Mon 10 mai : 10 ans de parcours

MON AVANT 10 MAI 1981 Le 10 mai 1981 ne peut se comprendre et se fêter que s’il est fait référence et explication de la décennie qui l’a précédé, décennie qui a permis cette victoire historique de François Mitterrand à l’Elysée. Comme il s’agit de mon 10 mai, selon l’appel du PS, permettez-moi, camarades de prendre mon exemple car il illustre bien ces dix années qui ont changé le contenu et le visage de la Gauche. JUIN 1971 Avec ma Renault 4L, je monte à Paris, exactement à Epinay-sur-Seine car je suis délégué de la Saône-et-Loire au Congrès de l’Unité des Socialistes à Epinay. J’y suis au titre de la Motion du CERES de Jean-Pierre Chevènement, ce qui m’oblige à remonter plus loin dans le temps ! J’adhère à la SFIO par pure camaraderie d’adolescent en 1963. Dans la SFIO qui est déconsidéree à l’époque en raison de son alliance avec la Droite et de la Guerre d’Algérie, existe un groupe qui s’appelle le CERES animé par Jean-Pierre Chevènement, Didier Motchane, Georges Sarre, Pierre Guidoni qui veut bousculer la vieille maison de l’intérieur. A l’extérieur, se fréquentent et s’opposent une multitude de cerles de réflexions dont l’un émerge cependant en raison de l’un de ses membres qui fut candidat unique de la gauche en 1965 : il s’agit de François Mitterrand qui réussit a créé la FGDS. Mais cet éparpillement de la gauche (tiens, comme aujourd’hui !) lui est profondèment néfaste et germe alors l’idée d’unifier toutes des chapelles dans un Parti Socialiste digne de ce nom (ce qui n’est pas encore le cas de nos jours , malheureusement) Donc, quelles sont les forces en présence à Epinay : la SFIO moribonde avec Guy Mollet, la CIR (Convention des Institutions Républicains) avec François Mitterrand, Claude Estier et localement, André Lotte, Noël Daroux, Danie Pluchot, les grandes fédérations du Nord et des Bouches-du-Rhône avec Pierre Mauroy et Gaston Deferre, le CERES et des clubs comme « Vie Nouvelle »… Résultat du Congrès d’Epinay : une coalition hétéroclite prend le pouvoir de justesse (grosso-modo : Mitterrand, Mauroy, Defferre, Chevènement) avec un triple objectif interne et externe : en interne, respect des courants de pensée avec le système des motions qui détermine la composition de nos instances dirigeantes (une totale nouveauté !!! au lieu de la liste unique concoctée par le Secrétaire Général !!!), un nouveau secrétaire en la personne de François Mitterrand, en externe : l’Union de la gauche avec le Programme Commun de Gouvernement sans discussion idéologique préalable car rappelons-nous de l’écrasement du Printemps de Prague d’Alexandre Dubcek en 1968 qui, pour d’aucuns, était un frein à toute négociation programmatique. Pour autant, le nouveau Parti Socialiste a un énorme travail devant lui car il sort de l’échec de Gaston Defferre en 1969 où le Parti Communiste atteint 20% et qu’il a, en face de lui, le Gaullisme omnipotent, légitimé par les élections de la peur de 1968. Localement, en Saône et Lore et à Gueugnon : André Lotte qui est délégué du Syndicat des communaux CGT devient 1er Secrétaire Fédéral et moi Secrétaire d’une section squelettique (3 personnes !), avec un PC tout puissant comme la CGT des Forges, et un Maire de Droite (lui se déclarant apolitique) , vétérinaire de métier et élu confortablement au niveau de la Mairie et du Conseil général. Ce que je narre ici doit se répéter à des centaines d’exemplaires dans toute la France Mais, nous avions « quelque chose » en commun : la foi en un parti nouveau qui vient de naître et qui espère gouverner grâce au Programme Commun (avec le PC et le MRG) et avec un 1er Secrétaire qui enflamme les foules. Les élections deviennent de plus en plus positives pour le PS et les Groupes Socialistes d’Entreprises voient le jour, au grand dam du PC : cela n’est pas étranger à la victoire du 10 mai 1981. Mars 1976 Ces élections cantonales permettent, pour la 2ème fois, de mesurer l’influence des partis politiques dans l’électoral. Le canton de Gueugnon est dans la moitié renouvelable. Notre section est toujours aussi squelettique, l’effet d’Epinay n’ayant pas encore joué mais pleine d’audace et de bonne volonté. Comme je suis l’un des secrétaires fédéraux du PS, je suis candidat et notre campagne, en particulier d’affichage se moque des interdictions. A 3 colleurs, Gueugnon est inondée de mon visage alors que nous n’avons ni la Mairie tenue par la Droite ni les Forges tenues par le PC dont l’un des ouvriers, également élu d’Uxeau, est candidat : Jean-Claude Dauvillaire. Il faut savoir que les résultats de ces élections cantonales sont importants car ils déterminent quel parti politique, en cas d’union, conduira la liste aux élections municipales de 1977. Ma profession de foi est axée sur la Programme Commun de Gouvernement. Le résultat du scrutin est au-delà de mes attentes car le PS dépasse enfin le PC : l’effet d’Epinay s’est fait sentir dans l’électorat, ce qui est bon pour la suite ! Mars 1977 Oh, que les négociations avec le PC furent difficiles d’autant que personne ne se dégageait pour être tête de liste, liste qui fut donc présentée par ordre alphabétique. Cette liste à majorité socialiste réussit à faire entrer 5 élus au Conseil Municipal dont Roland Cottin et moi-même car le panachage était permis et le dépouillement se terminalà 8h30 du matin le lundi !!! Cependant, au plan national, ces élections municipales se soldèrent par une belle vague rose incluant, entre autres, Le Creusot avec Camille Dufour et Mâcon avec Michel-Antoine Rognard : une assise forte en vue de 1981. De 1977 à 1981 La section s’étoffe, Marc Forest créant le GSE des Forges (Groupe Socialiste d’Entreprise) avec Bernard Dufour. La section colle des affiches, distribue des tracts aux portes de Forges, en compagnie d’André Lotte qui vient nous aider (en partant de chez moi à l’Ecole de la rue Danton), rédige des communiqués ou articles utilisant la concurrence entre les trois journaux : Progrès, Dauphiné, Courrier. Et l’élection présidentielle pointe à l’horizon en sachant que le Parti Socialiste ne fut jamais un long fleuve tranquille avec toujours des bisbilles entre ce que la presse surnommait les « éléphants ». Ce que nous connaissons n’est donc pas nouveau à ceci près que la discipline de parti n’est pas un vain mot. 1981 Et l’année 1980 commence par la rivalité entre François Mitterrand et Michel Rocard, rivalité qui fut tranchée lors d’un congrès où François Mitterrand fut investi pour être notre candidat à l’élection présidentielle de 1981. Les premiers sondages ne furent pas fameux mais la pugnacité, le talent oratoire, la ligne claire héritée du Congrès d’Epinay nous permit de grimper dans les études d’opinion jusqu’au jour où le « Quotidien de Paris » de Philippe Tesson publia un 51/49 en faveur de François Mitterrand. Alors que, en 1974, François Mitterrand était le Candidat Unique de la Gauche avec le soutien du Parti Communiste, là, il part en candidat socialiste qui a, en face de lui, un certain Georges Marchais qui ne nous fait pas de cadeau et dont les consignes se répercutent au plan local. Dur, dur, dur ! La suite, vous la connaissez, une immense explosion de joie lorsque le visage de François Mitterrand apparut sur les écrans de télévision. Pour conclure : trois anecdotes : . la bagarre du collage d’affiches : Le PC avait son équipe, Chirac avait son équipe, le PS avait son équipe. Ce furent des soirées et des nuits mémorables avec une astuce de notre part : nous déchirions les affiches de Chirac et Marchais, les uns et les autres s’accusant mutuellement…Le lendemain, nous mettions celles de François Mitterrand… . les camions du Carrefour du Guide : j’habitais à l’Ecole de la rue Danton d’où nous partions pour faire nos collages d’affiches. Souvent, en nous voyant, des camions s’arrêtaient pour nous dire de coller des affiches sur leur véhicule, ce qui valait tous les panneaux sauvages. . une émission de France-Inter dont je ne me souviens plus du titre nous laissait penser, par des allusions bien choisies, que François Mitterrand allait être élu. Nous la suivions avec intérêt. Voilà quelques instants de mon avant 10 mai 1981. Jean-François Forest, le 06 mai 2021, A la demande de Franck Charlier, Section PS de Gueugnon (71130).

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