Thème : Société
L’ordonnance du 2 février 1945 demeure et doit rester notre référence en matière de justice pour les mineurs. Face aux attaques constantes, notamment de la droite et de l’extrême droite, mais aussi du macronisme finissant avec la proposition de loi portée par Gabriel Attal, il est essentiel de réaffirmer notre engagement en faveur de la protection des mineurs. Un mineur délinquant est avant tout un enfant ou un adolescent, très souvent un enfant en danger, et la réponse doit être éducative, non punitive. Pensons-nous réellement, comme le proclamait déjà il y a vingt ans Nicolas Sarkozy, que les enfants d’aujourd’hui sont plus dangereux que ceux de 1945, ce qu’un projet de code pénal des mineurs de la garde des Sceaux de l’époque, Rachida Dati, voulu traduire par une responsabilité pénale fixée à 12 ans ?
Ces rodomontades et stéréotypes ont tout de la fainéantise intellectuelle et cherchent à flatter les peurs et les stéréotypes. À cette droite sans mémoire et sans scrupule, rappelons ce qu’écrivait le gouvernement provisoire de la République conduit par un certain Charles de Gaulle : “Il est peu de problèmes aussi graves que ceux qui concernent la protection de l’enfance, et, parmi eux, ceux qui ont trait au sort de l’enfance traduite en justice. La France n’est pas assez riche d’enfants pour qu’elle ait le droit de négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains. La guerre et les bouleversements d’ordre matériel et moral qu’elle a provoqués ont accru dans des proportions inquiétantes la délinquance juvénile. La question de l’enfance coupable est une des plus urgentes de l’époque présente. Le projet d’ordonnance ci-joint atteste que le Gouvernement provisoire de la République française entend protéger efficacement les mineurs, et plus particulièrement les mineurs délinquants.”
Les hommes et femmes politiques de droite et l’extrême droite veulent alimenter l’idée d’une jeunesse violente, prétendant que cette violence serait nourrie par les réseaux sociaux. Bruno Retailleau parle même « d’ensauvagement des mineurs ». Ces mots qui déshumanisent empêchent une approche raisonnée de la réalité. En 2016, 274 000 mineurs ont été mis en cause pour des infractions élucidées par la police ou la gendarmerie. En 2024, ce chiffre est tombé à 228 000 soit une baisse de 16%. Seuls les actes violents ont augmenté, mais ils ne peuvent être considérés comme représentatifs de l’ensemble des actes de délinquance des mineurs néanmoins ces actes sont surmédiatisés et récupérés par la droite et l’extrême droite pour justifier leur discours.
Si la célérité de la justice est encore plus importante pour un mineur que pour un adulte, le temps jouant beaucoup plus sur les premiers que les seconds, la proposition de recourir à la comparution immédiate des mineurs les renvois vers la procédure dont nous savons qu’elle est la plus expéditive, la moins à même d’individualiser ses approches et ses jugements, toutes choses essentielles pour construire une peine éducative adaptée à chaque cas.
Il est notamment essentiel de déterminer si ce jeune est avant tout un mineur en danger ou une personne souffrant de troubles psychiques. Ne pas accomplir ce travail préalable revient à nier le statut de mineur et l’importance de l’éducation de nos plus jeunes. La volonté de certains responsables politiques de renforcer les peines de prison pour les mineurs délinquants ne fera qu’aggraver la situation en favorisant la récidive. Les fausses évidences continueront de nourrir l’embolie de notre système pénitentiaire et d’en faire une machine à récidive et non le lieu de préparation à la réinsertion qu’il devrait être.
Chaque mineur impliqué dans un délit témoigne d’un échec de l’État à protéger les enfants de la République. Comme le disait Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient ». Nous pourrions dire : « On ne naît pas délinquant, on le devient ». Il est crucial de se questionner sur les raisons des délits commis par les mineurs non pas comme un acte isolé mais comme un reflet d’un problème de société et de notre incapacité à protéger tous les mineurs.
Nous avons fait le choix d’une société solidaire où l’État a des devoirs envers chacun de ses citoyens. Il est temps de nous poser les bonnes questions et de protéger nos jeunes des manipulations politiciennes.
La gauche, et en particulier le PS, doit se ressaisir de ce sujet.
Propositions :
*** Former nos élus aux principes de l’ordonnance de 1945.
*** Réduire les délais de la procédure sans que cela porte préjudice au mineur mis en cause.
*** Remettre une police de proximité et redonner des moyens à la prévention spécialisée ∙ *** Privilégier la justice restaurative et les travaux d’intérêts généraux comme une sanction éducative lorsqu’un mineur fait un délit. Redonner des moyens pour leur mise en place
*** Relancer un débat sur la délinquance des mineurs réunissant des experts de la PJJ, des autorités (police, gendarmerie, justice) et des professionnels médico-sociaux travaillant avec les mineurs.
*** Redonner des moyens à la Protection Judiciaire de la Jeunesse.
Contributeurs : Rozenn Bonnet (40), Jean Claude Maurin (26), Fanny PIDOUX (45), Audrey GATIAN (13), Thomas GODARD (94), Eric SARGIACOMO (40), Malika BONNOT (69), Caroline RACINE (57), Aline MAURICE (34), Agathe BOURRETERE (40), Aline MAURICE (34), Emma PINÇON (31), Philippe QUÉRÉ (95), Alex CHARBONNEL (32), Gautier PEZY (16), Antoine DALLET (17), Nicolas LE VIAVANT (40), Àhmed MIRAOUÎ (62), Titouan MARY (51), Gwendal MANSO (40), Dominique RAT (40), Eden MATIONGO (77), Killian MONTESQUIEU (75), Damien THOMAS (75), Cyril NOVAKOVIC (75), Christian HUGUIES (40), Bruno PÉRAN (31), Thierry JACQUET (69), Jerome GUILLEM (33), Marina PARODI (40), Benjamin ALLAIX (49), Mathieu GERVAIS (75), Marie-Pierre DUHA PERRIAT (40), Yoann GARCIA (33), Lionel OLLIVIER (60), Jennifer BOHRER BARREAU (53), Johanne HADZLIK (59), Elouan LAHET (40), Jean-Michel EON (44), Karine GARRALON (40), Denis BREVET (40), Nicolas DELAUTRETTE (87), Benedicte LECACHEUX (14), Florence SABARD (75), Johel GREVET (62), Gauthier DETROUSSEL (27), Lucas BERGÉ (58), Elias BENDAOUADJI (57), Dominique BOLLIET (69), Yann AUZIAS (69), Alex CHARBONNEL (32), Hans TORVIC LECLERC (18), Robert CABÉ (40), Bernard BETNA (40), Vincent VAN ACKER (75), Mehdi KEMOUNE (91), Emmanuelle RAMOND (44), Paul COUTARD (75), Victor LE MONIER (21), Jean Marc BILLAC (40), Romain MIDA (60), Antoine TERRIER (40), Florian SENTIGNAN (94), Grégoire GOURDON (49), Noé COLLOMB (69), Justine CHASSEUR (40), Nicolas DZIEZUK (57), Manon AUDAP (40), Matthias EVANO (75), Rolande CASSAGNEAU (40), Zoé BOURLON (40), Yann AUZIAS (69), Pierre HADZLIK (59), Stéphane GEMMANI (38), Stéphane GEMMANI (38), Noé GUIGONET (13), Helene HOMMERY (22), Quentin LE MENÉ (45), Lucian BONNET (40), Quentin LATOUR (31), Matthis MONTEIL (75), Xavier DEMANGEON (40), Cédric MARÉCHAL (45)