VIOLENCES FAITES AUX FEMMES : IL EST TEMPS D'AGIR !

Contribution thématique du Congrès de Villeurbanne 2021

Un constat alarmant : hausse des violences, insuffisance des moyens. Il est temps d'agir !

En 2019, 146 femmes ont été tuées par leur "partenaire" soit 25 de plus qu'en 2018 ce qui représente une hausse de plus de 20%. En dix ans, ce sont près de 1400 femmes qui ont été tuées ce qui équivaut à plus de 80% des crimes conjugaux. 225 000 femmes en moyenne subissent des violences au sein de leur couple chaque année en France, tandis que plus de 80 000 sont victimes de viol ou de tentatives de viol. 80% des victimes ont des difficultés à porter plainte ou à se faire entendre et 80% des plaintes pour violences conjugales sont classées sans suite. La crise sanitaire et le confinement sont venus amplifier ces violences (+35%). Derrière ces chiffres, il y a des vies qui seront à jamais détruites, des enfants malmenés qui porteront une image tronquée de l'amour, risquant de reproduire indéfiniment la violence. Nous socialistes, devons casser cette spirale de haine et de violence.

Depuis trop longtemps, l’action gouvernementale est en deçà d’une véritable politique de lutte contre les féminicides et les violences faites aux femmes. La France s’est notamment fait épingler par le Conseil de l’Europe en novembre 2019 sur l’insuffisance des moyens légaux et matériels mis en œuvre pour lutter contre ce fléau. Le Conseil pointe notamment l'insuffisance des dispositifs d'hébergement pour les femmes victimes de viol ou de violences. Il manquerait 2000 places d'hébergements d'urgence selon les associations féministes. Le Conseil déplore également que "la définition des agressions sexuelles et du viol ne repose pas sur l'absence d'un consentement libre mais exige le recours à la violence, la contrainte, menace ou surprise." Les insuffisances de notre système pénal et légal sont également mises à l'index quand trop souvent le viol est requalifié en délit alors qu'il s'agit d'un crime, quand un père violent conserve un droit de visite de ses enfants et en use pour continuer à exercer son emprise et sa domination sur sa femme et ses enfants, ou quand un tiers des victimes de féminicides avaient été signalées aux autorités avant de mourir.

Face aux "réformettes" macronistes, il est temps d'agir !

Le Président de la République a fait de la lutte contre les violences conjugales la "grande cause du quinquennat" et un Grenelle sur ce sujet a été organisé à l'automne 2019. Beaucoup de communication mais peu d'actions.
Même s'il convient de constater que certains outils (bracelets anti rapprochement, levée du secret médical dans certains cas de "danger immédiat", 
mise en ligne d'un portail de signalement des violences...) ont été mis en place, ils sont encore très insuffisants. Aucune enveloppe budgétaire supplémentaire n'a été dégagée et aucune mesure forte n'a été prise dans les domaines de l'éducation, de la prévention et de la formation.

De plus, une véritable carence législative et un manque de cohérence dans les réponses pénales subsistent. Actuellement il n’y a pas de « loi-cadre » qui aborde tous les aspects de ces violences. Il est primordial de créer une politique de grande ampleur de lutte contre les violences faites aux femmes. Cette politique doit passer tout d’abord par une qualification pénale du terme féminicide, elle doit accompagner les témoins et les victimes, et elle doit prévoir la prise en charge des auteurs de violence, comme cela est fait dans d'autres pays.

Comme d'autres pays, il est temps d'agir !

En Espagne, la gauche gouvernementale a créé une législation proactive dès 2004 avec : la formation "obligatoire" de la chaîne de prises en charge ; l'accompagnement des victimes avec notamment des aides au logement ;
la création de tribunaux spécifiques pour des procédures rapides ; la possibilité pour l'Etat de se substituer à la victime pour porter plainte ; la généralisation du bracelet anti rapprochement (depuis 2009).

En 2017, l‘État a lancé un pacte national de lutte contre les féminicides avec 200 millions d’euros dédiés par an durant 5 ans, soit un milliard d'euros en tout. Surtout, les féminicides sont en général très médiatisés, il y a eu une grosse prise de conscience du problème dans l'ensemble de la société espagnole. Les violences envers les femmes ne sont plus considérées comme des "drames conjugaux" ou des "meurtres passionnels".

Depuis la mise en place de cette législation, les féminicides ont diminué de 15 % et les dépôts de plaintes ont plus que doublé (les victimes déposent plainte plus facilement).

Plusieurs pays dAmérique latine ont reconnu le féminicide depuis 2007 comme un meurtre avec des circonstances aggravantes et prévoient des peines plus lourdes que pour un "simple" homicide. Selon l'organisation mondiale de la santé, le terme de féminicide désigne "tout meurtre de filles ou de femmes au simple motif qu'elles sont des femmes". En France et en Europe, le féminicide est invisible dans la plupart des législations. Inscrire une référence au féminicide dans le code pénal ne ferait pas disparaître les meurtres mais il s'agirait d'un pas symbolique important, car comme le dit l'association "Osez le féminisme", "pour combattre le féminicide, il faut commencer par le nommer".

En 1995, au Canada, le déploiement d’un plan sur 5 ans est lancé avec des moyens financiers conséquents et un travail transversal des ministères. Ce plan s’accompagne d’actions de sensibilisation, de la création de centres d’accueil et de la formation des policiers.

En 2018, 600 millions de dollars canadiens sont ajoutés pour lutter contre les violences et les féminicides avec de nouvelles mesures : un travail d'écoute des victimes pour co-construire des solutions ; le développement des centres d’accueil pour les victimes et les auteurs ; la prise en charge des auteurs pour éviter la récidive ; la possibilité pour la police de se substituer à la victime qui aurait trop peur de porter plainte ; la possibilité d’enquêter sur les potentiels auteurs.

La Suède a proposé une nouvelle définition du viol. Faire cesser les violences sexuelles passe déjà par la définition même des crimes. Si en France, le viol est défini comme " tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise", la Suède a modifié la loi, en juillet dernier, en retenant une notion simple : une personne est désormais coupable de viol dès lors que le ou la partenaire n’a pas participé librement à la relation sexuelle. Tout acte sexuel sans accord explicite est passible de 6 ans de prison. Nul besoin de justifier de menace ou violence, c'est la notion de consentement qui prime.

Face à ce constat, face à l'insuffisance des réponses du gouvernement, et inspirés des engagements de ces pays contre les violences, nous socialistes, pensons qu'il est temps d'agir et de porter réellement l'égalité dans notre société. Nous proposons :

- La mise en place d'un pacte national de lutte contre les violences faites aux femmes

Une priorité ne doit pas simplement être énoncée comme l'a fait le président de la République au début de son quinquennat, elle doit être portée politiquement et être servie par des moyens adaptés. C'est pourquoi nous proposons que le ministère en charge de l'égalité Femme / Homme mette en œuvre un pacte national sur plusieurs années qui sera porté par une loi-cadre. Un budget conséquent programmé également sur plusieurs années et ventilé entre l'Etat et les différentes collectivités territoriales impliquées devra être établi.

- Une loi-cadre contre les violences

Notre législation n'est pas à niveau et une réforme d'envergure doit être menée si nous voulons vraiment obtenir des résultats en matière de lutte contre les

violences faites aux femmes. Cette loi-cadre devra à la fois porter cette mise à jour de notre code pénal et l'ensemble des mesures que nous formulons.
La qualification ou a minima la référence au féminicide doit être ajoutée à notre code pénal.

Nous souhaitons que la définition du viol soit modifiée et basée sur la notion de consentement et que ce crime ne puisse plus être requalifié en délit. Il faut pour cela mettre en place une juridiction spéciale afin de traiter spécifiquement et rapidement les affaires de violences faites aux femmes.

- Une réponse rapide et adaptée aux violences

Nous devons améliorer la prise en charge des victimes. Le processus pour porter plainte est fastidieux et trop long. Les femmes victimes de violences ne sont pas prises correctement en charge par les officiers de police judiciaire souvent par manque de formation. De ce fait, elles sont souvent stigmatisées ou culpabilisées à tort et nombreuses sont celles qui renoncent à porter plainte. Nous proposons que toute la chaîne de prises en charge de la victime (personnel soignant, forces de l'ordre, juges...) fasse l'objet d'une formation spécifique obligatoire. Au-delà, nous proposons que l'Etat puisse se substituer aux victimes pour porter plainte et que des structures dédiées soient mises en place dans les grands hôpitaux qui permettent aux victimes d'avoir accès dans un même lieu à un dispositif médical et psychologique complet : prélèvements médico-légaux, soutien et suivi psychologique et même dépôt de plainte auprès d'inspecteurs spécialisés formés, présents dans la structure.

- Un meilleur accompagnement des victimes, des enfants-témoins, des auteurs

Nous rendrons obligatoires la mise en place de dispositifs d’hébergement d’urgence dans les communes de plus de 80 000 habitants-e-s, destinés aux femmes victimes de violences au sein de leurs familles et accompagnées de leurs enfants. Cette réponse déployée sur l'ensemble du territoire proposera pour 6 mois minimum, l'hébergement sous gestion tripartite (Etat-Collectivités territoriales-Associations). Plus largement, nous soutiendrons et nous inciterons les autres collectivités, à créer également ces structures car les violences ne concernent pas que les grandes villes, elles sont aussi présentes dans des zones moins urbaines.

La délivrance d'ordonnances de protection et le port du bracelet anti rapprochement deviendront obligatoires pour toute condamnation afin de protéger les victimes des violences.
Le droit de visite des pères violents à leurs enfants doit être suspendu ou restreint et encadré, à partir du moment où une plainte est déposée.

Les enfants-témoins (victimes aussi) de violences conjugales et pour certains de féminicides, qui souffrent bien souvent de stress post-traumatique doivent être accueillis au sein d'unités spécialisées afin de recevoir un accompagnement pluridisciplinaire.

Nous créerons également des centres d'accueil des auteurs de violence avec une prise en charge afin d'éviter la récidive. Les hommes condamnés, auteurs de violences conjugales, auront l’obligation d’un suivi médical et de participer à des groupes de paroles adaptés. Ceux qui refuseront tout suivi verront leur peine transformée en temps d'incarcération.

- Des actions d'éducation et de prévention

Nous devons éduquer dès le plus jeune âge en luttant contre les stéréotypes de genre. Il faut donc former le personnel encadrant (enseignant-e-s, animatrices et animateurs, éducatrices et éducateurs...) mais également sensibiliser les enfants et les jeunes dans le cadre scolaire et associatif.

Des actions de prévention doivent être mises en place également notamment auprès des jeunes filles qui méconnaissent bien trop souvent leurs droits et les structures comme le planning familial.

« Socialistes donc féministes », un réel engagement au-delà des mots

Comme tous les progrès sociétaux majeurs qui ont fait avancer notre pays, c'est à nous, socialistes, qu'il reviendra de faire reculer véritablement et durablement les violences faites aux femmes.
Nous ne devons pas simplement nous mobiliser le 25 novembre (journée i
nternationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes) et le 8 mars (journée internationale des droits des femmes). Notre parti doit être sur le pont tous les jours et donner à chaque féminicide, à chaque fait de violence, un retentissement à la mesure des drames que vivent ces femmes.

Contribution de la commission égalité Femmes / Hommes et de lutte contre les discriminations de la Haute-Garonne.

 

Signataires : 

Caroline Vauchère, secrétaire fédérale (31) en charge de l’égalité Femmes / hommes et de la lutte contre les discriminations,

Karine Traval-Michelet, Maire de Colomiers et vice-présidente de Toulouse Métropole (31)

Kharfallah Nadia, MJS, Conseil Fédéral (31)

Estelle Picard, Conseil National (79)

Claude Raynal, Sénateur (31)

Cédric Andrieu, Conseil Fédéral (31)

Hervé Hirigoyen, délégué HES Toulouse-Occitanie, Conseil fédéral (31)

Laurence Casalis, Conseil fédéral (31)

Sylvie Lacombe, Présidente de la commission des conflits (81)

Christine Revault d’Allonnes Bonnefoy, Conseil national (07)

Hélène Rouch, Conseil national, Secrétaire fédérale (31)

Vanessa Thomas, Bureau fédéral (44)

Guillaume De Almeida Chaves, MJS, Conseil Fédéral (31)

Martine Martinel, bureau fédéral, ancienne députée (31)

Stéphane Ruffat, militant (31)

Daphné Chancelier, militante (84)

Cécile Etoile, MJS (31)

Philippe Briançon, Bureau fédéral, Conseiller régional Occitanie (31)

Stéphanie Calas, Bureau fédéral (31)

Véronique Barreau, militante (84)

Omri Schwartz, militant (31)

Bernard Rault, secrétaire de section, Conseil fédéral (31)

Mehdi Benlahcen, Conseil national complémentaire, conseiller et Président du groupe d’union de la gauche à

l’assemblée des Français de l’étranger (AFE)

Arnaud Simion, Conseil fédéral, Vice-président du Conseil départemental (31)

Déborah Fort, Bureau fédéral (31)

Joël Carreiras, Conseil national (31)

Kévin Bodart, militant (31)

Céline Cammas, Conseil national (81)

Jean-Louis Llorca, conseiller départemental (31)

Suzy Candido, Conseil fédéral (31)

Hugues Bernard, secrétaire fédéral (31)

André-Paul Camilleri, Conseil fédéral (31)

Mathieu Bourgasser, Conseil national (31)

Anne Tousche, Conseil fédéral (31)

Océane Montagnac, militante (75)

Fabien Jouvé, secrétaire de section, Conseil national (31)

Fatiha Adjelout, militante (31)

Louis Tonna, militant (31)

Jacqueline Devier, Bureau fédéral (06)

Therèse Moizan, militante (31)

Laurie Marsoni-Bornstein, Conseil fédéral (31)

Elisabeth Perles, militante (31)

Rémi Casalis, MJS (31)

Jérémy Van de weerdt, militant (61)

Stéphane Olive, militant (31)

Christophe Corbi, militant (31)

Laurence Viola, militante (11)

Sonia Tiraoui, militante (31)

Eric Bessou, Conseil fédéral (82)

Christine Lopez-Uroz, militante (31)

Jérôme Ruffat, militant (30)

Alexandre Lacambre Zamora (31)

Jean-Marc Mansour, militant (31)

Olivier Casalis, militant (31)

Cathy Clouscard, militante (31)

Ali Bengoua, militant (31)

Elisabeth Maalem, militante (31)

Emile Etoile, militant (31)

Michel Etoile, militant (31)

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