Retraites : une réforme de justice pour en finir avec le totem de l’âge légal !


Thème : Retraites


 

La question des retraites et des réformes qui y sont associées reste aujourd’hui un enjeu fondamental, tant pour des raisons de justice sociale que pour l’équilibre financier de notre pays. Notre parti doit adopter une position claire, responsable et ambitieuse afin de répondre aux attentes légitimes des Français tout en garantissant la pérennité de notre système de retraite.


Durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et au cours de la campagne présidentielle de 2022, le Parti Socialiste a porté un message clair : l’âge légal de départ à la retraite ne doit pas être repoussé au-delà de 62 ans. Il serait incohérent et dangereux de revenir sur cette position fondamentale sur un coup de tête ou sous la pression d’une petite poignée de décideurs. Le soutien à la retraite à 60 ans dans le cadre de la NUPES et du NFP, tel qu’il a été évoqué par certains de nos alliés, ne peut pas constituer une solution de compromis valable à court terme.

Notre parti doit rester fidèle à une ligne cohérente. Nous ne pouvons pas nous laisser entraîner dans une surenchère politique qui, à force de promesses irréalistes, finirait par nous décrédibiliser.

Nous devons être conscients des avancées que nous avons déjà réalisées. La réforme Touraine, mise en place en 2014, est un compromis responsable qui a permis d’établir des règles claires et progressistes. Cette réforme a permis d’introduire des mesures pour les carrières longues et de garantir un départ à 60 ans pour ceux ayant commencé à travailler tôt (800 000 personnes ont déjà pu partir à la retraite au nom des carrières longues).
Notre priorité évidemment dans la situation actuelle est d’obtenir l’abrogation de la réforme Borne, qui a repoussé l’âge de départ à 64 ans. Cette réforme, adoptée sans concertation et dans un contexte de grande tension sociale, est injuste pour de nombreuses catégories de travailleurs. Nous devons donc revenir à 62 ans comme âge légal de départ, tout en réaffirmant les acquis de la réforme Touraine de 2014.

Cependant, il ne s’agit pas seulement de revenir en arrière. Nous avons besoin d’une réforme des retraites qui soit plus ambitieuse et plus juste, c’est ce que nous souhaitons montrer au travers de notre contribution. Nous devons aller au-delà de la simple question de l’âge de départ à la retraite, qui ne peut pas être la seule variable d’ajustement pour garantir l’équilibre du système.

Ce qui doit primer, c’est la reconnaissance des efforts fournis au cours de la vie professionnelle. En fonction de la durée de cotisation, nous pourrions ainsi permettre à chaque travailleur de partir en retraite plus tôt ou plus tard, en fonction de son parcours et de ses cotisations, ou de son choix, sans imposer de seuil arbitraire pour tous. Un assuré qui souhaite partir plus tôt en retraite quitte à supporter une décote sur sa pension, doit pouvoir le décider librement.

Nous sommes favorables à l’ouverture de la réflexion vers un système généralisé de la retraite à points, qui permettrait à chacun de partir en fonction de ses cotisations et de la durée effective de son travail, sans se voir pénalisé par des critères arbitraires comme l’âge.
Sous ce modèle, chaque travailleur accumule des points tout au long de sa carrière, ensuite convertis en pension de retraite. Il présente plusieurs avantages : il est plus équitable, plus transparent et plus flexible. Il permettrait également de mieux prendre en compte les périodes de travail partiel, de reconversion professionnelle ou d’autres spécificités. En outre, il est plus facilement ajustable aux évolutions démographiques et économiques.
La retraite à point présente également l’avantage d’ouvrir le champ des possibles dans la prise en compte de la pénibilité et des carrières hachées, notamment pour les femmes. La retraite à point permet d’envisager une modulation élaborée de la durée de cotisations nécessaires, en fonction de la pénibilité du travail exercé. Elle permet ainsi de répondre à l’objectif de préserver équitablement la possibilité à chacun de profiter de ses premières années de retraite en bonne santé. C’est aussi un véritable moyen d’enfin créer et déployer de nouveaux critères de pénibilité en phase avec des métiers actuellement invisibilisés ou dont la pénibilité n’est pas prise en compte. Les partenaires sociaux auraient une place prépondérante dans ce travail.

Nous devons œuvrer pour renforcer les dispositifs permettant de mieux prendre en compte la pénibilité mise à mal lors du premier quinquennat Macron. C’est une question de dignité quand près d’un quart des Français souffraient d’une limitation physique lors de leur première année de retraite en 2018, d’après le ministère de la santé.

Il faut également mieux prendre en compte les parcours professionnels atypiques, en particulier ceux des femmes qui ont souvent des parcours professionnels interrompus ou précaires, en raison de la maternité, des inégalités salariales ou de la discrimination sur le marché de l’emploi, sans oublier les travailleurs en situation de handicap.
Il en va de même pour l’emploi des seniors. Aujourd’hui, trop de travailleurs seniors se retrouvent à la marge du marché de l’emploi, avec des difficultés accrues à maintenir un niveau de vie décent. Il faut impérativement renforcer les dispositifs d’accompagnement pour ces travailleurs, en favorisant leur reconversion et en luttant contre les discriminations liées à l’âge.

Cela étant dit, il est essentiel que le système de retraite à points soit accompagné de mécanismes de solidarité, afin de garantir que personne ne soit laissé pour compte. La valeur du point devra être contrôlée et garantie, afin que le système de points ne se transforme pas en un système de rente privé où seuls les plus riches bénéficient d’une retraite confortable. La solidarité, au cœur de notre modèle de retraite par répartition, doit être intégrée dans ce modèle. Nous réaffirmons notre hostilité au système de retraite par capitalisation.

Notre parti a toujours été le porte-voix des travailleurs, des plus vulnérables et des plus précaires. C’est dans cet esprit que nous devons aborder la réforme des retraites : avec responsabilité, cohérence et audace. Nous devons travailler à une réforme qui mette enfin au cœur du système de retraite la durée de cotisation et non l’âge de départ, qui prenne en compte la pénibilité, l’emploi des seniors et les carrières hachées des femmes. Mais cette réforme doit aussi s’appuyer sur un principe fondamental : la solidarité. Car si nous perdons de vue cet objectif, nous perdrons toute légitimité à parler au nom des plus précaires. Nous avons une occasion unique de réinventer un modèle de retraite qui soit véritablement adapté aux réalités du travail au XXIe siècle. C’est cette ambition que nous devons défendre aujourd’hui, pour bâtir un avenir plus juste pour tous.


Contributeurs :
Dylan BENAUD, Fédération de la Sarthe
Lysandre MERLIER, Fédération de la Haute-Vienne
Mélanie BALSON, Fédération de la Côte d’Or
Arthur CHAMBON, Fédération du Rhône


 

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