100 jours à Matignon : l'autorité pour masquer l'austérité

– Vendredi 19 avril 2024

À l’occasion des cent jours de son entrée à Matignon, « le Premier ministre de l’éducation » est réapparu à Viry-Châtillon où il s’est fendu d’un discours sur l’autorité qui ressemblait fort à un remix de son discours de politique générale.

Suite aux récentes et graves agressions ayant impliqué des adolescents, l'exécutif se devait de réagir. Monsieur Attal a donc promis une réponse ferme et rapide mettant en avant des placements en internats, des points retirés aux examens, son Grenelle des violences et des punitions pour les parents qualifiés de « démissionnaires ». Et face à ce qu’il a qualifié « d’entrisme islamiste », il a assuré vouloir « en faire plus sur l'explication des règles et de la laïcité ». Entre ce qui existe, ce qu’il a déjà dit et cette énième stigmatisation de parents qui ont le plus souvent davantage besoin d'être accompagnés que sanctionnés, ce discours n’aura servi à rien.

Il n’aura surtout apporté aucune solution aux maux qui rongent notre système éducatif : poids des inégalités sociales dans le parcours scolaire d’un élève, perte d’attractivité du métier d’enseignant, manque d’adultes dans l’école (enseignants, surveillants, psychologues et infirmiers scolaires,…), absence de mixité sociale dans certains établissements et décrochage scolaire, lequel n’est pas sans rapport avec la violence de certains jeunes.

Pire, il aura même inquiété les syndicats d’enseignants et le Syndicat de la Magistrature qui ont jugé les mesures annoncées « hautement préoccupantes » esquissant une « justice toujours plus expéditive et stigmatisante » ; jusqu’à l’Unicef, qui exprime « sa vive préoccupation à l’égard des mesures annoncées, qui semblent compromettre les avancées de la justice pénale des mineurs » en ce qu’elles « risquent de porter atteinte aux principes fondamentaux qui favorisent la primauté de l’aspect éducatif sur le répressif ».

Monsieur Attal est en outre passé complètement à côté de la révolte qui s’est exprimée il y a près d’un an dans les quartiers. Le Parti socialiste rappelle que c’est une politique globale et équilibrée qui est attendue de la part des habitants, élus et acteurs associatifs : elle doit permettre de prévenir et sanctionner les violences en tenant compte de l’âge des personnes, mais elle doit également offrir un espoir aux habitants et aux habitantes des quartiers qui n’en peuvent plus de vivre dans des zones de relégation - loin des services publics, des zones d’emploi et d’investissement d’avenir - qui sont un carburant à la colère, à l’entrisme religieux, aux violences.

Le Premier ministre est enfin resté très évasif sur la politique de rigueur qu’il va devoir conduire pour résorber le déficit et maintenir les cadeaux fiscaux faits aux super-riches depuis 2017. Le Parti socialiste tient à rappeler que les premières victimes seront encore une fois les familles les plus modestes, celles que le Premier ministre a montrées du doigt en les qualifiant de « démissionnaires ».

Mais qui démissionne Monsieur Attal ? N’est-ce pas l’État quand il se décharge de ses responsabilités sur les individus ? N’est-ce pas l’État quand il abandonne certains territoires ? N’est-ce pas l’État quand il abandonne l’égalité ? Votre discours sur l’autorité ne saurait masquer celui sur l’austérité, ils sont aussi inextricablement liés.

Yannick Trigance, secrétaire national à l'École, au Collège et au Lycée

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