Thème : Forêt Bois
Pourquoi une nouvelle contribution sur les forêts ? Tout n’a-t-il pas déjà été écrit lors des contributions rédigées à chacun des précédents congrès ? peut-être ont-elles même été lues ?
Parce que les forêts représentent 30% des terres émergées de la planète, un tiers du territoire national (un quart en métropole) mais qu’elles ne font l’objet que de peu d’attention : pas de grand événement international porté par les Nations-Unies, tout au plus un « one forest summit » au Gabon, co-initié avec la France ; au contraire, les grands accords commerciaux se font le plus souvent au détriment des forêts qui sont éradiquées pour d’autres usages plus lucratifs… Et quand des politiques intéressantes sont initiées comme l’initiative européenne contre la déforestation importée, elles sont l’objet de manœuvres et marchandages qui en repoussent l’exécution.
Il faut dire que les forêts manquent de portage politique : pas de Ministre de plein exercice depuis… François Mitterrand ! Pourtant les forêts portent nos valeurs : laisser libre cours à une gestion libérale détruit à coup sûr ces espaces naturels, entraine des injustices sociales, notamment pour les populations locales, sans compter l’impact des catastrophes naturelles comme les feux de forêts qui touchent de façon disproportionnées les plus pauvres, réduit les services publics comme l’Office National des Forêts – et les récentes attaques contre l’Office Français de la Biodiversité en sont l’exemple le plus récent - . Des initiatives législatives transpartisanes récentes ont toutefois montré qu’il est possible d’avancer, pas à pas.
En matière de formation et de recherche, les forêts non plus ne semblent pas prioritaires, noyées au sein d’écoles au spectre plus large.
Les forêts répondent pourtant à de nombreux enjeux et sont sources d’opportunités : puits de carbone elles contribuent grandement à la lutte contre le changement climatique – à l’heure où l’on investit dans les nouvelles technologies de CCUS (carbone capture ustilisation and storage) rappelons-nous que nous disposons d’une version éprouvée : l’arbre -, réservoir de biodiversité, protectrices des sols et des ressources en eau, source d’énergie renouvelable, de matériau biosourcé bien souvent substituable aux plastiques – des laboratoires de recherche au MIT espèrent même cultiver du bois en laboratoire - , … les apports des forêts sont nombreux. Y compris en matière de santé publique puisqu’elles filtrent l’air pollué et produisent de l’oxygène ; elles apaisent également et des bains de forêts sont devenus des thérapies pour beaucoup.
Sources d’emplois en milieu rural elles sont bénéfiques à la cohésion territoriale. Pour cela elles devraient bénéficier de politiques industrielles volontaristes et audacieuses que les Comités Stratégiques de Filière ne suffisent pas à porter.
Tout cela n’est pas nouveau et les précédentes contributions « forêts » aux Congrès socialistes ont suggéré des solutions.
Mais aujourd’hui, l’heure n’est plus au développement des potentiels de la forêt : la forêt est malade : des incendies, des sécheresses, d’affaiblissements propices aux attaques de ravageurs. La tempête silencieuse dans nos forêts ralentit la croissance des arbres et la captation de carbone. Selon l’IGN la mortalité des arbres a doublé en 10 ans ! Les chercheurs alertent sur le fait qu’aucune espèce d‘arbre ne peut s’adapter aussi vite au changement climatique tel qu’il progresse aujourd’hui. Qui plus est, les forêts malades accélèrent celui-ci : par le carbone émis lors des incendies et par le carbone qui n’est plus capté. L’adaptation des forêts au changement climatique devient donc un enjeu majeur.
Le volet forestier de France 2030 : reboisement : faut-il raser nos forêts pour replanter des essences sensées supporter le climat envisagé à la fin de ce siècle ?
Le programme de recherche FORESTT, financé à hauteur de 40 millions d’euros, vise à contribuer à la préservation et à la gestion durable des forêts. Ce programme interdisciplinaire se concentre sur la transition socio-écologique des systèmes forestiers
La forêt dans le plan national d’adaptation au changement climatique : Le PNFB, qui s’étend de 2016 à 2026, concourt à la mise en œuvre des objectifs de la stratégie nationale pour la biodiversité et du PNACC.
Alors que faire ?
- Accroître les moyens de la recherche et faciliter le passage de l’innovation à la commercialisation
- Former aux nouvelles pratiques de sylviculture et hiérarchiser les usages du bois
- Renforcer le service public, ONF et OFB, pour s’assurer du suivi et de la mise en oeuvre
- Aider les propriétaires et gestionnaires dans la diversification des essences et modes de gestion appropriés
De nombreuses propositions déjà énoncées restent d’actualité. Les socialistes s’engagent ainsi à :
- Inscrire la forêt, dans sa multifonctionnalité, au cœur des projets des territoires et renforcer le lien société – forêt pour permettre une meilleure prise en compte et acceptabilité de ses différentes fonctions
- Valoriser les expérimentations forestières des territoires où ils sont en responsabilité
- Engager des contractualisations urbain/rural autour des services rendus par la forêt et concilier les sphères publiques et privées autour des usages forestiers
- l’accroissement des forêts françaises est bien souvent dû à la déprise agricole et cette forêt privée nouvelle s’ajoute la plupart du temps aux nombreuses forêts privées mal gérées : nous proposons de faciliter l’acquisition de forêts privées pour les inclure dans la forêt publique dont la gestion est exemplaire.
- créer au sein du Gouvernement un poste dédié à la forêt et la filière bois dans toutes ses dimensions et le doter de moyens d’action en appui sur les administrations et établissements aujourd’hui chargés de manière disparate de la forêt
- Pérenniser le service public rendu par l’ONF, qui gère 25% de la surface forestière nationale pour l’Etat et 11 500 communes forestières et fournit 40% de la matière première de la filière, ainsi que celui de l’OFB, grâce à un financement assuré, notamment autour des services rendus par celle-ci, ses missions d’intérêt général, et grâce à la valorisation des missions de ses agents. Valoriser sa fonction d’expérimentation dans un moment clé où la gestion forestière doit être régulièrement questionnée face au défi climatique.
- améliorer les conditions de travail des forestiers par une augmentation des effectifs, la lutte contre les accidents du travail et la valorisation salariale de ces métiers
- Valoriser la recherche pour une meilleure connaissance, notamment des forêts d’outre-mer, en particulier pour la préservation de leur biodiversité et leur adaptation aux changements climatiques
- Encourager les groupements de propriétaires forestiers qui utilisent des outils nouveaux de financement participatif pour gérer durablement, ensemble, des forêts ; encourager les groupements de petits producteurs sous forme coopérative notamment ; encourager les gestions les plus écologiques, en particulier privilégier chaque fois que possible la sylviculture sans coupe rase.
- Encadrer les coupes rases en les limitant à des cas particuliers, promouvoir une sylviculture irrégulière et une diversification des essences
- rétablir l’équilibre forêt-gibier partout où cela s’avère nécessaire pour permettre de régénérer les forêts
- Avoir une attention particulière aux forêts des territoires ultramarins. (Préservation de la biodiversité, travail avec les populations locales,…)
- Renforcer le pilotage national de la filière bois grâce à une gouvernance simplifiée (vers un cluster national de l’économie forestière) et un contrat de filière fort
- Valoriser la formation forestière en lui redonnant une place d’excellence
- Renforcer l'Enseignement-Formation, la Recherche et le Développement Forestiers ; en matière de formation, il s’agit également de développer les métiers et savoir-faire forestiers dont certains peinent aujourd’hui à trouver des candidats.
- Favoriser et financer la recherche et l’innovation pour permettre le passage au stade commercial des innovations en termes de substitution de la fibre bois aux autres matériaux non renouvelables
- Favoriser dans les territoires où ils sont en responsabilité l’accroissement de l’utilisation du bois dans les usages du quotidien, favoriser l’agro-foresterie et également les usages touristiques de la forêt pour ouvrir le milieu forestier à la connaissance du public
- Hiérarchiser les usages du bois pour prioriser le stockage de long terme
- Faire bénéficier la filière bois de la taxe carbone
- Réformer la fiscalité forestière dans un sens plus orienté vers l’innovation et l’activité économique plutôt que la rente, dans le respect des critères de développement durable et de gestion planifiée et collective, comme la coopération.
- Faire émerger une force européenne de lutte contre les incendies de forêts tant en termes de prévention – notamment par la valorisation de la forêt méditerranéenne – qu’en termes de moyens mis en commun au niveau de l’Union ; favoriser une politique commune de gestion des risques de la forêt (incendies, dépérissement, etc).
- Lutter au niveau mondial contre la déforestation, l’exploitation illégale des bois et pour les droits des populations vivant dans et par la forêt, notamment en se mobilisant pour une application étendue du règlement européen de lutte contre la déforestation importée.
- Faire émerger au niveau européen des moyens pour la recherche, en particulier sur l’adaptation des forêts au réchauffement climatique ; Permettre à l’ONF et l’INRAE d’être un élément moteur de cette politique européenne et d’expérimenter et d’orienter les gestions adaptées au changement climatique. Nécessité de travailler à moyen et long terme avec possibilité de révision.
- Promouvoir une politique européenne de développement du bois énergie respectueuse du renouvellement forestier
La forêt ne peut souffrir une gestion libérale qui ne tiendrait compte que de son exploitation à des fins financières, ni d’une absence de prise en compte du changement climatique : la forêt a besoin de social-écologie. C’est notre responsabilité de socialistes. « Trois mois à Paris et je m’embrouille dans les odeurs de la forêt. C’est le signal d’alerte. Lorsque je ne reconnais plus la démarche de la nature, je suis près d’ignorer celle des hommes. » écrivait François Mitterrand dans « La paille et le grain » : la forêt et les hommes ont un destin commun, à nous, socialistes, de faire de ce bien commun de l’humanité un point d’équilibre des politiques publiques, du territoire à la planète.
Contributeurs : Etienne Pourcher, ancien Maire et Conseiller Général des Vosges, secrétaire de section Nantes Est, PS 44
Chantal Jourdan, Députée de l’Orne
Dominique Potier, Député de Meurthe et Moselle
Mickael Weber, Sénateur de Moselle
Christophe Clergeau, Député européen, Secrétaire National Europe du PS, VP du groupe S&D au Parlement Européen
Eric Sargiacomo, Député européen, Conseiller régional de Nouvelle Aquitaine
Karine Gloanec-Maurin, Conseillère Régionale du Centre Val de Loire
Karim Benbrahim, Député de Loire-Atlantique, Premier Secrétaire fédéral PS 44
Sylvain Mathieu, Conseiller Régional de Bourgogne-Franche-Comté
Thierry Sieffer, Maire de Ranrupt, président du SIVU des Forêts communales de la Bruche, PS 67
Michel Forterre, Maire d’Avrainville, PS 88
Frédéric Léveillé Maire d’Argentan, Président de Terres d’Argentan Intercommunalité, PS 61
Stessy Speissmann-Mozas, Maire de Gérardmer, PS 88
Clément Deixonne, Animateur Fédéral JS 44, membre du bureau national délégué à la reconquête des classes populaires
Dylan Boutifla, secrétaire national aux relations internationales, PS 45
Dominique Michenot, PS 44
Frédéric Courleux, secrétaire fédéral Transitions agricoles et alimentaires PS 51
Niels Zwarteveen, section la Commune Paris 20
Olivier Leconte, conseiller municipal et communautaire, PS 76
François Colson, PS 44
Jean Reparet, PS 75
Maël Le Pillouër, secrétaire de section, PS 22
Nadine Le Pabic, PS 44
Véronique Bonne, PS 32
Marc Guiheneuf, PS 44
Malone Rolland, section de Belgique
François Thimel, membre de la CNCF, secrétaire fédéral PS 74
Nathalie Leblanc, PS 44
Geoffroy Verdier, Commission Nationale des Adhésions, PS 44