Réconcilier le Parti Socialiste avec les classes populaires : un impératif pour éviter la dérive vers l’extrême droite


Thème : Réconcilier le Parti socialiste avec les classes populaires


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Depuis trop longtemps, un fossé s’est creusé entre le Parti Socialiste et les classes populaires. Ce fossé n’est pas apparu par hasard : il est le fruit de choix politiques qui ont éloigné le parti de sa base historique, au point que les ouvriers, les employés, les travailleurs du quotidien ne s’y reconnaissent plus. Ce désamour se traduit par une abstention massive ou, pire, un vote croissant pour l’extrême droite, qui capte désormais cette colère et ce sentiment d’abandon. Il est urgent d’inverser cette dynamique en retrouvant une ligne politique claire, sociale et populaire.

Un constat sans détour : le PS est devenu un parti d’élus et non plus un parti du peuple

Le Parti Socialiste a perdu pied. Il ne parle plus aux ouvriers, aux précaires, aux habitants des zones périphériques. Pendant des années, il a donné l’impression d’être un parti de technocrates, préoccupé par la gestion plus que par la transformation sociale. Ce n’est pas un hasard si tant de travailleurs considèrent aujourd’hui que la gauche “ne fait plus rien pour eux”.

Les erreurs passées sont nombreuses :

  • L’adhésion à une politique économique libérale, qui a fragilisé les protections des
  • L’oubli des luttes salariales et des conditions de travail, au profit d’un discours parfois trop centré sur des enjeux
  • L’abandon des territoires ouvriers et ruraux, laissant place à un désert social et à un sentiment d’abandon.

Face à cela, la droite et l’extrême droite ont su s’engouffrer dans le vide laissé par le PS, en détournant la colère populaire pour la transformer en ressentiment identitaire. L’extrême droite n’a pas conquis ces territoires par adhésion à son programme, mais par défaut, parce que la gauche n’y était plus.

Ayant toujours assuré des fonctions professionnelles en parallèle à mes fonctions d’élu, je sais de quoi je parle. Depuis plus de dix ans, je suis ouvrier du transport, et je vois, jour après jour, cette dérive s’accélérer. Dans mon milieu professionnel, dans les discussions entre collègues, dans la réalité du terrain, il est impossible d’ignorer ce phénomène : le vote extrême, et particulièrement le vote d’extrême droite, progresse à une vitesse inquiétante. Pourquoi ? Parce que les travailleurs ne se sentent plus écoutés, plus protégés, et que la gauche leur semble désormais un lointain souvenir.

 

Pourquoi les classes populaires se détournent-elles du PS ?

1.    Un sentiment d’abandon social

  • La baisse du pouvoir d’achat frappe en premier lieu les classes modestes. Le prix de l’énergie, du logement et des produits de première nécessité s’envole, pendant que les salaires stagnent.
  • La précarisation du travail, avec l’uberisation et la généralisation des contrats courts, touche de plein fouet les employés et ouvriers.
  • Les services publics se dégradent, notamment dans les transports, la santé et l’éducation, laissant les plus vulnérables sans solutions.

2.    Une fracture culturelle et politique

  • Pendant des années, le PS a donné l’impression de parler à une frange urbaine diplômée, en oubliant les travailleurs et les habitants des petites villes et des campagnes.
  • Son discours, parfois perçu comme moralisateur, a creusé un fossé avec ceux qui attendent des réponses concrètes et immédiates.
  • L’extrême droite a su occuper cet espace en adoptant un discours plus direct et en se présentant comme un “parti du peuple”, alors qu’il ne fait qu’instrumentaliser la colère sociale.

3.    Un manque de clarté dans le positionnement politique

  • Le PS a souvent donné l’image d’un parti hésitant, oscillant entre un réformisme tiède et des alliances floues.
  • Cette absence de lisibilité pousse de nombreux électeurs à se tourner vers des forces qui affichent une ligne plus tranchée, même si elles ne défendent pas réellement leurs intérêts.

 

Un Parti Socialiste au service des travailleurs : un impératif, pas un slogan

Si le PS veut retrouver sa place auprès des classes populaires, il doit cesser de donner l’impression qu’il hésite sur tout et proposer un projet clair, ancré à gauche, tourné vers les travailleurs et les précaires.

1.    Un programme économique et social offensif

  • Augmentation immédiate des salaires et des pensions, notamment dans les secteurs où les travailleurs sont sous-payés.
  • Encadrement des prix des biens de première nécessité (énergie, logement, alimentation) pour redonner du pouvoir d’achat aux ménages modestes.
  • Fin de la précarisation du travail en interdisant les abus des plateformes numériques et des contratscourts répétés.
  • Investissement massif dans les services publics, notamment dans les transports et la santé, pour garantir l’égalité d’accès.

2.    Un parti qui parle un langage clair et accessible

  • Le PS doit sortir des discours abstraits et revenir à des formulations simples, qui parlent au quotidien des travailleurs.
  • Il doit être présent sur le terrain, dans les usines, les entrepôts, les gares, pas seulement dans les débats télévisés et les amphithéâtres universitaires.
  • Il doit renouer avec une culture du militantisme populaire, au plus proche des préoccupations réelles des citoyens.

3.  Un engagement fort sur la sécurité et la justice sociale

  • Ne pas laisser l’extrême droite capter les enjeux de sécurité : la délinquance et les incivilités touchent d’abord les quartiers populaires, il est légitime d’y répondre sans démagogie.
  • Réinvestir dans une police de proximité qui protège, plutôt que d’opter pour une logique uniquementrépressive.
  • Lutter contre toutes les formes d’exploitation et de dumping social, qui créent des tensions et des injustices entre travailleurs.

 

Un problème de représentativité dans les assemblées

Un autre enjeu majeur qui explique la déconnexion du Parti Socialiste avec les classes populaires estle manque criant de représentativité au sein des assemblées. Les ouvriers, les employés, les travailleurs des classes populaires et moyennes sont quasi absents des bancs parlementaires, des conseils régionaux et municipaux. Trop souvent, les élus proviennent des mêmes milieux sociaux,souvent diplômés des mêmes grandes écoles, avec des carrières construites loin des réalités du monde ouvrier. Comment prétendre défendre les travailleurs si ceux-ci n’ont pas leur mot à dire dans lesinstances de décision ?

Il est essentiel que le PS favorise l’émergence de candidatures issues du monde du travail, de l’industrie, des services, des transports, des hôpitaux, pour que ceux qui légifèrent connaissent réellement la vie des Français qu’ils représentent. Aucune politique ne sera crédible si elle est pensée par des élites totalement déconnectées du quotidien des ouvriers et des employés. Redonner touteleur place aux classes populaires dans les assemblées, c’est un impératif démocratique et une condition indispensable pour reconstruire un Parti Socialiste réellement populaire.

 

Conclusion : retrouver le chemin du peuple, sans ambiguïtés

Le Parti Socialiste ne peut pas espérer reconquérir le pouvoir s’il ne reconquiert pas d’abord les classes populaires. Cela exige une rupture avec les errements du passé, une parole forte, une action concrète et un engagement total auprès des travailleurs.

Les électeurs de la classe ouvrière ne demandent pas des discours creux ni des compromis flous. Ils attendent des réponses claires sur leurs salaires, leurs conditions de travail, leur avenir. Soit le PS répond à ces attentes, soit il continuera à se vider de sa base populaire au profit des extrêmes.

L’histoire du socialisme est celle du peuple. Il est temps de lui rendre cette place.


Contributeurs : Stéphane Gemmani


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