Thème : Europe
« La contribution qu'une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques.. » Jean Monnet
Face au tourbillon tumultueux des crises inédites, sociales, écologiques et démocratiques, l’Union européenne se trouve au carrefour de son destin. Héritière d’un riche patrimoine culturel et intellectuel, elle doit désormais s'affranchir des dogmes libéraux pour s’élever vers une nouvelle utopie, guidée par les lumières renaissantes du progrès social et écologique. Ce projet ambitieux ne pourra réussir sans placer au cœur de ses préoccupations la jeunesse, l’éducation et l’innovation.
LA JEUNESSE, NOUVELLE BOUSSOLE EUROPÉENNE
Depuis les promesses flamboyantes de la stratégie de Lisbonne, les ambitions européennes en matière d'économie du savoir et d'inclusion sociale n’ont cessé d'être déçues, faute d’investissements suffisants et pérennes. Cettejeunesse, pourtant porteuse d’espérance, se trouve livrée à la précarité d’institutions éducatives érodées par une gestion libérale dévastatrice. Il est temps de redonner corps à cette ambition par une mobilisation sans précédent demoyens propres et une garantie financière solide, assurant à chaque État membre la capacité d’éduquer dignement ses jeunes. La création d’une véritable boussole du progrès devra structurer ces efforts, échappant enfin aux affres de l’austérité, pour que l’éducation, la recherche et la formation soient à jamais protégées des aléas des crises financières.
ERASMUS : UN SOUFFLE RENOUVELÉ D'INTÉGRATION EUROPÉENNE
Le programme Erasmus, symbole d’une génération éprise d’Europe, doit aujourd’hui retrouver son élan originel, devenant accessible à toutes les couches sociales et tous les territoires, y compris les plus isolés. À cette fin, l'Union doit instaurer une véritable égalité d'accès par une augmentation substantielle des bourses, par l’intégration des apprentis à travers un contrat d'apprentissage européen, et par l’inclusion d’une dimension sociale au processus de Bologne. La reconnaissance universelle des diplômes et la création de diplômes européens à part entière, de la licence au doctorat, marqueront une étape décisive vers une Europe des compétences pleinement réalisée.
RECHERCHE ET INNOVATION : UNE AMBITION REFONDÉE
La politique européenne de recherche, figée et répétitive, se doit d'être réorientée vers une science libre, exploratrice audacieuse des défis écologiques et sociaux contemporains. Face à la domination technologique desgéants asiatiques et américains, l’Europe doit retrouver le chemin de l’innovation disruptive, notamment dans les domaines des technologies vertes, de la santé et du numérique.
Cette révolution scientifique doit s’opérer dans une totale transparence et avec la participation citoyenne active, réduisant ainsi les inégalités territoriales pour une innovation inclusive.
LA GARANTIE JEUNESSE : UN ENGAGEMENT SOLIDAIRE
Le chômage des jeunes, fléau persistant au cœur de l’Union, exige une réponse européenne forte, claire etaccessible. La Garantie Jeunesse doit être simplifiée, transparente et proactive, atteignant ceux qui, trop souvent oubliés, demeurent invisibles aux dispositifs actuels. L'intégration d'une mobilité géographique facilitée par le développement du ferroviaire et une démocratisation réelle du Pass Interrail seraient des leviers puissants d'émancipation professionnelle et sociale.
L'ÉGALITÉ, PILIER DE LA JUSTICE EUROPÉENNE
Dans une Europe où 22,4 % des 18‐24 ans vivent sous le seuil de pauvreté, l'interdiction des stages non rémunérés est une exigence morale autant qu’une nécessité économique. Cette mesure, forte et symbolique, doit être accompagnée d’une obligation d'information claire sur les conditions de travail offertes aux jeunes. De même, unvéritable Pass culture européen doit voir le jour, octroyant à chaque jeune Européen les moyens concrets d'accéder à la richesse culturelle du continent.
LE MULTILINGUISME, ESSENCE DE L’IDENTITÉ EUROPÉENNE
Face à la prédominance délétère d'une langue unique, l’Europe doit revendiquer et promouvoir sa richesselinguistique et culturelle. Chaque citoyen européen devrait maîtriser au moins deux langues de travail de l’Union en plus de sa langue maternelle, et chaque étudiant européen devrait acquérir une maîtrise réelle d’une autre langue européenne que l'anglais. Une politique ambitieuse de traduction des œuvres européennes, le soutien accru à « Europe créative » et l'enseignement des langues minoritaires constitueront autant de leviers de cette ambition.
POUR UNE ECONOMIE DE LA CONNAISSANCE
L’économie de la connaissance est donc un enjeu majeur pour l’avenir de l’Europe. Il s’agit de valoriser le capitalhumain, la recherche, l’innovation, la culture et la créativité, qui sont les moteurs de la compétitivité, de la croissance et du bien‐être. L’Europe dispose d’atouts indéniables dans ce domaine, avec un patrimoine historique et culturelexceptionnel, un système éducatif de qualité, un réseau dense d’universités et de centres de recherche, une diversité linguistique et artistique. Mais elle doit aussi faire face à des défis importants, comme le vieillissement de la population, la concurrence internationale, la transition écologique, la fracture numérique ou encore le respect des droits d’auteur.
Pour relever ces défis, nous proposons les mesures suivantes :
Créer un espace européen de l’éducation et de la formation tout au long de la vie1, qui garantisse la mobilité des étudiants, des enseignants et des chercheurs, la reconnaissance mutuelle des diplômes et des qualifications, ledéveloppement des compétences clés pour le XXIe siècle, comme les langues étrangères, le numérique ou l’esprit critique.
Augmenter le budget européen consacré à la recherche et à l’innovation, pour atteindre 3% du PIB d’ici 20302, en soutenant les projets collaboratifs entre les acteurs publics et privés, les secteurs stratégiques comme les énergies renouvelables, la santé ou l’intelligence artificielle, les jeunes chercheurs et les femmes dans la science.
Renforcer le marché unique numérique, en garantissant l’accès universel au haut débit, en harmonisant les règlesfiscales et sociales pour les plateformes numériques, en protégeant les données personnelles et la vie privée des citoyens, en régulant les géants du numérique pour préserver la concurrence et la diversité culturelle.
Promouvoir la culture européenne, en augmentant le financement du programme Europe créative, qui soutient la création artistique et le secteur culturel et créatif, en favorisant la circulation des œuvres et des artistes au sein del’Europe et vers le reste du monde, en défendant le droit d’auteur et la rémunération équitable des créateurs.
Lancer un grand plan européen pour les industries culturelles et créatives (ICC), qui représentent plus de 7 millions d’emplois et 4% du PIB européen. Ce plan viserait à soutenir la reprise et la transformation écologique et numérique des ICC, à stimuler leur potentiel d’innovation sociale et territoriale, à renforcer leur capacité à exporter et à rayonner à l’international.
Avec ces mesures, nous voulons faire de l’Europe une grande puissance de l’économie de la connaissance, qui valorise son capital humain, sa diversité culturelle et sa capacité d’innovation. Nous voulons faire de l’Europe unespace d’échange, d’apprentissage et de création, qui favorise l’épanouissement individuel et collectif. Nous voulons faire de l’Europe un modèle de développement durable et solidaire, qui contribue au progrès de l’humanité.
Ces mesures nécessitent un financement important, mais aussi un investissement rentable pour l'avenir de l'Europe.nous proposons plusieurs sources de financement, qui reposent sur le principe de la solidarité européenne et de la justice fiscale.
D'abord, nous proposons d'augmenter le budget de l'Union européenne, qui représente actuellement environ 1% du PIB européen, pour le porter à 2% d'ici 2030. Cela permettrait de dégager des ressources supplémentaires pour financer les programmes européens liés à l'économie de la connaissance, comme Horizon Europe, Erasmus+,Europe créative ou le Fonds social européen.
Ensuite, nous proposons de créer des ressources propres pour l'Union européenne3, c'est‐à‐dire des recettes fiscales qui lui reviennent directement, sans passer par les contributions nationales. Parmi ces ressources propres,je propose notamment une taxe sur les transactions financières, une taxe sur les géants du numérique, une taxe carbone aux frontières et une contribution des multinationales basée sur leur chiffre d'affaires réel en Europe.
Enfin, nous proposons de renforcer le rôle de la Banque européenne d'investissement4 (BEI), qui est la banque publique de l'Union européenne. La BEI dispose d'une capacité d'emprunt et de prêt importante, qu'elle peutmobiliser pour financer des projets d'investissement dans l'économie de la connaissance, en partenariat avec les acteurs publics et privés. La BEI peut également émettre des obligations vertes ou sociales, qui sont des titres de dette destinés à financer des projets respectueux de l'environnement ou du bien‐être social.
Avec ces sources de financement, Nous voulons montrer que l'Europe est capable de se doter des moyensnécessaires pour réaliser ses ambitions dans l'économie de la connaissance. Nous voulons aussi faire en sorte que le financement soit équitable et solidaire, en faisant contribuer davantage ceux qui profitent le plus du marché unique et en soutenant ceux qui en ont le plus besoin.
« Unis dans la diversité » est la devise européenne. La connaissance et la valorisation de notre diversité est un combat clé pour lutter contre les nationalismes et promouvoir une citoyenneté européenne vivante, humaniste et fraternelle.
1 L'économie de la connaissance : définition et histoire (laculturegenerale.com)
2 Recherche et innovation (europa.eu)
3 Financement, aides et subventions | Union européenne (europa.eu)
4 L'économie de la connaissance en Europe – Synthèse de la conférence 2009 de la BEI sur l'économie et la finance (eib.org)
Contributeurs : Mathieu Gitton