– Mercredi 17 avril 2024
200 millions d’euros en moins dans le budget du ministère de la Culture, pour contribuer à redresser la barre des finances de l’État.
Un dérapage budgétaire évident, et 200 millions d’euros à trouver en cours d’année, parce que Bruno Le Maire s’est réveillé un matin avec la gueule de bois. Lui qui clame partout depuis 2017 que la maîtrise des dépenses publiques est son marqueur politique. On voit ça.
Réponse de la ministre Rachida Dati : « pas un euro ne manquera sur les territoires ». Entendez : la province. A revers de ceux, nombreux, qui pensaient qu’elle allait favoriser les établissements parisiens - campagne de 2026 oblige - elle annonce des coupes drastiques à l’Opéra de Paris, la Comédie Française ou encore au Louvre.
Le Parti socialiste regrette en premier lieu l’incapacité du gouvernement à maîtriser sa trajectoire budgétaire, et ce sans pour autant améliorer la juste redistribution, et donc la réduction des inégalités sociales. Un tour de force, si l’on peut dire.
Car les baisses annoncées pour le ministère de la Culture sont l’arbre qui cache la forêt, aussi vrai que l’État n’est pas le premier financeur d’une politique de la Culture dont la compétence est partagée avec les collectivités territoriales. Mais elles aussi sont dans le viseur de Bercy, et auront bien du mal à maintenir leur soutien dans ces conditions.
Et l’année suivante, en 2025 ? Quand il ne sera plus possible de compter sur la réserve de précaution pour le ministère de la Culture - que Rachid Dati mobilise cette année - et quand les collectivités, dont beaucoup sont déjà en difficulté, devront encore essorer leurs budgets ?
Quid des écoles d’art, et du soutien à l’enseignement supérieur artistique en général ? La ministre a lâché, en commission Culture à l’Assemblée nationale, qu’il y aurait de la casse… pour rétro-pédaler ensuite. Le ministère de la Culture s’en remettra-t-il à une philosophie politique darwiniste, comme la ministre a pu le laisser entendre lors de son audition à l’Assemblée nationale ? Ou à se contenter de « combler » l’offre culturelle en fonction de la présence du secteur privé ? Que va devenir le statut d’intermittent du spectacle, dans les réformes à venir de l’assurance-chômage ?
Le secteur culturel connaît un empilement de crises, au même titre que que ceux de la santé ou de l’éducation. Au rythme où le gouvernement démantèle l’intervention publique, à l’avenir ce ne sont pas 200 millions d’euros qu’il faudra bricoler, à la hâte et pour l’Etat, en matière de politique culturelle. Le bricolage touchera aussi, par ricochet, les budgets des collectivités. Lesquelles constateront vite que bricoler n’est plus jouable. Et de là, ce n’est rien moins que notre fameuse exception culturelle française qui sera menacée de disparition.
Charline Claveau, secrétaire nationale à la Culture