels, les aides et possibilités de prêt doivent être massives, en faisant en sorte que le  coût annuel de remboursement du prêt soit égal à l'économie de chauffage réalisée. Le principe actuel d'aider de  façon plus importante les ménages modestes doit être poursuivi en remontant les plafonds de revenus.  
  • Les aides de toute nature doivent être conditionnées à l'utilisation d'isolants biosourcés, ces matériaux jouant le  rôle de stockage du carbone. 
  • Utiliser au mieux les logements déjà bâtis permettrait de réduire les besoins en construction neuve. La rénovation  complète des bâtiments doit être une option d'étude obligatoire pour réduire le nombre de destructions /  reconstructions.

Les territoires 

Une grande partie des gains d'efficacité énergétique ont été perdus par un développement urbanistique incontrôlé.  Si les logements sont devenus mieux isolés et le transport automobile plus efficace énergétiquement, nombre de  nouveaux logements ont été construits loin des lieux de travail et de commerce, annulant une grande partie des  gains énergétiques obtenus par ailleurs. 

  • Les règles concernant les permis de construire doivent se renforcer pour tenir compte des impératifs  urbanistiques : proximité des réseaux de transport en commun, exposition aux conséquences du changement  climatique etc. 
  • Il est nécessaire d'introduire dans les textes législatifs des critères environnementaux plus contraignants dans  l'élaboration des plans locaux d'urbanisme (PLU). Par exemple, toute nouvelle artificialisation devrait être  obligatoirement compensée par la destruction de friches industrielles. 
  • En ce qui concerne la rénovation énergétique des logements, il serait utile d'instaurer des commissions d'arbitrage  et de recours lorsqu'il y a contradiction entre le respect du patrimoine et l'isolation thermique par l'extérieur.  
  • L'urbanisme doit être pensé avec la priorité absolue de réduire les trajets entre le logement et le lieu de travail, le  logement et les commerces, en rendant la vie en agglomération plus agréable et attirante. Il s'agit également de  créer les espaces nécessaires dans les villes pour la "cyclo-logistique" : prévoir des locaux à vélos ou des espaces  de parking extérieurs sécurisés pour les particuliers et les entreprises de transport. 
  • Des indicateurs et labels environnementaux sont à prévoir par territoire (commune, ville, département, région)  afin de créer une émulation et une attractivité vers les territoires les plus vertueux.  

Mesures générales 

  • Prévoir un observatoire gouvernemental qui collectera les données de tous types : bilan carbone des objets que  nous achetons et des activités que nous pratiquons, bilan des sources d'énergie que nous utilisons par secteur  (actuellement 80 % de l'énergie mondiale est issue du pétrole, du charbon et du gaz naturel), état de la  biodiversité en France, bilan par territoire de l'artificialisation des sols, bilan des ressources minières mondiales afin d'anticiper leur raréfaction le plus longtemps en avance. 
  • Lancer des actions d'information et de formation sur l'urgence environnementale dans l'éducation, auprès des  élus et dans la population générale. Cela favorisera fortement l'adhésion des français aux dispositions  législatives qui seront nécessaires pour réussir les changements sociétaux indispensables. 

  • Inciter les entreprises, comme certaines ont déjà commencé à le faire, à organiser chaque année une "journée  RSE" au cours de laquelle les employés sont mis à la disposition du tissu associatif afin de réaliser des actions  pour la protection de l'environnement.  

  • Evaluer l'impact environnemental de nos produits et prévoir l'obligation d'affichage du bilan carbone des produits  et services dans les commerces et les publicités, sous la forme d'une notation semblable au Nutri-score et à la  célèbre application Yuka (d'où la formule : créer un "yuka" du carbone). Cette mesure permettra à tous les  citoyens d'être acteurs de la transition écologique par leur politique d'achat. Les entreprises de production seront  ainsi incitées à revoir la conception de leurs produits pour baisser leur bilan carbone, afin d'espérer pouvoir les  vendre. Une telle politique serait en outre favorable à la réindustrialisation européenne, sur la base de normes  sociales et environnementales ambitieuses. 

  • Mettre sur pied, si possible au niveau européen, des autorisations de mise sur le marché pour tous les  équipements coûtant plus de 500 €, ce seuil étant appelé à baisser, les critères d'acceptation étant : durée de  vie, simplicité de conception, réparabilité, possibilité de recyclage, bilan carbone de leur fabrication (de la mine  à la sortie d'usine) et de leur transport. Au départ, les critères pourront être peu exigeants, mais ceux-ci se  renforceront de façon continue avec un préavis suffisant pour que les industriels puissent s'adapter. L'objectif  sera d'en finir avec l'obsolescence programmée et le renouvellement trop rapide des objets. 

  • Prévoir un observatoire de l'emploi en relation avec la politique environnementale. En effet, les mesures à  prendre diminueront le nombre d'emplois dans certaines industries et services et l'augmenteront dans d'autres.  Les besoins en compétences et savoir-faire vont être modifiés en profondeur. Un observatoire est nécessaire  pour recueillir les données sur les secteurs qui vont croître et ceux qui vont décroître, les métiers concernés, les  formations actuellement disponibles et celles qu'il s'agit d'étoffer. Il devra être en mesure de répondre à la  faisabilité de certaines mesures. Par exemple, s'il s'agit de multiplier le nombre de rénovations énergétiques des  logements, encore faut-il que le nombre de professionnels disponibles soient au rendez-vous. 

Il y a urgence. Nous appelons à la mise en place sans attendre d'un groupe de travail au sein du parti socialiste,  ouvert à tous les militants, qui soit un lieu de mise au point de mesures politiquement réalistes susceptibles de se  transformer en propositions de loi portées par les élus socialistes, ou plus tard en éléments de programme en vue des présidentielles de 2027.


Première signataire :

Bérangère Aïchoun-Baptiste, Section PS 13ème Est

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