Santé mentale : ce déjà si lourd héritage du Covid19

Par Maxime des Gayets, conseiller régional d’Ile-de-France, Secrétaire national aux Grandes transitions et aux relations avec les Think tank

Les perspectives de la prochaine rentrée scolaire sont intimement liées au taux de vaccination contre le Covid19 et à l’évolution des variants. Mais, il nous faudra, quoiqu’il en soit, affronter l’héritage déjà si lourd de cette pandémie ravageuse.

C’est ce qu’a tenu à rappeler, il y a quelques jours encore, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) au sujet de la « grande portée » provoquée par le Covid19 sur la santé mentale des populations.

Nous savions déjà que la bataille sanitaire ne s’arrêterait pas d’un claquement de doigt annonçant des jours heureux. Aux 112.000 morts déjà recensés dans notre pays s’ajoute en effet la cohorte de celles et ceux qui ont été abîmés par la maladie, éprouvés par une hospitalisation ou par un passage en réanimation. Ils devront, demain encore, être pris en charge et aidés dans leur convalescence.

Et puis, il y a ces personnes non encore vaccinées et cibles des prochaines contaminations, dont la jeunesse est un rempart bien fragile face aux formes de « covid long ». A la rentrée et pendant de nombreux mois, il nous faudra soigner ces corps et accompagner ceux qui souffrent de séquelles physiques provoquées par le virus. Les soignants devront bénéficier de moyens financiers pour y faire face parce que les besoins resteront criants, même lorsqu’ils ne feront plus la une des journaux.

Mais, comme l’exhorte justement l’OMS, il nous faut soigner les âmes aussi en soutenant ceux qui doivent faire face aux troubles neurologiques et psychiatriques produits par le coronavirus. Un malade sur trois en souffrirait dans les six mois suivant l’infection, selon l’étude publiée dans The Lancet. Si l’on rapporte cette proportion au nombre de Français qui ont contracté la maladie, cela représenterait déjà deux millions de personnes. C’est un chiffre considérable qui reste encore un impensé. Il n’épuise pourtant pas le sujet. Il faut aussi parler de toutes ces vies arrêtées, de ces études hachées par le confinement, de cette entrée sur le marché du travail de plus en plus incertaine, de la détresse qui a frappé les étudiants comme les plus âgés, les personnes seules et les familles monoparentales, de l’angoisse de toutes celles qui ont déjà basculé dans la précarité ou craignent de la vivre dans les mois qui viennent. On n’envisage pas sereinement l’avenir, on n’y prend pas part non plus, si le présent n’est fait que d’anxiété, de stress ou de dépression. La santé mentale, si souvent négligée, parfois perçue comme une maladie honteuse ou un signe de faiblesse, est un enjeu déterminant.

Comment y faire face ? En prenant la mesure de cette épreuve de long terme pour nos sociétés, en agissant rapidement pour lever toute stigmatisation sur ces questions et en acceptant d’en faire une priorité collective.

Repoussées en septembre prochain, les assises de la santé mentale et de la psychiatrie devront déboucher sur des mesures financières et organisationnelles fortes pour compenser la faiblesse actuelle du nombre d’acteurs et d’infrastructures psychiatriques ou psychologiques.

Les structures scolaires méritent aussi d’être activées. L’augmentation des services de soutien psychologiques dans les écoles et les universités constitue l’une des recommandations de l’OMS. Mais elle oblige à résoudre les « difficultés endémiques » de la santé scolaire sur lesquelles la Cour des comptes s’est penchée il y a tout juste un an : un tiers des postes de médecin dans l’éducation nationale (contractuels compris) sont vacants et le nombre de médecins scolaires a baissé de 15% en moins de 10 ans…

Plus largement, aucune sortie de crise pandémique ne pourra se dessiner dans l’ignorance des moyens attendus pour rétablir le bien-être de nos concitoyens. L’amélioration de la santé mentale de chacun nécessite la mobilisation des services publics, le renforcement du lien social, l’accès aux professionnels de santé, l’appui aux structures éducatives et culturelles, et le soutien à la solidarité du quotidien.

Le « Monde d’après » sera d’abord un moment de réparation pour ceux qui auront été fragilisés par l’épreuve. Les aider à aller mieux, n’est pas un petit sujet mais une partie de ce qui nous incombe pour espérer - demain - nous remettre collectivement sur pieds.

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