UNIR - Féminisme : ne nous résignons jamais !


Thème : Engagement


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“Socialistes donc féministes”. Cette phrase nous guide. Nous l’avons clamé tant de fois, poing levés, espoirs chevillés au corps. Nous savons ce que nous devons à toutes celles qui nous ont précédées, celles qui se sont battues pour que cette phrase s’inscrive dans notre parti. Ce combat, nous devons le poursuivre pour que nos luttes féministes se concrétisent, que nous soyons aux responsabilités ou dans l’opposition.

La contribution féministe ‘Pour Christine et toutes les autres’, lors du précédent Congrès et la convention ‘Le temps des femmes’, première convention annoncée et lancée, prouvent que les volontés féministe du Parti socialiste sont toujours présentes et actives pour porter cette réfléxion et faire de notre parti, un grand parti féministe. Notre contribution s’inscrit dans cette Histoire, et souhaite toucher toutes celles et ceux qui ont la conviction que la lutte pour l’égalité entre les genres est vitale. Nous le savons “Il suffira d'une crise…”.

Les crises ont bien commencé, les droits des femmes ont reculé. En France comme à l’international, l’extrême droite est l’ennemie des femmes, qu’il s’agisse d’égalité des droits, d’égalité professionnelle ou de lutte contre les violences. L’extrême-droite instrumentalise et essentialise les sujets d’égalité femmes-hommes, en pointant des culpabilités pleines de préjugés. L’extrême-droite ne sera jamais féministe, et il est de notre devoir de féministes de les combattre.

Uni·e·s, nous accomplirons de grandes avancées. Gisèle Halimi nous l’a écrit “Ne vous résignez jamais !”

 

SOCIALISTES, DONC FÉMINISTES

Parce qu’un congrès nous permet de questionner notre parti et son fonctionnement, nous sommes conscient·e·s et déterminé·e·s du chemin qu’il reste à parcourir. “Socialistes donc féministes” doit s’inscrire dans nos pratiques internes. Nous devons être lucides sur le sexisme qui règne encore dans le monde politique, et dans notre parti, par les tendances fortes de perpétuer les phénomènes de “boys’ club”. Les circonscriptions très difficilement gagnables où sont positionnées les femmes, les accords avec les autres partis dans le cadre de listes paritaires effectués par les hommes socialistes qui se gardent les meilleures places et panachent avec les femmes venant des partis partenaires entraînant mécaniquement une relégation en fin de liste ou même une disparition des femmes socialistes : ces phénomènes bien connus continuent à exclure et mettre en difficulté les femmes au sein de notre parti. Ils sont inacceptables et doivent cesser.

Le changement dans les comportements, dans la place accordée aux femmes politiques, ne peut être uniquement le fait d’un sur-investissement des militantes et d’une vigilance de chaque instant pour plus de parité en interne. Nous travaillons sur des propositions claires, en lien avec des expertes et associations. Julia Cagé a proposé qu’au sein de l’Assemblée nationale et du Sénat, tout parti politique qui ne disposerait pas d’au moins 40 % de femmes au sein de ses élus se voit supprimer l’entièreté de ses financements publics. Cette proposition forte permettra de faire bouger les lignes de la géographie politique des femmes élues.

Dans le cadre d’accords électoraux, nous demandons l’établissement et le respect d’une Charte de l’égalité, engageant chaque parti. Soyons réalistes, soyons ambitieux.ses.

Dans notre parti, ce changement doit être porté par toutes et tous. Les hommes socialistes, des alliés féministes, doivent être conscients et acteurs de ce changement. Les formations contre les violences sexistes et sexuelles au sein de notre parti doivent être rendues obligatoires pour tous les militants, dans toutes les fédérations.

La commission de lutte contre le harcèlement et les violences effectue un excellent travail, il faut lui donner davantage de moyens. Être exemplaires en interne pour ensuite porter plus fort et plus loin nos combats féministes dans la société : cela est notre moteur d’action, le cap que nous fixons.

L’égalité femmes-hommes est l’affaire de toustes, expert.es ou non. Pour nous former à ces questions, nous proposons l’établissement d’une Assemblée annuelle, qui serait un espace de dialogue pertinent. Lancée par le Parti socialiste, l’objectif serait d’échanger avec les associations féministes et les partenaires de gauche pour partager les avancées, les urgences, les combats à porter ensemble.


LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES COMME PRIORITÉ

Les violences sexistes et sexuelles sont massives et structurelles. Elles concernent avant tout les femmes et les minorités de genre. En France, chaque année, près de 94 000 femmes âgées de 18 à 75 ans déclarent avoir été victimes d’un viol ou d’une tentative de viol, et dans 91 % des cas, l’agresseur est un homme de l’entourage, proche de la victime. Les femmes en situation de handicap sont particulièrement vulnérables, 80 % d’entre elles ayant déjà subi des violences, tandis que 85 % des personnes transgenres déclarent avoir été agressées au cours de leur vie.

Ces chiffres sont brandis en totem et clamés avec force à chaque manifestation. Or le Grand Soir de la fin du patriarcat n'a pas lieu. Au contraire, nous assistons au backlash post-Me Too. Les politiques publiques ne parviennent pas à mettre en place de véritables stratégies de prévention, et se contentent trop souvent de répondre aux urgences.

Les taux de classement sans suite des plaintes pour violences sexuelles (86%) et des viols (94%) sont invraisemblables. Ils rappellent aux femmes combien il est encore difficile que les faits soient reconnus. Ces chiffres mettent aussi en exergue le manque cruel de moyens de la Justice. Nous voulons porter l’ambition d’une grande loi cadre de lutte contre les violences faites aux femmes car ’il s’agit d’un continuum de violences. Il est urgent de consacrer des moyens à la hauteur des enjeux, en allouant deux milliards d’euros aux associations et structures d’accompagnement des victimes.

Repensons la justice pour offrir des réponses adaptées, en développant le recours à la justice réparatrice et en créant des instances spécialisées sur le modèle espagnol, intégrant les volets civil et pénal pour un traitement plus efficace des affaires de violences.

Le procès des viols de Mazan a déclenché une vraie déflagration dans l’opinion publique en France mais également à l’international, de la banalité des violeurs, de l’ampleur du phénomène, des preuves incontestables qui illustrent la domination masculine, l’impunité, et la culture du viol. Ce procès doit avoir des suites et comme à l’époque l’affaire Tonglet-Castellano appelé “procès du viol”, suite à la mise en lumière par Gisèle Halimi, il doit permettre des avancées au delà de son jugement. Il est de notre devoir de nous saisir de l’élan provoqué par l’immense courage de Gisèle Pélicot pour aller plus loin dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.

 

L’ÉDUCATION, COMME PREMIER VOLET DE PROTECTION

L’augmentation alarmante des violences au sein des couples adolescents montre à quel point les mécanismes de domination et de contrôle s’installent tôt dans les relations. Plus de 20 % des jeunes femmes de moins de 25 ans déclarent avoir déjà subi des violences de la part d’un partenaire ou d’un ex-compagnon, un taux supérieur à celui des générations précédentes. Parmi les plus jeunes générations, la préoccupation des enjeux de lutte contre les violences et d’égalité femmes-hommes recule chez les jeunes hommes. Nous devons enrayer ce phénomène. Face au poids de la toile, de la pornographie et de la sexualisation omniprésente du corps des femmes, l’éducation doit jouer un rôle central. Il est essentiel d’instaurer des cours obligatoires de sensibilisation aux violences sexistes dès le collège, afin de promouvoir une culture du consentement.

La sécurité de toutes les femmes et des minorités de genre doit être garantie dans l’espace public, qui reste aujourd’hui un lieu d’exclusion pour beaucoup, principalement investi par les hommes. Repenser l’aménagement urbain pour offrir des espaces plus sûrs et accessibles, en particulier pour les femmes et les personnes transgenres, est une nécessité. Cela passe par des infrastructures accueillantes mieux éclairées, des dispositifs d’alerte renforcés et des zones de repli sécurisées.

Investir l’espace public c’est aussi de façon très symbolique et si importante pour la connaissance de notre matrimoine, nommer des rues, des places avec des noms de femmes: pour que les noms de voies fassent entendre leurs voix et connaître leurs noms. Notre matrimoine doit être rappelé et valorisé, il permet de montrer aux petites filles et aux femmes qu’elles peuvent rêver plus grand, que d’autres avant elles ont montré la voie.


LA POURSUITE DE LA LUTTE POUR L’ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE

Les inégalités salariales restent profondément ancrées, aussi bien dans le secteur privé et public : 23 % des femmes déclarent avoir déjà subi un écart de salaire à poste égal par rapport à un collègue masculin, un chiffre qui grimpe à 34 % chez les cadres.

Cet écart de salaire injuste, pèse sur l’autonomie des femmes, il pèse sur leurs carrières, ce sont elles qui s’arrêtent de travailler dans un couple, ce sont elles qui ont des carrières hachées, des temps partiels non désirés, et qui en fin de carrière vont avoir des petites retraites qui vont encore les précariser. L’émancipation des femmes, l’autonomie des femmes passent aussi par cette égalité professionnelle.

Pour remédier à ces inégalités persistantes, il faut renforcer l’exigence d’égalité dans les entreprises en relevant progressivement le seuil minimal de conformité, actuellement fixé à 75 %, de cinq points par an. De plus, la généralisation de l’éga-conditionnalité, qui subordonnerait l’octroi de subventions publiques au respect effectif de l’égalité salariale, permettrait de passer d’un principe affiché à une réalité contraignante.

Une société juste et équitable ne peut plus tolérer que ces écarts perdurent : il est temps d’en faire une priorité politique et un véritable combat économique.

 

“LE MONDE D’APRÈS” POUR LES FEMMES

Nous avons rêvé du “monde d’après”, nous avons pensé l’égalité et l’importance de certains métiers. Et pourtant, le “monde d’après” ressemble encore trop au “monde d’avant” Attelons-nous à écrire ce monde, en donnant aux femmes toute la place qui est la leur.

La crise sanitaire a mis en lumière l'importance cruciale des métiers du care – aides-soignantes, infirmières, aides à domicile, femmes de ménage – tout en révélant leur précarité et leur pénibilité. Elles étaient en première ligne, ont été applaudies pendant le confinement. Pourtant, le “monde d’après”, n’a apporté aucun changement significatif pour ces professions, qui restent sous-payées et insuffisamment reconnues. Il est temps d’opérer un véritable changement philosophique et politique : ces métiers ne doivent plus être perçus comme des emplois précaires, mais comme des piliers essentiels de notre société. Leur attractivité passe par une revalorisation salariale et par des conditions de travail améliorées, notamment par la garantie d’un départ à la retraite anticipée pour les aides-soignantes et par une réflexion sur la semaine de quatre jours afin d’alléger la pénibilité.

Dans ce « monde d’après », la reconnaissance du rôle des femmes dans nos quartiers doit aussi être valorisée. Lors des émeutes urbaines, les parents, et finalement principalement les mères célibataires ont été injustement pointées du doigt. Ce sont pourtant elles qui portent sur leurs épaules le lien social dans les quartiers, dans les associations, dans les collectifs. Ce sont elles aussi qui élèvent seules leurs enfants et travaillent souvent en horaires décalés. Le monde d’après les émeutes a continué comme avant, sans que la République mesure totalement le besoin d’agir les quartiers prioritaires. Agir est absolument nécessaire et il est également de notre devoir de valoriser ces femmes et de les soutenir parce qu’elles contribuent au quotidien au vivre ensemble dans nos quartiers.


CONNAISSONS NOTRE FORCE, LES FEMMES

Dans cette culture patriarcale qui a si longtemps considéré les femmes comme une minorité, rappelons que nous sommes 52% de l’humanité. Si chaque jour nous combattons les stéréotypes sexistes qui nous rabaissent, nous invisibilisent, nous avons aussi une immense capacité à agir et changer la société. L'histoire des femmes continue de s'écrire. Nous sommes fortes d'un passé riche de modèles féministes inspirants. Et comme d'autres avant nous, soyons capables de changer le monde, de bousculer l'ordre établi. Nous avons cette force et elle nous rassemble.

La grande cause nationale annoncée par le Président de la République a été très peu suivie d’effets et de réels résultats en France. Oeuvrons collectivement pour que la France soit à l'avant garde de l’égalité femmes-hommes grâce à un engagement et un programme politique fort et fer de lance.

Notre réflexion féministe s’inscrira toujours dans un corpus idéologique émancipateur et progressiste. Féministes matérialistes, nous affirmons notre volonté d’abolition de la prositution, tout en confirmant le besoin de protection. La loi de 2016 est à renforcer, pour mieux lutter contre les réseaux de proxénétisme et les parcours de sortie doivent être revalorisés. La France a été dans l’histoire être un modèle en matière de philosophie politique, de droits et d’émancipation, nous voulons à nouveau être un pays précurseur dans la réalisation de l’égalité réelle.

Si notre approche est universaliste, nous savons et intégrons dans notre réflexion l’apport des approches intersectionnelles qui permettent de comprendre le cumul des discriminations. Comprendre pour porter ensemble l’égalité entre toutes et tous et pour lutter contre toutes les discriminations, contre le racisme et l’antisémitisme. “Ensemble on nous opprime les femmes, ensemble révoltons-nous”.

Universalistes, nous sommes également internationalistes et nous voulons œuvrer pour la liberté et l’égalité des femmes dans le monde. Le courage des femmes Iraniennes et des Afghanes est immense. Partout où sont perpétrés des viols de guerre, partout dans le monde où nos sœurs luttent, nous nous tenons à leurs côtés. En tant que féministes et socialistes nous devons relayer leurs luttes si fondamentales contre l’obscurantisme et pour les droits. La médiatisation de leurs voix est précieuse, dans un monde interconnecté où l’information franchit les frontières, elle est absolument nécessaire pour faire avancer leur combat et permettre d’affirmer notre entière solidarité avec les femmes du monde entier.

Pour un parti socialiste féministe et résolument engagé dans cette lutte pour l’égalité, unissons nos forces et notre détermination : nous ne nous résignerons jamais !


Contributeurs : Audrey GATIAN (13), Aurore PAGEAUD (62), Boris VALLAUD (40), Christelle CHAPELLE-CHARRIER (86), Émilie MOSTEFAÏ (75), Malika BONNOT (69), Fanny PIDOUX (45), Eric SARGIACOMO (40), Anne TOUSCHE (31), Laura GANDOLFI (69), Caroline RACINE (57), Aline MAURICE (34), Agathe BOURRETERE (40), Estelle PICARD (13), Pauline JAGU (13), Rozenn BONNET (40), Aline MAURICE (34), Emma PINÇON (31), Emmanuelle RAMOND (44), Benedicte LECACHEUX (14), Florence SABARD (75), Jennifer BOHRER BARREAU (53), Johanne HADZLIK (59), Thomas GODARD (94), Yann CROMBECQUE (69), Philippe QUÉRÉ (95), Alex CHARBONNEL (32), Olivier FOURNET (82), Jean Claude MAURIN (26), Gautier PEZY (16), Antoine DALLET (17), Nicolas LE VIAVANT (40), Àhmed MIRAOUÎ (62), Titouan MARY (51), Dominique RAT (40), Damien ROUTA (40), Killian MONTESQUIEU (75), Damien THOMAS (75), Cyril NOVAKOVIC (75), Christian HUGUIES (40), Bruno PÉRAN (31), Thierry JACQUET (69), Jerome GUILLEM (33), Marina PARODI (40), Benjamin ALLAIX (49), Stéphane GUTHINGER (24), Vincent TISON (37), Marie-Pierre DUHA PERRIAT (40), Yoann GARCIA (33), Lionel OLLIVIER (60), Jean-Marie DARRICAU (40), Elouan LAHET (40), Jean-Michel EON (44), Karine GARRALON (40), Abel GAGO (69), Denis BREVET (40), Nicolas DELAUTRETTE (87), Johel GREVET (62), Gauthier DETROUSSEL (27), Maxime FLEURY (24), Lucas BERGÉ (58), Elias BENDAOUADJI (57), Didier KAHN (40), Dominique BOLLIET (69), Anne-Marie KAHN (40), Yann AUZIAS (69), Geneviève COURAUD (13), Alex CHARBONNEL (32), Hans TORVIC LECLERC (18), Robert CABÉ (40), Bernard BETNA (40), Vincent VAN ACKER (75), Mehdi KEMOUNE (91), Eric QUENARD (51), Paul COUTARD (75), Victor LE MONIER (21), Jean Marc BILLAC (40), Romain MIDA (60), Antoine TERRIER (40), Grégoire GOURDON (49), Noé COLLOMB (69), Justine CHASSEUR (40), Jeanne DALLOT (75), Nicolas DZIEZUK (57), Manon AUDAP (40), Lucas HAMIDI (62), Olivier DUCOURTIEUX (87), Matthias EVANO (75), Rolande CASSAGNEAU (40), Zoé BOURLON (40), Yann AUZIAS (69), Abel GAGO (69), Pierre HADZLIK (59), Stéphane GEMMANI (38), Noé GUIGONET (13), Hélène HOMMERY (22), Quentin LE MENÉ (45), Quentin LATOUR (31), Jean WOHRER (75), Matthis MONTEIL (75), Xavier DEMANGEON (40), Cédric MARÉCHAL (45), Mohamed AIT-YAHIA (69), Arnaud BATTEFORT (23)


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