Scolarisation des enfants porteurs de handicap : l’urgence

– Jeudi 28 septembre 2023

Samira Laal, secrétaire nationale au Handicap et à l'Inclusion

Yannick Trigance, secrétaire national à l'École, au Collège et au Lycée

Si notre école s’attache à permettre au quotidien la réussite de tous les élèves, pour autant ce droit à la réussite passe aussi par la scolarisation des enfants porteurs de handicap avec des conditions d’accueil matérielles et humaines adaptées sans lesquelles l’école « inclusive » reste au stade de l’incantation.

Des progrès ont certes été réalisés depuis la loi de 2005 en matière de scolarisation des enfants en situation de handicap, mais pour autant beaucoup d’entre eux sont aujourd’hui encore privés d’école ou non accompagnés faute de présence d’un personnel AESH (Accompagnement des Élèves en Situation de Handicap) à leurs côtés alors même que les parents ont reçu une notification de la Maison Départementale du Handicap –MDPH- attribuant des heures d’accompagnement à la scolarité par un personnel AESH.

Les enseignants qui accueillent dans leur classe des enfants porteurs de handicap ne bénéficient pour leur immense majorité d’aucune formation et se retrouvent trop souvent livrés à eux même, et ceux qui en bénéficient sont trop souvent déçus du contenu.

Nous rencontrons quotidiennement des parents totalement désespérés, découragés face au manque de personnels AESH –au nombre de 125 000, soit le second métier de l’Education nationale en terme d’effectifs- pour accompagner leur enfant qui voit se refermer les portes d’une scolarisation à laquelle il a pourtant droit.

Cette exclusion, cette marginalisation renforcent chez les enfants et leurs parents l’image d’une école de la République qui les maintient en dehors de notre société et qui les écarte de l’accès aux apprentissages.

Les chiffres parlent d’eux même : pour évaluer l'ampleur du problème, l'Unapei – Union nationale des associations de parents d'enfants inadaptés a récemment mené une étude auprès d'un échantillon de 2103 enfants accompagnés par ses antennes locales, dans six régions en France. Résultat : 23 % n'ont « aucune heure de scolarisation » par semaine, 28 % entre 0 et 6 heures, 22 % entre 6 et 12 heures et 27 % bénéficient de plus de 12 heures d'enseignement hebdomadaire.

Par ailleurs la présence d’ATSEM – agents territoriaux spécialisés dans les écoles maternelles – assurée par les collectivités ne peut ni ne doit se substituer aux personnels AESH, ce qui malheureusement reste trop souvent le cas comme par exemple dans bon nombre écoles de communes.

La scolarisation des enfants en situation de handicap constitue un enjeu majeur pour notre société, pour notre école publique, pour les équipes éducatives, pour tous les élèves et leurs parents.

C’est pourquoi un certain nombre de mesures essentielles et urgentes doivent être prises, parmi lesquelles :

  • La création d’un véritable statut de la Fonction publique d’État pour reconnaître le métier d’AESH (80 % travaillent en contrat à durée déterminée) ;
  • L’augmentation des rémunérations de ces personnels AESH sur toute leur carrière (leur rémunération oscille actuellement entre 750 et 850 euros) ;
  • La garantie de pouvoir travailler à temps complet sur la base d’un accompagnement élève à 24 heures ;
  • Un bilan de la mise en place des PIAL (Pôles Inclusifs d'Accompagnement Localisés) et de la politique de mutualisation des moyens ;
  • L’accès à une formation initiale et continue qualifiante à la hauteur de leurs missions ;
  • Le recrutement des AESH qui manquent pour permettre à tous les élèves en situation de handicap de bénéficier d’un accompagnement correspondant pleinement à leurs besoins ;
  • Le renforcement de la formation initiale et continue des enseignants à l’accueil des enfants porteurs de handicap, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif ;
  • Le développement des Unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS)

C’est un défi pour notre République et une urgence pour les familles et leurs enfants : l’école inclusive demeure une belle idée qui se concrétise trop difficilement malgré les discours engagés au plus haut niveau de l’État.

Réaffirmons que l’altérité, la coopération et le vivre-ensemble doivent prévaloir sur l’exclusion, l’entre soi et l’individualisme : au-delà de l’école, c’est la pierre angulaire de notre projet de société.

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