– Vendredi 21 janvier 2022
Depuis bientôt deux ans, le monde est plongé dans une terrible pandémie. Frontières fermées, quarantaine obligée, confinements répétés, couvre-feu imposé, notre humanité fait face à un bouleversement que notre histoire contemporaine n’a jamais eu à affronter. Cette pandémie qu’on aurait voulu enfermer aux gaules des courtes parenthèses se révèle être plus insidieuse. Elle durera un temps certain, ce temps dont nous n’essayons plus d’être moqueur tellement il se rit de nous. Fort heureusement des avancées sont là pour combattre cette pandémie, pour la ralentir et la circonscrire, mais il faudra faire preuve de patience et de détermination pour la voir définitivement disparaître de notre existence commune. Aujourd’hui, il faut vivre avec.
Bien des piliers qui soutiennent et élèvent notre société souffrent et s’érodent de cette crise intense que nous traversons. L’Éducation nationale, avec une jeunesse déstabilisée, qui se précarise pour une partie d’entre elle, et une communauté éducative sous pression pour maintenir sa mission première d’un équitable accès au savoir, en est un exemple. Il y a, bien sûr, la Santé avec un personnel soignant aux abois, un système à bout de souffle, que l’épidémie et ses vagues régulières viennent assommer un peu plus. Tant d’autres secteurs sont touchés : le tourisme, la restauration, la nuit, le sport professionnel ou amateur. Aujourd’hui, il faut composer avec ce virus et ses variants. Il ne faut pas, pour autant, laisser s’effriter ce qui fait le ciment de notre société et la raison de se forger un destin commun : notre vivre ensemble.
Depuis le début de la pandémie, un pilier essentiel de notre vivre ensemble est bousculé. La Culture, celle qui nous permet de nous retrouver, de nous découvrir, de partager et confronter nos sensibles, a bien du mal à retrouver une activité semblable à celle d’avant la crise. D’abord malmenés par de multiples tergiversations de l’exécutif avec des fermetures à la hâte des lieux culturels, ou l’imposition du passe sanitaire l’été dernier avant les cafés, bars ou restaurants, les actrices et acteurs du monde culturel ont dû s’adapter sans relâche, tricoter et détricoter constamment, pour continuer à exister et à faire exister leur vocation première : la rencontre des âmes avec un objet sensible, qu’il soit littéraire, poétique, sculpté, graphique, pictural, architectural, animé, vivant ou musical ; devant un objet sensible, qu’il soit venu d’ici ou d’ailleurs. Celles et ceux qui font la Culture ont appliqué à la lettre les recommandations et restrictions sanitaires de l’exécutif sans à aucun moment jouer avec le feu et la santé de leur public. Ils ont été et sont encore maintenant irréprochables.
Malgré tout cela, depuis cet été, la fréquentation est bien terne. Près de 50 % des Français ne se sont pas rendus dans un lieu culturel alors qu’ils étaient 88 % à le faire avant la pandémie de Covid-19. Tandis que de nombreux secteurs ont retrouvé un rythme de croisière équivalent à avant la crise (les centres commerciaux ont connu, eux, une légère hausse de fréquentation comparé au mois de novembre 2019), celui de la Culture peine encore à retrouver son public. Déshabitude, crainte ou incertitude, il est encore difficile de comprendre toutes les raisons de cette lente reprise mais s’il y a bien un seul mot d’ordre à donner dans ce désarroi, un seul cri du cœur à nous offrir, c’est que vive la Culture ! D’autant plus que l’année blanche pour les artistes et techniciens intermittents arrive à son terme, que l’État efface peu à peu son rôle premier de permettre un égal accès à la Culture à toutes et tous partout sur le territoire, que certaines collectivités réduisent délibérément leurs subventions pendant que d’autres restent solidaires, et que beaucoup de salariés de ce secteur se précarisent — on se rappelle du mouvement d’occupation des théâtres — il faut donc redoubler de vigilance, apporter plus que jamais le soutien nécessaire à ce secteur, et appeler de tous nos vœux à une année 2022 essentielle à la Culture.
Alors souhaitons-nous de retrouver les chemins de la découverte, souhaitons-nous de goûter à nouveau à la curiosité sans satiété, souhaitons-nous de se retrouver en dehors de toutes fins utilitaristes, simplement pour partager. Nous nous éviterons ainsi les mésaventures du repli sur soi et des pensées obscures, passéistes et rassies. À 2022 et pour que vive la Culture de demain !