Thème : Décentralisation parisienne
Depuis plusieurs années, Paris s’est engagée dans une réforme profonde de sa gouvernance, en redonnant une place centrale aux arrondissements et en renforçant la proximité des décisions publiques. L’adoption du Pacte parisien de la proximité en 2021 et la mise en œuvre de l’Acte 1 de la territorialisation ont constitué une avancée majeure. Cette dynamique a permis aux maires d’arrondissement de jouer un rôle plus actif dans la gestion des politiques locales et d’adapter les actions publiques aux besoins spécifiques de chaque quartier.
Le développement de la Ville du quart d’heure, le déploiement des fonds d’animation locale, la territorialisation de la propreté et de la gestion de l’espace public, ainsi que la création de cellules de veille sociale ont démontré l’efficacité d’une approche décentralisée. L’Acte 2 de la territorialisation, voté récemment, vient approfondir cette transformation en donnant aux arrondissements plus de leviers budgétaires, décisionnels et opérationnels.
Mais pour que cette dynamique produise tous ses effets, il faut aller plus loin. L’enjeu est désormais d’ancrer cette réforme dans la durée, d’amplifier les moyens des arrondissements et de lever les blocages qui freinent encore leur pleine autonomie.
Cinq axes pour une décentralisation renforcée et durable
Consolider l’autonomie budgétaire des arrondissements
Le renforcement des enveloppes de souplesse, notamment en matière de propreté et d’entretien de l’espace public, a permis aux mairies d’arrondissement de mieux répondre aux attentes des habitants. Il faut désormais :
- Pérenniser ces dotations et élargir leur périmètre d’action à d’autres compétences (animation locale, solidarité, environnement).
- Expérimenter un budget globalisé pour certains arrondissements, leur permettant de répartir leurs ressources de manière plus souple en fonction des priorités locales.
- Donner aux mairies d’arrondissement plus de pouvoir sur la programmation des investissements dans les équipements de proximité, notamment les écoles, les crèches et les espaces verts.
Finaliser le transfert effectif de certaines compétences locales
L’Acte 2 de la territorialisation a ouvert la voie à une gouvernance plus locale, mais certaines compétences restent encore trop centralisées. Il est indispensable d’accélérer :
- Élargir la responsabilité directe des mairies d’arrondissement sur l’attribution des logements sociaux.
- Mise en place d’un « avis conforme » et non seulement un avis « consultatif » des mairies d’arrondissement pour les demandes de travaux d’urbanisme et des autorisations d’enseignes commerciales.
- La mise en œuvre du projet de territorialisation des collèges, en associant plus étroitement les maires d’arrondissement aux décisions concernant ces établissements.
- L’intégration complète des mairies d’arrondissement dans la gestion des dispositifs de solidarité locale, notamment les aides d’urgence et l’orientation des publics en difficulté.
Renforcer la participation citoyenne au niveau local
La territorialisation ne doit pas seulement concerner l’administration municipale : elle doit aussi se traduire par un renouveau démocratique. Nous proposons :
- D’institutionnaliser les consultations citoyennes d’arrondissement, en donnant aux habitants la possibilité de se prononcer chaque année sur un sujet local majeur.
- De repenser les conseils de quartier. Les instances permanentes discriminent en fonction du temps libre et il faut pouvoir faire évoluer l’exercice de la démocratie locale. Pour renouveler en profondeur la participation citoyenne, il faut imaginer des dispositifs plus souples, plus inclusifs et plus ancrés dans le quotidien des habitants.
- De garantir une transparence accrue sur l’action municipale locale, en publiant des tableaux de bord des services publics arrondissement par arrondissement.
Faire des arrondissements des laboratoires d’innovation locale
Chaque arrondissement a ses spécificités et ses besoins propres. Il faut leur permettre d’expérimenter des politiques adaptées à leur territoire :
- En leur donnant la possibilité de tester des réglementations locales, par exemple sur l’encadrement des loyers commerciaux ou la piétonnisation des rues commerçantes.
- En développant des pôles d’innovation urbaine dans les mairies d’arrondissement, pour favoriser la co-construction des projets avec les habitants et les acteurs locaux.
- En élargissant les marges de manœuvre budgétaires pour les mairies volontaires, afin qu’elles puissent expérimenter des dispositifs innovants en matière d’écologie, de mobilité ou de logement.
Ce point nécessite une évolution législative qui devra préparer et encadrer l’expérimentation de politiques publiques adaptées aux territoires.
Instaurer un véritable dialogue entre l’Hôtel de Ville et les arrondissements
Les maires d’arrondissement ont gagné en autonomie, mais leur relation avec la Mairie centrale doit encore évoluer vers un véritable partenariat. Nous proposons :
- De formaliser un conseil des maires d’arrondissement, qui serait consulté en amont de toutes les décisions majeures concernant Paris.
- De créer un pacte de confiance entre la Ville et les arrondissements, garantissant la stabilité des moyens alloués aux territoires sur plusieurs années.
- De développer des outils de suivi et d’évaluation des politiques locales, pour objectiver les résultats de la territorialisation et ajuster les dispositifs en fonction des retours du terrain.
Paris, ville pionnière d’une gouvernance locale renforcée
Les avancées des dernières années ont prouvé que plus d’autonomie locale signifie plus d’efficacité. Paris doit poursuivre et amplifier cette dynamique pour devenir un modèle de démocratie urbaine décentralisée, où chaque arrondissement dispose des moyens d’agir au plus près des habitants.
La fédération socialiste parisienne doit porter cette ambition et faire de la territorialisation un pilier de son projet municipal. Décentraliser, ce n’est pas fragmenter, c’est donner aux territoires les moyens d’être plus réactifs, plus justes et plus innovants.
C’est à cette condition que Paris restera une ville du quart d’heure vivante, inclusive et résiliente, à l’écoute de ses habitants et fidèle à ses valeurs de proximité et de solidarité.
Contributeurs :
Karim Ziady (Paris 17e, CN, Conseiller.e de Paris), Valentin Guenanen (Paris 14e, CF, Maire adjoint d'arrondissement), Didier Antonelli (Paris 14e, CA section, Maire adjoint d'arrondissement), Laure Aourir (Paris 17e, CA section, CF), Chloé Battault (Paris 14e, CA section), Cécile Bossavie (Paris 19e, CA section, Conseillère municipale), Arthur Courty (Paris 11e, CA section, CF, BF), Dominique Demangel (Paris 18e, CA section, CFC, CF, BF, CN, CNCF, BN), Afaf El kaoun Gabelotaud (Paris 18e, Adjoint.e à la Maire de Paris), Guillaume Eustache (Paris 8e, Secrétaire de section, CF, BF), Andrea Fuchs (Paris 19e, Trésorier.e Fédérale, Maire adjointe d'arrondissement), Michel Gelly-Perbellini (Paris 12e, CA section, SF), Franck Guillory (Paris Centre, CA section, Secrétaire de section, CF, BF), Kais Idriss (Paris 13e, CA section, SF, Maire adjoint d'arrondissement), Danielle Laquerriere (Paris 14e, CA section), Quentin Leclerc (Paris 14e), Erkan Mehmetoglu (Paris 14e), Hélène Mermberg (Paris 14e, CA section, CF, Maire adjointe d'arrondissement), Bruno Sat (Paris 14e, CA section), Nicole Tagger (Paris 14e), Roméo Tossou (Paris 14e), Yarmila Vesovic (Paris 14e)