PREMIÈRE LEÇON DE LA CRISE SANITAIRE : L'INSUFFISANCE DES POLITIQUES DE PRÉVENTION ET D'ANTICIPATION

Contribution des adhérents de la section socialiste de Saint-Pourçain sur Sioule (03) [3 oct. 2020]

CONGRÈS de VILLEURBANNE
La crise sanitaire due au Covid-19 a produit un électrochoc dans nos sociétés occidentales. Disons dès maintenant quelles leçons nous en tirons, quelles orientations nous proposons pour l'avenir et quelle méthode nous suggérons pour les mettre en œuvre.

La première et principale leçon est l'insuffisance des politiques de prévention et d'anticipation.

Première mesure à prendre : rétablir certaines institutions dans leur rôle de prévision/planification, notamment France stratégies, le SGDSN (Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale), le CESE (Conseil économique, social et environnemental), ainsi que le Parlement.
Il s'agira également de
tenir compte de leurs​ ​travaux, en particulier sur les menaces auxquelles notre pays pourrait être amené à faire face, et d'élaborer les plans d'action correspondants. Le Parlement et l'exécutif devront avoir, constitutionnellement, le devoir de veiller à ces travaux, et à l'information des citoyens et des corps intermédiaires à leur sujet.

De fait, à la lecture des rapports émis par ces divers organismes, on constate que la situation de pandémie actuelle avait été prévue, comme bien d'autres (accident nucléaire d'envergure, conséquences "multifactorielles" du réchauffement climatique, cyber-attaque de grande importance, guérilla terroriste de grande ampleur, crise alimentaire localisée ou générale, multiplication de pathologies graves causées par l'accumulation de matières polluantes dans l'environnement). Ce qui est en jeu c'est l'application des mesuresde prévention et de gestion de crise qui avaient été prévues et n'ont pas été respectées (manque de masques de protection et de produits pour tester la Covid-19, persistance de la diffusion de perturbateurs endocriniens dans l'environnement...)

L'identification des menaces et la mise au point des plans d'action donneront des indications précises sur les axes prioritaires de recherche fondamentale et appliquée que soutiendra la puissance publique.

En matière de prévention tout commence par la protection de l'environnement: réduction de la dépendance aux énergies fossiles, recours aux énergies renouvelables, essentiellement solaire, électrification des véhicules, lutte contre la perte de biodiversité, conditionnement des aides publiques à des objectifs de réduction des émissions de GES, élimination du gaspillage par le développement de l'économie circulaire, refus de l'obsolescence programmée...

Dans le domaine de la santéla priorité à la préventionsuppose de faire porter l'effort sur l'éducation, notamment à l'école, de ré-impliquer fortement la médecine du travail et la médecine scolaire, et de lutter vigoureusement contre les facteurs de vulnérabilité : alcoolisme, tabagisme, obésité, excessive sédentarité.

Une politique de santé convenable devra remettre le patientau centre du dispositif. La médecine de​ ​premier recours (médecins généralistes, pharmaciens, infirmières libérales...) doit retrouver sa place, en première ligne. C'est le bon moyen de désengorger les services d'urgence, de développer une politique de prévention (vaccins, conseils, dépistage...) et de permettre à l'hôpitalde se consacrer, au niveau d'excellence le plus élevé possible et avec des moyens suffisants, aux soins nécessités par la nature et la gravité de la situation des patients. La bonne articulation, au quotidien, des différents maillons des chaînes de prise en charge doit être la première préoccupation des ARS (Agences régionales de santé).

Instrument primordial de prévention sanitaire, la qualité de l'alimentation sera prioritaire : soutien vigoureux et constant à l'agriculture biologique, éducation diététique...
La restauration collective, notamment les
cantines scolaires, sera un point d'application de cette orientation (produits issus de l'agriculture biologique, Label rouge et/ou locaux).

La production locale, distribuée en circuits les plus courts possible, sera organisée et préservée en amont : cultures maraîchères à proximité des villes, élevage et transformation locaux, jardins partagés, potagers municipaux...
Des
plates-formes locales de distribution (achat-livraison), version dématérialisée des marchés forains seront mises en place et, si nécessaire, gérées par les pouvoirs publics.

D'une façon générale, pour la prévention comme en cas de crise, la mobilisation citoyenne, c'est à dire de tous les citoyens quelles que soient leurs catégories sociales, est une condition de la réussite.
Cette mobilisation citoyenne suppose l'existence d'un
climat de confianceentre la population et les dirigeants. La confiance passe par un sentiment de sincérité desdits dirigeants, fondé sur de la transparence, des consignes claires et constantes, des engagements tenus, le respect des corps intermédiaires, l'élimination des conflits​ ​d'intérêtsau sein des instances de conseil et de décision...

Le dialogue socialsera la méthode privilégiée pour faire entrer dans le concret de la vie sociale et économique les réformes et mesures décidées démocratiquement, parfois sous l'empire de la nécessité et de l'urgence.

C'est aussi par la négociation sociale tripartite(État / salariés / entreprises) que devront se réaliser les revalorisations de certains métiers jusque là progressivement un peu "oubliés" et dont le caractère déterminant pour la santé publique et la vie sociale est clairement apparu lors de la pandémie de Covid-19.

Ce travail de révision des grilles salariales et des règles d'évolution des rémunérations devra être mené dans un grand nombre de branches professionnelles. Il servira également à établir une véritable égalité entre les femmes et les hommes. À travail égal salaire égal.

Unepolitique de justice sociale et de​ ​réduction des inégalitésest nécessaire pour "embarquer" les classes populaires dans la démarche de préservation de l'environnement et dans la gestion de crise, pour faire en sorte qu'elles n'en soient pas exclues et, surtout, qu'elles n'en soient pas les victimes, sauf à prendre un risque de rejet et de conflictualité, donc d'échec.

De ce point de vue notre pays a la chance - qu'il s'est donnée - de bénéficier de régimes et dispositifs sociauximportants, pour maîtriser les risques de la vie courante, compenser leurs effets, réduire, justement, les inégalités, prendre en charge les publics "fragiles".
On a bien vu, notamment dans les crises récentes (crise financière de 2008, crise sanitaire de 2020) le rôle majeur qu'ils ont joué pour maintenir à flot la vie sociale et la vie économique : assurance chômage, assurance maladie, retraites, RSA... imaginons ce qui se serait passé sans eux.

Quant à leur coût, attention aux faux débats : il s'agit de redistribuer des ressourcespour compenser des risques et des aléas. Au bout du compte, au delà de la charité, ces moyens contribuent au maintien de l'activité et constituent, en fait, un soutien à la consommation. Et qui dit consommation, en particulier en période de récession, dit croissance et emploi.

En fait la solidarité correspond à l'intérêt bien compris de chacune des catégories sociales. Cela étant, le meilleur moyen de rendre actives les dépenses passives reste lacréation d'emplois, qui doit être l'objectif central de toute politique économique.

Un pays qui veut avoir une véritable politique de prévention et assurer une bonne gestion de crise le moment venu a besoin deservices publicsefficaces dotés de personnels de grande qualité.
Instruments de l'égalité citoyenne et garants de l'intérêt général, ils doivent pouvoir s'appuyer sur
une expertise publique forte et indépendante.

Cela concerne naturellement les agents des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des hôpitaux, mais pas seulement.
Pour l'accès aux soins de tous,
les déserts​ ​médicauxdevront être résorbés.
L'accès à
l'internet à très haut débit pour tous ne peut plus être différé. Il doit être assuré à court terme sur des financements publics. Et la situation des personnes "exclues du numérique" devra être résolue rapidement (médiateurs, procédures et matériels adaptés...)

Afin d'assurer la continuité du service public​ ​d'éducationen toutes circonstances, tous les établissements scolaires, tous les enseignants et tous les élèves seront équipés et formés de manière à pouvoir basculer dans des formes d'enseignement à distance (en totalité ou partiellement), sans délai et sans dommages, notamment sans un creusement des inégalités.

De la même manière les collectivités mettront en œuvre des systèmes de transport individuel et​ ​collectifsadaptables, les mobilités douces étant encouragées concrètement.
Des services de transport à la demande soutenus publiquement viendront compenser la difficulté à installer, sur certains territoires, des moyens de transports collectifs. Et, là où ils existent, les transports en commun devront pouvoir évoluer dans leurs modalités, leur débit,
leur fréquence, leurs horaires, leurs tarifs... en fonction des nécessités éventuelles du moment.

En ville des souplesses dans l'utilisation de la voirie permettront de faire évoluer l'espace réservé aux piétons, aux pistes cyclables...

En réalité la crise (ou les crises) engendrées par la pandémie de Covid-19 amènera(-ront) nos sociétés à"réapprendre le temps ​​long"et l'anticipation. C'est d'abord une question d'état d'esprit et de méthode, cela touche tous les domaines d'activité, en rupture avec le court-termisme imposé par l'idéologie ultra-libérale et par les modes de vie qu'elle génère. Sans cette rupturenous ne sortirons pas durablement de ces crises et serons vraisemblablement condamnés à les gérer dans la durée.

Signataires : 

Adhérents de la section socialiste de Saint-Pourçain sur Sioule ;

Sophie CHAZEL, secrétaire de section.

La contribution en PDF

 

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