Thème : Écologie
La lutte contre le dérèglement climatique et les efforts de conservation des écosystèmes sont aujourd’hui pris en étau entre le déni de l’urgence environnementale par les forces politiques de droite d’une part et l’inaudibilité, voire le rejet, de certaines politiques publiques en faveur de la transition écologique par une partie de nos concitoyens d’autre part. Le Parti socialiste se doit de jouer un rôle-clé pour affirmer tout à la fois la nécessité absolue de la transition écologique et l’importance cruciale de la mener en faveur, et non au détriment, des plus vulnérables.
Trois axes doivent orienter notre action :
(i) mettre l’accent sur la reconnaissance des inégalités environnementales : les plus pauvres de nos concitoyens sont les plus vulnérables à la fois au changement climatique et aux politiques publiques qui visent à l’atténuer,
(ii) mener des politiques publiques de transition écologique ambitieuses, redistributives et porteuses de bénéfices multiples,
(iii) aller au-delà du seul enjeu climatique en assurant la préservation des écosystèmes dans leur ensemble.
L’objectif des socialistes doit ainsi être de définir la transition écologique comme un progrès désirable, un nouvel horizon sur le chemin de l’émancipation.
1. LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE EST CONTESTÉE PAR CELLES ET CEUX QU’ELLE DOIT PROTÉGER, CAR LES INÉGALITÉS ENVIRONNEMENTALES SONT TROP SOUVENT NIÉES
Cela fait 20 ans que la Charte pour l’Environnement a intégré le préambule de la Constitution. Nous sommes passés d’une prise de conscience générale des enjeux climatiques et environnementaux au début des années 2000 à un rejet massif par une partie de la population et des forces politiques aujourd’hui.
L’ère du climato-scepticisme est ouverte. Les pouvoirs forts contestent tous les jours les impacts climatiques : États-Unis, Russie, pétromonarchies… tous s’exonèrent de l’enjeu climatique. L’environnement et le climat sont devenus un vrai marqueur politique, de gauche mais aussi des pouvoirs réactionnaires et autoritaires.
Cependant, l’espoir subsiste : dans les pays industrialisés, une majorité de citoyens soutient des mesures contre le dérèglement climatique ambitieuses, à condition qu’elles s’accompagnent de mesures redistributives, particulièrement au sein des jeunes générations, plus concernées par les enjeux environnementaux que leurs aînées.
Car le changement climatique menace tout le monde, mais en particulier les plus pauvres et les plus vulnérables : les canicules se font plus durement ressentir dans les logements de petite taille et de mauvaise qualité, les inondations appauvrissent ceux qui n’ont pas d’autre endroit où vivre, les mauvaises années agricoles impactent plus durement les petits exploitants…
Mais, lorsqu’elles sont mal conçues ou dépourvues de volet redistributif, les politiques publiques en faveur de la transition écologique impactent également davantage nos concitoyens les moins aisés : même si les bénéfices sont nombreux, changer de voiture, faire rénover son logement ou manger bio reste très, trop, coûteux pour beaucoup de Français. Sans accompagnement, des mesures comme la taxe carbone ou les hausses des prix des énergies ont, en proportion, un impact plus important sur le revenu des plus pauvres.
Le changement climatique et la transition écologique mettent ainsi cruellement en relief les inégalités sociales et de revenus, mais aussi les inégalités territoriales. Le changement climatique se fera durement ressentir dans les villes, où les îlots de chaleur en période de canicule sont nombreux et les logements généralement de plus petite taille. A l’inverse, la hausse des prix des carburants n’aura pas le même impact en zone urbaine fortement dotée en transports en commun qu’en zone rurale.
La lutte contre les inégalités environnementales doit donc être au cœur des politiques de transition écologique : c’est une condition non seulement de leur justice, mais tout simplement de leur pérennité.
2. SE PROTÉGER DU CHANGEMENT CLIMATIQUE, S’ÉMANCIPER DE LA DÉPENDANCE AUX ÉNERGIES FOSSILES ET AUX RESSOURCES FINIES
Cette révolution est possible. Car la transition écologique est non seulement nécessaire et porteuse de nombreux bienfaits sur le plan environnemental, de la santé publique, du confort et du bien-être, mais elle est aussi pour l’Europe une formidable opportunité économique.
Pour le seul solde commercial français, la facture liée aux importations d'hydrocarbures s’élevait ainsi en 2024 à 64 milliards d’euros. Avec la transition vers la neutralité carbone, ces flux financiers colossaux pourront être redirigés vers l’économie française, dans des secteurs porteurs d’emplois (rénovation énergétique, industrie verte et économie circulaire, nouveaux modèles agricoles…).
Car l’économie carbonée nous enferme dans de multiples dépendances : aux énergies fossiles et aux matières premières majoritairement importées de régimes autoritaires, à de nombreux biens à bas coûts (textiles, appareils et objets de consommation courante…) produits dans des usines indignes à l’autre bout du monde, à l’agriculture intensive qui appauvrit les sols de demain pour le profit d’aujourd’hui…
L’économie carbonée est un cercle vicieux dans lequel les coûts sociaux et environnementaux insoutenables sont le revers de la course à des prix toujours plus bas.
C’est pour émanciper notre pays et nos concitoyens de ces multiples dépendances que les socialistes doivent lutter contre l’exploitation de la nature par l’homme, comme ils ont combattu l’exploitation de l’homme par l’homme depuis l’origine.
Ce nouveau combat émancipateur nécessite des politiques publiques fortes, qui soient tout à la fois à la hauteur de l’urgence climatique, redistributives, et porteuses de multiples bénéfices.
Face à l’urgence climatique, nous affirmons qu’il ne saurait y avoir de renoncement, car l’inertie environnementale s’achète sur le dos des générations futures.
Face aux inégalités environnementales, nous proposons une exigence simple : l’ensemble des politiques publiques en faveur de la transition écologique doivent avoir un volet redistributif. Les revenus issus des taxes liées à l’environnement, qui sont généralement un outil efficace de changement des habitudes et des moyens de production, devraient par exemple toujours être affectées à une redistribution auprès des acteurs sur lesquels elles ont une incidence (ménages, entreprises, collectivités…), pour les aider à accéder aux solutions adaptées et à financer leur propre transition écologique.
Face au scepticisme d’une partie de nos concitoyens, nous devons démontrer les multiples avantages de la transition écologique. Se libérer des dépendances à l’économie carbonée, c’est non seulement lutter contre le changement climatique, mais aussi manger mieux, habiter dans des logements plus confortables, vivre en meilleure santé…: nous devons ainsi penser des politiques publiques qui démontrent au quotidien leur utilité.
En lançant un grand plan de rénovation des logements sociaux et de soutien à la rénovation privée, nous pourrions à la fois diminuer notre empreinte environnementale et améliorer le confort de vie de nombreux Français, été comme hiver.
Il faut également relancer le leasing social, qui permet l’accès des ménages modestes aux véhicules électriques et que nous avions défendu dès 2022, en le dotant de moyens adéquats. Nous pourrions ainsi à la fois réduire notre déficit commercial et diminuer le coût de la mobilité pour de nombreuses familles.
Nous devons également inventer un nouveau modèle de financement de notre agriculture, qui garantisse à la fois l’accès à une alimentation de qualité pour toutes et tous, et simultanément apporte une garantie suffisante de revenus pour les agriculteurs.
Réaliser une transition écologique ambitieuse, c’est non seulement atténuer le changement climatique en cours, mais aussi s’adapter aux conséquences déjà tangibles de celui, en protégeant les populations les plus vulnérables : c’est par exemple refroidir les centres-villes contre les pics de chaleur extrêmes ou restaurer les zones humides pérennes pour prévenir les inondations.
En somme, les socialistes doivent affirmer et démontrer que la transition écologique n’est pas seulement une nécessité, elle est aussi un objectif politique désirable !
3. AU-DELÀ DE LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE, IL FAUT REPENSER NOTRE RAPPORT AU VIVANT ET À LA NATURE, C’EST-À-DIRE À LA BIODIVERSITÉ
L’humain fait partie intégrante de la biosphère et dépend directement de nombreux processus écologiques garantis par la bonne santé des écosystèmes.
Les productions scientifiques récentes confirment l’existence d’une crise de la biodiversité : le rythme d’extinction des espèces est anormalement élevé (on estime qu’autour de 10% des espèces connues ont disparu depuis l’an 1500), et non compensé par le rythme d’apparition des espèces. Certains scientifiques évoquent donc une « sixième extinction de masse ». Les causes de cette anomalie écologique sont bien identifiées par l’IPBES, d’origine anthropique et liées à notre système économique. De l'impact global le plus important à l'impact le plus faible, les cinq causes principales sont les changements dans l'utilisation des terres et des mers (e.g. la déforestation), l'exploitation directe des organismes (e.g. la surpêche), le changement climatique, les pollutions (plastiques etc.) et les espèces invasives.
Au-delà de la valeur intrinsèque que l’on peut donner à l’existence d’espèces non-humaines, les bénéfices anthropiques de la biodiversité sont immenses. Ces bénéfices sont qualifiés de « services écosystémiques » par les scientifiques. Ils peuvent être directement liés au bien-être humain (e.g. prévention des pandémies, santé psychologique) ou liés à notre système agricole (e.g. pollinisation, fertilité des sols). Au-delà des contributions agricoles, la biodiversité joue aussi un rôle important dans de nombreux processus industriels (production d’acier, industrie textile, chimie, refroidissement des centrales électriques), à travers sa capacité à réguler le cycle de l’eau par exemple.
Sur le territoire français, nous proposons ainsi de privilégier les solutions fondées sur la nature. Citons l’exemple d’Eau de Paris. Au cours des dernières années, la régie municipale des eaux de la Ville de Paris a ainsi préféré garantir la qualité en amont en aidant les agriculteurs des bassins versants à protéger l’environnement plutôt que d’investir dans une usine de traitement coûteuse. Financer la conservation d’écosystèmes fonctionnels a ainsi permis de conserver une eau de bonne qualité à moindre coût.
En somme, nous socialistes, voulons construire une écologie politique du réel, fondée sur une nouveau contrat social entre l’humain et la nature, nous plaidons pour un nouvel humanisme de la nature. Face à la réalité scientifique, qui confirme chaque jour la réalité du dérèglement climatique, nous voyons dans l’écologie une nouvelle opportunité. Les capitalistes et les libéraux s’imaginent pouvoir tirer profit de ce drame climatique. Les progressistes ont été naïfs pensant que l’on partageait le même constat. Nous disons que c’est une occasion de plus de justice et d’égalité entre les territoires et entre nous. Parce que nous voulons une vie meilleure pour chacune et chacun d’entre nous, nous nous engageons à construire les mécanismes politiques et économiques qui feront de la crise écologique une nouvelle chance d’égalité et de fraternité.
Contributeurs : Michael WEBER (57), Antoine GUILLOU (75), Loris ANDRÉ (33), Fanny PIDOUX (45), Audrey GATIAN (13), Philippe MARTIN (32), Pierre PRIBETICH (21), Thomas GODARD (94), Malika BONNOT (69), Caroline RACINE (57), Aline MAURICE (34), Agathe BOURRETERE (40), Rozenn BONNET (40), Aline MAURICE (34), Emma PINÇON (31), Philippe QUÉRÉ (95), Alex CHARBONNEL (32), Nicolas TELLIER (33), Jean Claude MAURIN (26), Gautier PEZY (16), Antoine DALLET (17), Nicolas LE VIAVANT (40), Titouan MARY (51), Damien ROUTA (40), Killian MONTESQUIEU (75), Damien THOMAS (75), Paul-Marie GRANGEON (75), Cyril NOVAKOVIC (75), Christian HUGUIES (40), Bruno PÉRAN (31), Thierry JACQUET (69), Jerome GUILLEM (33), Marina PARODI (40), Benjamin ALLAIX (49), Dominique BOLLIET (69), Marie-Pierre DUHA PERRIAT (40), Yoann GARCIA (33), Lionel OLLIVIER (60), Jennifer BOHRER BARREAU (53), Johanne HADZLIK (59), Elouan LAHET (40), Jean-Michel EON (44), Karine GARRALON (40), Denis BREVET (40), Nicolas DELAUTRETTE (87), Florence SABARD (75), Johel GREVET (62), Gauthier DETROUSSEL (27), Lucas BERGÉ (58), Elias BENDAOUADJI (57), Didier KAHN (40), Dominique BOLLIET (69), François-Marie CAILLEAU (29), Yann AUZIAS (69), Alex CHARBONNEL (32), Hans TORVIC LECLERC (18), Robert CABÉ (40), Bernard BETNA (40), Vincent VAN ACKER (75), Emmanuelle RAMOND (44), Paul COUTARD (75), Victor LE MONIER (21), Jean Marc BILLAC (40), Romain MIDA (60), Antoine TERRIER (40), Grégoire GOURDON (49), Noé COLLOMB (69), Justine CHASSEUR (40), Nicolas DZIEZUK (57), Manon AUDAP (40), Olivier DUCOURTIEUX (87), Matthias EVANO (75), Rolande CASSAGNEAU (40), Zoé BOURLON (40), Yann AUZIAS (69), Abel GAGO (69), Pierre HADZLIK (59), Stéphane GEMMANI (38), Stéphane GEMMANI (38), Quentin LE MENÉ (45), Quentin LATOUR (31), Xavier DEMANGEON (40), Cédric MARÉCHAL (45), Thomas ROSSET (75), Arnaud BATTEFORT (23)