Taxe sur les superprofits : comment ça se passe comment chez nos voisins européens ?

Le 30 septembre 2022, les ministres européens de l’énergie réunis à Bruxelles se sont accordés sur la mise en place d’une « contribution temporaire de solidarité » sur les profits des entreprises de production et de raffinage de pétrole, de gaz et de charbon. Quelques semaine auparavant, c'était déjà Ursula von der Leyen, présidente de la commission européenne et António Guterres, secrétaire général des Nations Unies, qui appelaient à plus de justice dans le secteur de l’énergie en taxant « les profits du secteur des énergies fossiles pour les redistribuer aux pays victimes des impacts du changement climatique et aux populations touchées par l'inflation ».

Si une action au niveau européen semble se dessiner, en attendant sa mise en place, un dispositif de taxation au niveau français serait souhaitable pour venir la compléter et/ou la suppléer. En effet, la contribution envisagée par l'Europe ne s'appliquerait pas à certains secteurs d'activités comme le secteur bancaire ou le fret maritime, qui ont particulièrement dégagé des superprofits sur les derniers semestres. C'est notamment ce qu'a montré la mission flash de l'Assemblée nationale sur les entreprises pétrolières et gazières et celles du secteur du transport maritime. Celles-ci ont dégagé des profits exceptionnels pendant la crise qui a auditionné CMA-CGM, groupe maritime mondial de premier plan.

C'est pour ces raisons que certains de nos voisins européens ont déjà fait le choix d'instaurer une taxation sur les superprofits dans leur pays. Nous vous proposons un tour d'horizon de ce qui existe chez eux.

 

En Espagne

Mi-juillet, le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez a annoncé que les secteurs du pétrole, du gaz, de l'électricité et des banques seront soumis à des taxes exceptionnelles en 2023 et 2024. Cette mesure devrait permettre de récolter 7 milliards d'euros en deux ans. Ils serviront à financer diverses mesures sociales pour lutter contre la flambée des prix comme la gratuité des abonnements ferroviaires pour les trains de banlieue ou une revalorisation de 100 euros des bourses étudiantes.

Ces mesures, s'appliquant aux secteurs de l'énergie et des banques, viennent en complément de deux autres ensembles d’aides aux ménages et aux entreprises, décidées en mars et en juin dernier. Parmi ces dernières figurent :

  • Une subvention des carburants à la pompe de 20 centimes par litre (15 centimes payés par l’État et 5 par les pétroliers) ;
  • Une aide ponctuelle de 200 euros aux foyers modestes ;
  • Des baisses de la TVA et des tarifs préférentiels sur l’électricité ;
  • Des subsides au secteur du transport
  • Un plafonnement des hausses de loyer.

Toutes ces mesures permettront ainsi aux ménages de recevoir un soutien financier en cette période difficile.

 

Au Royaume-Uni

Le contexte est différent pour les Britanniques puisque le pays est producteur de pétrole et de gaz. Il existe d'ailleurs déjà un impôt de 40 % sur les bénéfices des compagnies britanniques ou étrangères produisant des hydrocarbures en mer du Nord. Fin mai, le gouvernement de Boris Johnson y a ajouté une taxe supplémentaire de 25 % sur la totalité des profits (portant le prélèvement global à 65 %).

Cette dernière mesure revêt un caractère temporaire, avec clause d'extinction dans la loi en fonction de l'évolution des prix du pétrole et du gaz. Ses recettes, estimées à 5 milliards de livres (5,7 milliards d'euros), sont cependant destinées à financer un chèque contre l'inflation à destination des ménages (un ménage sur huit recevra au moins 1 200 livres en 2022).

 

En Italie

Les Italiens ont fait le choix de viser les grandes entreprises du secteur de l'énergie. En mars dernier, le gouvernement de Mario Draghi a instauré une taxe de 10 % sur les profits exceptionnels des entreprises du secteur de l'énergie. Ces profits ont été réalisés grâce à la flambée des prix due à la guerre en Ukraine. Cette taxation des superprofits, réévaluée à 25 % cet été devrait permettre au gouvernement de récolter 10 milliards d'euros.

L'argent récolté grâce à ce nouvel impôt entend financer une série de mesures destinée à alléger la flambée des prix de l'énergie pour les ménages et entreprises. L'enveloppe comprend notamment un bonus de 200 euros pour 28 millions d'Italiens ayant des revenus inférieurs à 35 000 euros annuels.

 

En Grèce

Les sociétés de production d’électricité sont taxées à hauteur de 90 %, un amendement déposé en mai par le Ministère de l'Énergie grec. Il vise tous les revenus excédentaires de la période du 1er octobre 2021 au 30 juin 2022, en comparaison avec les revenus de la même période de l’année précédente.

Les recettes de cette taxation temporaire sont destinées à financer un chèque à destination des ménages contre l'envolée des prix de l'énergie.

 

En Allemagne

Le 4 septembre dernier, le gouvernement d'Olaf Scholz a annoncé vouloir mettre à contribution certaines entreprises énergétiques qui ont réalisées des profits exceptionnels grâce à l’explosion des prix du marché. Si le mot « taxe » n'est pas utilisé par le chancelier allemand, cette proposition permettrait notamment de financer une partie de son plan de 65 milliards d’euros d’aide aux ménages pour lutter contre l’inflation.

 

Lorsqu'on observe ce que mettent en place les autres pays européens, on se demande pourquoi la France traîne des pieds. Nous subissons toutes et tous l'augmentation des prix des produits de première nécessité, de l’énergie ou encore du carburant.

Du côté du gouvernement, rien ne présage pour l’instant une décision dans ce sens. Bien au contraire, sur la question concernant l’amendement sur la taxation des superprofits, le porte-parole du gouvernement français, invité des 4 Vérités sur France 2 le mardi 18 octobre, a préféré balayer le sujet. Olivier Véran annonçait à l’antenne que le gouvernement ne comptait pas « casser une dynamique fiscale sur les entreprises ». Ces propos font échos à ceux de Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie. Ce dernier martelait la veille de façon franche que l’amendement sur la taxation des superprofits ne sera pas retenu dans le budget 2023.

Pour que ce ne soient pas toujours les mêmes qui paient nous avons choisi, avec nos partenaires de la NUPES, de lancer une procédure de référendum d'initiative partagée. Nous voulons que cette question de la taxation des superprofits des grandes entreprises soit tranchée par les Françaises et les Français. Vous pouvez rejoindre notre appel !

Je rejoins l'appel

La proposition de loi


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